La mort terrasse brutalement ses victimes en les arrachant à leurs activités. De plus, elle est parfaitement insensible aux inégalités sociales : elle rend les hommes quelconques en les transformant en squelette si bien que le roi ne se distingue plus de l'humble laboureur. Ces deux idées sont celles qui donnent naissance à un thème typique de la fin du Moyen Age : La Danse macabre. Ce thème iconographique, fréquemment accompagné d'un dialogue entre le mort et le vivant, se présente le plus souvent sous forme de gravures ou de peintures. Il représente de façon symbolique une danse dans laquelle un squelette entraîne des vivants de toutes conditions sociales dans la mort. Ces nombreuses images insérées dans les manuscrits, dans les livres ou sur les murs veulent se poser devant les regards comme un memento mori, une évocation du moment suprême, un rappel de l'incertitude dans laquelle nous sommes condamnés à vivre.
[...] Il aborde le même thème que la Danse macabre, à savoir, celui d'une mort qui est indifférente aux conditions sociales. Dans les fresques d'Orcagna au Campo Santo, la mort se présente sous l'aspect d'une femme âgée au visage impitoyable, avec de grandes ailes de chauve-souris, armée d'une faux. Elle abat tout sur son passage : On dit d'Elle qu'Elle moissonne le champ de la vie, tandis qu'au-dessus d'Elle, un tourbillon anges et démons se disputent les âmes (symbolisé par des petits corps nus) »[28].Ce Triomphe de la mort constitue la représentation peinte la plus célèbre de la Rencontre des trois vifs et des trois morts. [...]
[...] En outre, les textes des danses macabres font mention de certaines étapes de la décomposition, mais ils ne s'arrêtent jamais dessus, ils n'évoquent l'état de pourriture que de façon discrète, au contraire du Dits qui se complait à décrire le processus avec force détails. Une autre dissemblance peut être relevée, dans le Dit, l'idée d'un défilé de toutes conditions en marche vers la mort n'apparaît pas encore. En revanche, ce qu'il y a de neuf et qui se retrouve dans la Danse macabre, c'est qu'un lien est établi entre les vivants et les morts et qu'un dialogue s'engage entre eux. [...]
[...] En revanche, le rapport que l'homme entretient avec elle change au fil des siècles, la manière dont elle le frappe également. Pour Ariès, ce rapport s'exprime à travers quatre moments clefs de l'histoire de la mort: mort apprivoisée la mort de soi la mort de toi et la mort interdite Il voit dans la période médiévale un passage de la mort apprivoisée (mort acceptée, attendue paisiblement sans drame excessif) à la mort de soi, plus individuelle et moins tolérée. Si nous avons constaté qu'à partir du XIVe siècle le sens de la mort n'est effectivement plus le même qu'auparavant, cette réflexion n'est pas totalement convaincante, car nous l'estimons trop simpliste. [...]
[...] Le caractère foudroyant de cette nouvelle épidémie de peste s'explique par une mutation de la maladie. Les épidémies anciennes, celles qui, à intervalles réguliers, atteignaient autrefois nos pays, étaient des formes buboniques de la peste; elles se transmettaient par les rats malades et les morsures de puces. En 1348, la peste présente, de plus, une forme nouvelle, encore inconnue, semble-t-il, en Occident : l'infection pulmonaire qui évolue beaucoup plus vite et se transmet bien plus rapidement, par l'air, d'où les progrès effrayants de la contagion et le nombre élevé des victimes. [...]
[...] Comme nous l'indique, ici, ce vers d'Hélinant de Foidemont : Mort, en ton miroir se mire l'âme le verbe mirer ne signifie pas se regarder dans un miroir mais regarder, réfléchir, fixer sa pensée Il ne s'agit donc pas du miroir en tant que tel, mais du reflet envoyé par ce dernier; le lecteur a sous les yeux un exemple un modèle sur lequel il peut porter sa réflexion. La danse macabre permet, en définitive, de faire réfléchir l'individu quant au moment de son jugement dernier, et fait du problème du salut un cas spécifique à chaque personne. [...]
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