La grande Odalisque d'Ingres

Résumé du document

Jean-Auguste-Dominique Ingres est sans conteste l'un des artistes français du XIXème siècle les plus connus du grand public. Son art est généralement considéré comme l'alternative au romantisme de Delacroix.
Il demeure pour la postérité un très grand peintre par l'art du nu et ses nombreux et remarquables portraits : il en exécuta plusieurs qui traduisaient les goûts de la population de son époque mais qui étaient également sujets à polémique de par la nouveauté de l'art proposé par l'artiste.

Extraits

[...] L'Orient y est imaginé avec un foisonnement de détails exotiques. L'Orient n'est présent dans la grande odalisque que par les étoffes bleues sur lesquelles est installée lascivement la femme et par les quelques accessoires comme le turban chatoyant, les perles, le narghilé et l'éventail de plumes de paon qui appartiennent à un Orient de bazar, mais également par le thème de l'odalisque en lui-même. Ingres a tiré ces discrets détails des miniatures de Gros et de Denon. Ces accessoires permettent de situer ce nu qui aurait pu se trouver n'importe où, dans un Orient fantasmé. [...]

[...] Auguste Jal qui détestait l'art d'Ingres par exemple explique sa vision esthétique qu'il partage avec un grand nombre de ses confrères : il n'y a de beau que le vrai ; que le vrai seul est la base de tous les arts d'imitation. Or la grande Odalisque n'est pas vraisemblable avec ses trois vertèbres de trop et c'est cette déformation anatomique qui contrarie le public et les critiques à cette époque et qui maintenant rend l'œuvre célèbre. Charles Langdon quant à lui dit à propos de cette œuvre dans ses Annales du musée. Salon de 1814, publiés en 1819 : La pose a de l'élégance ; les formes tout incorrectes qu'elles sont présentent des contours coulants et assez gracieux. [...]

[...] Il est évident que l'artiste a péché sciemment, qu'il a voulu mal faire, ou qu'il a cru ressusciter la manière pure et primitive des peintres de l'Antiquité ; mais il aura pris pour modèle quelques fragments d'un temps postérieur et d'une exécution dégénérée qui l'ont complètement égaré Ces critiques ne comprenaient pas qu'Ingres a dépassé volontairement le canon préétabli auquel les artistes se conformaient auparavant pour proposer une vision analytique. Les déformations anatomiques et le traitement incorrect du corps (l'artiste ayant préféré allonger son nu de dos pour en souligner la courbure) sont voulus par le peintre qui préfère sacrifier volontairement la vraisemblance au profit de la beauté. Ceci est confirmé par les croquis et esquisses préparatoires de ce tableau qui présentent une anatomie aux proportions parfaites. Ainsi la déformation n'intervient que dans la mise en œuvre finale de la composition. [...]

[...] Il a longtemps représenté l'esprit classique français dans cette première moitié du XIXè siècle où Delacroix fait figure de chef de file du romantisme. Les grandes compositions historiques inspirées de l'Antiquité justifient pleinement cette classification. Certains tableaux sont cependant influencés par la mythologie germanique, la féerie médiévale et le monde du rêve. En 1797, il entre dans l'atelier de David où il se rapproche du groupe des barbus qui revendique une perfection formelle et un retour aux sources pré-maniéristes. Ingres ne se départit jamais du métier lisse et parfait légué par son maître David. [...]

[...] C'est le cas avec cette Tête de grande odalisque conservée à Grenoble où il ne représente que le visage de la femme nue du tableau étudié auparavant sur une toile circulaire. CONCLUSION La grande Odalisque d'Ingres est aujourd'hui l'œuvre la plus connue de cet artiste néo-classique à cause de ses déformations anatomiques qui à son époque lui avaient valu des critiques virulentes et une opinion partagée. La sensualité de la femme exprimée dans la courbe de son corps et la mise en scène orientalisante font de ce tableau un chef d'œuvre de l'art français révélateur des attentes et du goût de la population du XIXè siècle en matière d'art et de fantasme exotique. [...]