Attestée dès l'Antiquité, la tapisserie connaît dans la seconde moitié du XIVe siècle un éclatant renouveau et un premier Âge d'or. Sa principale innovation est la représentation de sujets historiés, proches de ceux des enluminures. Son succès peut sans doute s'expliquer en premier lieu par le confort qu'elle procure (protection contre le froid) et par sa facilité de manipulation qui en fait le support idéal à la création de décors éphémères.
La tenture de l'Apocalypse est un des premiers exemples de thèmes sacrés traités en tapisserie. On assiste à cette époque à un essor rapide du mécénat laïc et à la diversification des registres d'inspiration. On s'est souvent interrogé sur les raisons qui ont amené Louis d'Anjou, son commanditaire à choisir l'Apocalypse comme thème unique de sa tapisserie.
Il se trouve que dès le Ve siècle, ce thème est déjà prisé par les empereurs, et l'engouement pour ce thème ne se démentira pas au cours des siècles suivant. L'Apocalypse est un sujet prestigieux, il n'y a donc pas lieu de s'étonner du choix de Louis d'Anjou. En ce qui concerne le support, la tapisserie devient, à ce moment-là, un moyen d'affirmer sa puissance et un enjeu diplomatique à une époque où l'argent prend une place grandissante et où les investissements dans l'art se multiplient.
[...] Les figures fantasmagoriques sont variées et nombreuses : sauterelles maléfiques à têtes d'hommes barbus et aux queues de scorpion, chevaux à tête de lion et aux queues de serpent dont la bouche exhale fumée et soufre, dragons rouge feu incarnant les forces maléfiques, au corps ailé car ils viennent du monde céleste dont ils sont déchus, oiseaux de proie, grenouilles vomies par les monstres, masques diaboliques crachant le feu et les éclairs. La Bête de la mer est la représentation du pouvoir politique, c'est-à-dire Rome. Elle a un corps de léopard, des pattes d'ours à six griffes, une gueule de lion, sept têtes, signe d'une intelligence exceptionnelle, dix cornes, marque de sa puissance, dix diadèmes, preuve d'un pouvoir royal. Le léopard a exactement la pose de celui qui orne le blason britannique. [...]
[...] Tous ces costumes du XIVe siècle sont bien loin de la Rome antique. On entre là dans une lecture politique de l'œuvre, révélatrice en filigrane des situations, des angoisses, des duretés et des haines du XIVe siècle. Nous allons le voir plus précisément en étudiant des exemples. II Exemples des deux premières pièces Saint-Jean s'adresse dès le début aux sept églises d'Asie Mineure pour les prévenir des malheurs futurs. A travers elles, il s'adresse à toute l'église, disséminé sur le pourtour méditerranéen. [...]
[...] C'est une vision plutôt optimiste, un message d'espoir dans ces temps de malheur qui légitime ce choix de sujet. Cette force d'expressions, qui place la tapisserie au niveau du grand art, a été comprise par tous les princes épris de beauté et explique le choix du support. L'Apocalypse est un dialogue entre texte, image et imaginaire. Ses différents sens de lecture sont laissés à l'interprétation du spectateur. Bibliographie indicative Le XVIIe siècle français. Peinture, mobilier, céramique, orfèvrerie, bronzes objets d'art, verrerie, tapisserie, tapis, tissus, sculpture, ensembles décoratifs de Faniel Stéphane Dir. [...]
[...] Après l'habituel personnage assis sous un baldaquin, on trouve le tableau 44 Le chant du cantique nouveau. Des scènes comme La moisson des élus ou Le sommeil des justes sont presque codées et destinées à un public averti. La moisson des élus (4ème pièce, tableau 53) représente la récompense des Justes qui récoltent le fruit mérité de leur sagesse et de leur fidélité. On a un personnage âgé, dépourvu d'auréole et de nimbe, mais avec une couronne sur la tête. Légèrement en dessous, avec les mêmes attributs, on trouve un autre personnage plus jeune (le Christ). [...]
[...] Elle n'était exposée qu'en de très grandes occasions pour frapper l'imagination et montrer la puissance et le luxe des princes d'Anjou. Ainsi, le duc Louis II d'Anjou, à l'occasion de son mariage avec Yolande d'Aragon en décembre 1400, la fit porter d'Angers à Arles, puis déployer dans la cour d'entrée du palais épiscopal. Sinon, elle restait pliée dans des coffres. Même dans la cathédrale d'Angers où elle sera léguée par le roi René en 1480, elle ne trouvera jamais d'accueil suffisant pour y être suspendue en entier (alors que la fonction de la tapisserie est avant tout pratique). [...]
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