L'« ethnofiction » se situe, comme son nom l'indique, à la frontière entre la fiction et l'ethnologie. Il s'agit d'un genre nouveau, fruit d'une réflexion cinématographique et philosophique sur la représentation de la vérité. Rouch ne pense pas que la vérité du documentaire provienne de l'objectivité du réalisateur et de la rigueur de ses observations. Il ne croit pas à une vérité pure que le réalisateur pourrait saisir en restant neutre. Il refuse au contraire de s'effacer devant les réalités qu'il filme et s'assume comme l'auteur de ses documentaires.
Dans Moi, un Noir, il fait donc sauter deux tabous : non seulement il choisit la fiction pour représenter la réalité ethnographique mais il choisit également de coproduire cette représentation de la réalité avec le personnage principal du documentaire qui va commenter lui-même les images. Après avoir introduit sa démarche (1mn30) il déclare « c'est lui le héros du film, je lui passe la parole ». L'acteur Oumarou Ganda (alias Edward G Robinson) va donc improviser son commentaire en studio sur les images pré-montées. Il mêle ainsi son regard, sa subjectivité à ceux de Rouch. A l'observation distanciée, Rouch préfère le dialogue. Les images étant muettes (la caméra Bell&Howard 16 millimètres n'était pas capable d'enregistrer le son) et discontinues (on l'a vu plus haut), le rôle de commentateur de l'image est bien sûr crucial.
[...] De plus le pré montage, la courte durée et la cette discontinuité des images est un frein pour les commentateurs qui sont souvent coupés dans leur commentaire d'un plan par l'arrivée des plans suivants. Enfin on constate que les rôles de chaque commentateur sont en fait assez éloignés. On voit la différence de niveau des deux commentaires dans le rapport entre le son et l'image : la voix d'Oumarou explique l'image, dit les dialogues, colle toujours à l'image et sa présence se légitime seulement par la présence d'images : quand on voit la fraternité nigérienne il décrit la fraternité, etc . [...]
[...] Ce n'est pas le cinéma de la vérité mais la vérité du cinéma dira Rouch. On peut parler d'un néoréalisme car l'histoire qui nait est aussi décousue que la vie et interroge autant le spectateur. Cette méthode fait du film un miroir où Eward se découvrait lui-même pour les acteurs autant qu'un témoignage pour le spectateur d'une histoire qui pourrait arriver aux jeunes gens semblables aux personnages de ce film qui chaque jour arrive dans les villes d'Afrique ( premiers mots du film). [...]
[...] La postsynchronisation au service du cinéma direct : l'usage du son dans "Moi, un Noir" de Jean Rouch L'« ethnofiction se situe, comme son nom l'indique, à la frontière entre la fiction et l'ethnologie. Il s'agit d'un genre nouveau, fruit d'une réflexion cinématographique et philosophique sur la représentation de la vérité. Rouch ne pense pas que la vérité du documentaire provienne de l'objectivité du réalisateur et de la rigueur de ses observations. Il ne croit pas à une vérité pure que le réalisateur pourrait saisir en restant neutre. [...]
[...] Il mêle ainsi son regard, sa subjectivité à ceux de Rouch. A l'observation distanciée, Rouch préfère le dialogue. Les images étant muettes ( la caméra Bell&Howard 16millimètres n'était pas capable d'enregistrer le son) et discontinues (on l'a vu plus haut), le rôle de commentateur de l'image est bien sûr crucial. C'est le commentaire qui donne la continuité narrative au récit des images courtes et décousues. Ajouté aux bruitages (ambiance de rue, chant ou plus surprenants comme le son de galop de cheval pour l'accident de voiture à la 7e min), le commentaire donne un sens à l'image. [...]
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