René Prédal s'engage dans ce livre à s'appuyer sur des propos de praticiens et de théoriciens pour construire une approche critique au confluent des deux écueils de la globalisation et de la réduction. Il pose tout d'abord l'idée que, malgré la position de McLuhan : « Le message c'est le médium », le cinéma ne se résume pas à la photographie, celle-ci permettant au spectateur d'entrer dans l'univers diégétique, et pouvant également introduire de la distance. Mais le support cinématographique étant dégradable, il faut prendre en compte les modifications des conditions de projection.
Le lieu de visionnage peut en effet modifier la réception de l'image : la première différence est celle qui sépare la télévision et le cinéma ; la télévision est un média froid, tandis que le cinéma est un média chaud, dont l'image est souvent saturée d'information. Jean-Pierre Beauviala indique qu'il est important de pouvoir raréfier les données cinématographiques et propose plusieurs méthodes, déjà expérimentées. René Prédal prend pour exemple Jean-Luc Godard, qui n'hésite pas à supprimer des informations ou à les répéter afin que les spectateurs perçoivent tout et saisisse l'ensemble du message présenté. L'image devient aussi porteuse d'émotion dans ce cinéma à travers la poésie des images, passant par l'éclairage ou l'utilisation du grand angle comme dans le cinéma expressionniste.
D'autres cinéastes ont d'ailleurs déjà expérimenté cela, mais Prédal attire notre attention sur le fait qu'il faut se garder de faire de la technique un langage trop artificiel qui réduirait à néant l'illusion. Pour cela, la coopération entre metteur en scène et opérateur doit être maximale, d'où l'apparition de ce couple dans le cinéma moderne (en particulier dans la nouvelle vague avec Coutard et Decae, deux chefs opérateurs), qui remplace celui plus classique de metteur en scène/scénariste (comme Carné/Prévert). Prédal prend pour exemples notamment Patrice Chéreau et Pierre Lhomme pour La Chair de l'orchidée en 1974, et Raoul Ruiz et Sacha Vierny pour Les trois Couronnes du matelot en 1982.
A travers l'exemple du cinéma d'Antonioni, Prédal s'attarde sur la possibilité de faire participer le visuel à la morale de l'œuvre ; sont cités Le Désert rouge (1964), Blow up (1966) et Profession reporter (1975). Dans chacun de ces films, la réalité n'est pas où l'on l'attend mais est dissimulée et révélée simultanément par l'image : il importe pour la découvrir de s'attacher à son décryptage.
Cependant, l'étude des images pose certains problèmes : pour les développer, Prédal s'appuie sur la photo de film, utilisée par de nombreuses revues pour étayer leurs critiques ou analyses, et soulève les écueils principaux liés à une mauvaise utilisation de cet outil. Car, si les techniques de prise ont évolué, il subsiste que le mouvement, la couleur, le montage, et le cadre ne sont pas rendus par cet arrêt sur image particulier. En fait, le cinéma, reproduisant le réel, voit la photo trahir davantage le film que le réel, car la photographie empêche de voir le mode d'enregistrement de ce réel. Même si, selon Roland Barthes, elle rajouterait des éléments permettant une appréhension beaucoup plus précise du filmique, René Prédal conclut ce premier chapitre sur l'idée que la photographie est un instrument, fournissant d'ailleurs les conditions optimales d'étude, différentes de celles d'un spectateur normal, mais elle ne saurait être un objet d'étude en elle-même.
[...] La première préfère la juxtaposition d'une infinité de nuances de gris, la seconde adopte les contre-jours destinés à faire ressortir les acteurs et les objets. On peut citer Roger Hubert et Henri Alekan, appartenant respectivement aux deux courants. L'arrivée de la couleur avalisera le procédé des aplats. L'Italie est restée presque étrangère à ces techniques. La fin de la guerre a marqué pour elle le début du mouvement néoréaliste, qui se destine à l'enregistrement du monde simple, et utilise en conséquence une lumière naturelle et souvent des plans fixes. [...]
[...] L'évolution dans ce domaine oblige à se pencher sur d'autres améliorations et changements. René Prédal dresse donc une petite chronologie de la photo de cinéma en partant de Louis Lumière et Georges Méliès. Souvent caractérisés comme respectivement l'opérateur et l'inventeur de la mise en scène, Prédal montre qu'il n'en est rien de cette distinction en s'appuyant sur les définitions posées implicitement par Georges Sadoul, qui donne la photo comme englobant tout ce qui appartient au reportage, au documentaire et à l'amateurisme, et la mise en scène regroupant la fiction la technologie complexe et le scénario, et en relevant que chez chacun des deux cinéastes il y a de tout. [...]
[...] En fait, le cinéma, reproduisant le réel, voit la photo trahir davantage le film que le réel, car la photographie empêche de voir le mode d'enregistrement de ce réel. Même si, selon Roland Barthes, elle rajouterait des éléments permettant une appréhension beaucoup plus précise du filmique, René Prédal conclut ce premier chapitre sur l'idée que la photographie est un instrument, fournissant d'ailleurs les conditions optimales d'étude, différentes de celles d'un spectateur normal, mais elle ne saurait être un objet d'étude en elle-même. [...]
[...] Mais de nouveaux procédés destinés à en donner l'illusion apparaissent : en 1951 c'est l'apparition de la 3D, qui va concerner environ deux cent films, et en 1953, le cinémascope, seule véritable réponse, fait son entrée. Jusqu'en 1955 cependant il reste très inconfortable pour les opérateurs qui doivent être deux pour manier l'objectif et l'anamorphoseur (permettant de doubler le champ horizontal de l'image). La Panavision lance le 70mm qui résout le problème, sans pour autant réussi à détrôner le 35mm créé par Edison. Mais d'autres procédés constitutifs de l'image sont étudiés. [...]
[...] A partir des années 40, l'accroissement de la qualité d'impression des pellicules fait désormais du flou un choix esthétique parallèle à celui du montage qui influence la réception de l'image par le spectateur, le plaçant plus près des choses que ce qu'il n'est dans la réalité. Ainsi, le réalisme est dans le récit et pas uniquement dans l'image, et il n'empêche pas l'esthétique. Mais la notion de réalisme est à interroger car on peut obtenir des effets réalistes par des moyens irréalistes, comme un effet jour avec une lumière artificielle ; l'important est de bien connaître la nature pour pouvoir la recréer. [...]
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