Cette séquence de filature de Madeleine par Scottie Ferguson forme un ensemble lié par une unité stylistique et thématique remarquable. En effet, elle constitue un élément-clé dans l'économie narrative du film puisqu'elle permet au spectateur, en même temps qu'à Scottie de découvrir les pérégrinations erratiques de la mystérieuse Madeleine dont on a seulement appris par son mari qu'elle est mystérieusement hantée par un mort. Elle permet donc sur le plan thématique d'apporter une information précise déclinée de manière fragmentée : Madeleine s'identifie à une femme morte depuis longtemps qui se nomme Carlotta Valdès. L'unité stylistique est double : il s'agit tout d'abord d'une séquence sans paroles, si ce n'est le très court dialogue entre Scottie et le gardien du musée, entièrement structurée par les étapes du cheminement labyrinthique de Madeleine et par la musique, composée – comme c'est le cas de beaucoup de films d'Hitchcock - par Bernard Hermann. Trois toponymes structurent cette séquence en trois étapes : le magasin de fleurs, le cimetière et le musée. Entre ces trois étapes que nous allons analyser dans l'ordre, tout en essayant de montrer qu'elles ont une composition analogue, s'intercalent des scènes de filature en voiture dans les rues pentues de San Francisco.
[...] Le regard de Scottie semble souvent inexpressif, presque laconique. Pourtant, comme l'écrit Jean-Pierre Esquenazi dans Hitchcock et l'aventure de Vertigo : Le visage de Scottie devient le principe actif du film : chaque acte de Madeleine se reflète sur son visage, et c'est son expression qui guide notre compréhension du film Le raccord subjectif permet de voir la voiture de Madeleine poursuivie de dos avec un surcadrage sur le pare-brise de celle de Scottie ce qui met le spectateur au niveau exact de son regard. [...]
[...] La scène du magasin de fleurs commence lorsque la voiture de Madeleine s'arrête dans une rue étroite et sale de San Francisco. Hitchcock choisit de ne pas faire entrer Madeleine par l'entrée habituelle du magasin, mais par l'arrière. Deux sacs informes font face à la porte comme pour indiquer qu'il s'agit d'une rue où l'on met ce que l'on ne veut pas voir. Une autre face de San Francisco semble nous être montrée, comme pour signifier que Madeleine pénètre dans un autre monde ou plutôt, un monde en retrait, comme en négatif. [...]
[...] Analyse de la séquence de filature dans Vertigo de Hitchcock Cette séquence de filature de Madeleine par Scottie Ferguson forme un ensemble lié par une unité stylistique et thématique remarquable. En effet, elle constitue un élément-clé dans l'économie narrative du film puisqu'elle permet au spectateur, en même temps qu'à Scottie de découvrir les pérégrinations erratiques de la mystérieuse Madeleine dont on a seulement appris par son mari qu'elle est mystérieusement hantée par un mort. Elle permet donc sur le plan thématique d'apporter une information précise déclinée de manière fragmentée : Madeleine s'identifie à une femme morte depuis longtemps qui se nomme Carlotta Valdès. [...]
[...] Le changement de motif musical y contribue puisqu'il se fait plus tendu. Scottie semble traquer des bandits dans leur cachette souterraine. Puis il découvre en même temps que nous le magasin de fleurs. La scène très colorée qui suit produit un effet de contraste avec les jeux d'ombres et de lumière dans le couloir lugubre. Quelques éléments sont remarquables dans les quelques plans du magasin de fleurs où la scène continue d'être sans paroles. La musique est plus lente et moins dissonante qu'auparavant. [...]
[...] Un effet d'étrangeté se produit, comme si Madeleine se trouvait dans un autre monde que Scottie, ce qui est produit par plusieurs procédés. Tout d'abord, une incohérence : on entend les bruits de chaussures de la vendeuse de fleurs, mais pas le dialogue qu'elle entretient avec Madeleine, ce qui leur donne un aspect fantomatique. Cet écartèlement entre deux mondes est renforcé par des figures de dédoublement au cœur même de cette scène. On a l'impression qu'il y a un miroir au fond du magasin car il y a deux pots de fleurs en forme de colonnes l'un derrière l'autre. [...]
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