L'œuvre gravée de Giovanni Battista Piranesi, plus connu sous le nom de Piranèse,se caractérise par sa richesse et sa diversité. Il s'intéresse autant aux monuments de son époque qu'aux vestiges de l'Antiquité, voire à des monuments crées par son imagination, oscillant entre description objective et invention plastique.
Cette ambivalence marque son œuvre gravée, qui est servie par la technique de l'eau forte, unique procédé utilisé par Piranèse pour ses œuvres. En 1740, à l'époque de l'arrivée de Piranèse, la ville de Rome offrait de nombreux sujets d'inspiration fixés sur les « vedute »ou vues gravées, destinées aux touristes. Au XVIIIe siècle, l'engouement pour le voyage en Italie stimule ce mouvement, et lors de l'arrivée de Piranèse, le principal auteur de « vedute » était Giuseppe Vasi, son futur maître.
Si au premier abord les gravures de Piranèse ressemblent au « vedute traditio » avec une mise en page habituelle, et une présentation en oblique des monuments, Piranèse apporte des innovations, sans jamais perdre de vue la fonction essentielle de la « veduta » qui est la transmission de faits réels.
[...] La partie centrale du livre est consacrée à l'architecture funéraire. L'auteur y transforme entièrement la Coupe sommaire du tumulus d'Alexandre Sévère, publiée par Ficoroni en 1744. Les structures et les matériaux du monument sont reproduits avec une grande minutie et les espaces intérieurs corrigés grâce à des fouilles et des mesures exécutées sur place. Piranèse indique l'entrée primitive du tunnel avec ses marches, ainsi que les différents niveaux de débris dus aux détériorations du temps. La légende de la gravure aide à la compréhension des renseignements donnés et explique que ses conclusions s'appuient sur une fouille décrite par Flaminio Vacca à la fin du XVIe s. [...]
[...] La méthodologie de travail de Piranèse peut donc s'apparenter à celle d'un archéologue,en ce qu'il recherche l'objectivité,mais l'artiste se démarque bel et bien du scientifique en recourant à sa faculté d'imagination, comme nous le verrons. L'exigence d'objectivité, gage d'un travail scientifique Piranèse mit au point une nouvelle manière d'étudier l'antiquité avec cet ouvrage. Il estime qu'il ne suffit plus de relever les simples données extérieures mais qu'il faut comparer les plans, les coupes et perspectives pour obtenir une meilleure description des monuments, de leurs matériaux, de leurs techniques. Il insiste sur l'importance des documents anciens pour les confronter à la topographie de la ville moderne. [...]
[...] De quelle façon Piranèse met-il ses qualités artistiques au service d'un monde inquiétant ? Sur quels aspects choisit-il d'insister dans une seconde version ? Et enfin, en quoi cet univers illustre-t-il les réalités sociales de cette époque, et l'ambivalence de ce thème ? C'est ce que nous verrons ici. L'habileté technique vectrice d'un monde angoissant Les Carceri sont l'œuvre d'un artiste qui maîtrise les techniques de la perspective et des jeux de lumière. On le voit notamment dans la Planche XIV où l'artiste fait errer l'œil du spectateur à travers un dédale de rampes, d'escaliers, de passerelles et de galeries. [...]
[...] Piranèse est investi d'une mission au service des vestiges de Rome et montre plusieurs aspects : en tant qu'intellectuel il recherche l'objectivité, mais en tant qu'artiste il ne peut s'empêcher d'exprimer son imagination et sa création dans un travail de reconstitution, mais une imagination qui reste canalisée et orientée, à la différence de celle qu'il laisse foisonner dans les Carceri qu'il crée par la suite. III) Un univers imaginaire inquiétant : les carceri Les carceri ou prisons, sont pour l'essentiel des capricci c'est-à- dire des caprices ou jeux de l'imagination et se caractérisent par le caractère expérimental de leurs architectures et leur aspect déroutant. L'artiste reprit ce thème carcéral qui était déjà inscrit dans la tradition du décor de théâtre, reflet des préoccupations de l'époque. [...]
[...] Un plaidoyer pour le génie romain Vers 1755, se développe chez Piranèse une volonté de vanter les réalisations héroïques de Rome, en réaction au débat Gréco-Romain. Désormais, ses gravures ne se contentent plus de représenter ce qui est, mais de démontrer ce qui fut Pour cela le format s'agrandit, et tous les effets de la perspective sont mis au service de la démonstration. Il s'attaque au Mausolée d'Hadrien (devenu au Moyen-Âge le château Saint-Ange) où il souligne ce qu'il concevait comme l'aspect dramatique des réalisations de la technologie romaine comme le montre la Coupe qui laisse voir des fondations cyclopéennes d'une complexité extrême. [...]
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