Cinéma, Communisme, socialisme, Costa Gavras, Eisenstein, Aveu, Cuirassé Potemkine, URSS, Staline, Odessa, Arthur London, mythe, Procès de Prague, Révolution russe, Narkompros (Commissariat du peuple à l'Instruction)
Le 8 décembre 1991, les dirigeants russes publient un rapport annonçant la dissolution de l'Union des républiques socialistes soviétiques. Le 25, Mikhaïl Gorbatchev lit un discours qui reconnaît la défaite du camp soviétique à l'issue de la Guerre froide. L'URSS aura ainsi vécu 69 années pendant lesquelles elle aura porté les espoirs d'une partie de l'humanité, jusque dans le bloc adverse. Le régime incarnait les idéologies socialistes et communistes qui réunirent des hommes de tous les horizons, de toutes les nations. Ses principaux dirigeants furent élevés au rang de mythes, adorés par des hommes qui les considéraient comme des héros.
Le régime connaît cependant des limites. L'idéal qui a porté le mouvement révolutionnaire en 1905, puis 1917, a très vite été remplacé par la réalité du pouvoir totalitaire. Le Parti prend dès lors le dessus sur l'Homme. À sa tête, un seul individu commande, légitimé par l'invocation de la masse prolétaire qu'il est censé défendre. De 1924 à 1953, l'URSS est dirigée par l'un des plus terribles dictateurs du XXe siècle : Joseph Djougachvili Staline. Il ordonnera des purges massives et mettra la société soviétique sous strict contrôle, détruisant tout embryon d'opposition pouvant menacer son pouvoir. Les historiens estiment à 18 millions le nombre de personnes déportées au Goulag sous Staline, faisant un à deux millions de victimes, et à six millions le nombre d'opposants exilés de force. Malgré cela, l'URSS conserva une image de régime idéal, attaché à l'égalité des Hommes et à leur liberté, de régime appliquant parfaitement les idéologies socialiste et communiste.
[...] La première autorise une lecture en caméra subjective de l'évolution du régime, entre commande sociale de la part de l'État et idéologie. La seconde sonde le poids des images dans la construction du mythe révolutionnaire bolchevique, dans l'appréhension du stalinisme, dans la vision occidentale de l'histoire russe. La portée du Cuirassé Potemkine et de L'Aveu doit être relativisée en fonction du temps et de l'espace. Si le Cuirassé Potemkine fut considéré par un groupe d'intellectuels cinéphiles, lors de l'exposition universelle de Bruxelles en 1958, comme le meilleur film de tous les temps, son succès au sein du bloc soviétique reste très discutable. [...]
[...] Eisenstein exporte le mythe d'un mouvement fraternel et solidaire en lutte contre la tyrannie. L'émotion suscitée par les images est un rapport à la révolution (à la patrie de la révolution) dans un espace politique où elle n'a pas encore eu lieu, dont elle constitue pour certains l'horizon d'attente des démocraties libérales Cependant, en octobre 1928, la justice française oblige l'association des Amis de Spartacus à se dissoudre. Le film est, dès lors, interdit dans les salles traditionnelles. Il sera boycotté jusqu'en 1953. [...]
[...] in Anne Applebaum, Goulag, une histoire, Paris, Folio Histoire p.233. Raymond Aron, L'Aveu et le mensonge Figaro décembre 1976. Arthur London, l'Aveu. Dans l'engrenage du procès de Prague, Paris, N.R.F. Gallimard p.5. Nicolas Werth, op. cit. p.385 Le NKVD, Commissariat du peuple aux Affaires intérieures, était la police politique du régime, en charge des purges staliniennes et notamment aussi, du goulag. Expression de Tanguy Perron, La croisière clandestine du Cinéma- Potemkine ou les tribulations des images rouges au pays du capitalisme, In Bruno Drewski, dir. Octobre 17. [...]
[...] Était-ce cependant la volonté première de Costa Gavras ? L'auteur de Z et de l'État de Siège peut-il vraiment être considéré comme porteur de l'idéologie dominante ? Son film n'est-il pas plutôt empreint d'une volonté de réforme, salvatrice du régime ? L'Aveu vient donc remettre en cause l'entité soviétique, son idéal et sa perfection de façade, mettant en lumière les failles de sa bureaucratie à la dérive. L'horreur des tortures, l'impuissance des victimes, la perfection malsaine des processus de trucage et de mensonge, mais également l'autoritarisme inépuisable qui rabat tout espoir naissant, pousse le spectateur à changer son regard vis-à-vis d'un régime longtemps mystifié. [...]
[...] Il s'agit pour Costa Gavras de dénoncer les dérives du système stalinien et soviétique en général. Le cinéaste met également en exergue les limites de la déstalinisation. Les images d'archives de l'invasion de la Tchécoslovaquie par les chars soviétiques font s'écrouler l'espoir du changement incarné par le récit de Gérard London. Le stalinisme n'est pas mort avec Staline et le totalitarisme demeure une caractéristique majeure du régime. L'Aveu démonte un à un les aspects de ce totalitarisme. Suivi puis arrêté sans savoir pourquoi, Gérard London rentre directement dans un engrenage dont il ne comprend pas la nature. [...]
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