Il a fallu attendre la seconde moitié du 20ème siècle pour qu'on s'intéresse enfin réellement au développement de l'enfant. La présence de l'enfance à l'écran suivra naturellement cette tendance. Mais on peut aussi penser que cette nouvelle tendance a joué un rôle non négligeable dans l'intérêt suscité ensuite autour de l'enfance.
En général, ceux qui écrivent des histoires sur l'enfance savent bien à quoi ils vont donner de l'écho. On peut écrire une histoire sur l'enfance pour renvoyer la balle vers sa propre enfance, ou celle des autres. On peut écrire pour s'interroger sur la distance qui existe entre le monde des enfants et celui des adultes et regarder la place que la société est disposée à lui accorder. On écrit par nostalgie ou pour essayer de comprendre, saisir quelques miettes de notre passé, ou pour s'en défaire aussi, tenter de clore un chapitre, jusqu'à fermer définitivement les yeux sur une époque qu'on a jugée désastreuse pour soi.
Tout en suivant l'œil de la caméra au fil des séquences, nous tenteront de comprendre la volonté des cinéastes à filmer ce thème difficile : l'enfance. Nous nous intéresserons tout particulièrement à sa représentation dans ce lieu à visages multiples, adopté par beaucoup de réalisateurs, l'école. Cet endroit qui reste pour quelques-uns une anecdote mais pour d'autres un passage difficile. Tout d'abord, nous remarquerons que l'enfant est souvent soumis à la cruauté et aux injustices de l'école, mais nous observerons aussi qu'il se crée des relations fortes entre l'élève et l'instituteur, qui peuvent s'avérer douloureuses ou au contraire révéler une singularité au sein de la société. Puis nous finirons par l'étude de l'impact que l'école peut avoir sur l'enfance : éveiller la personnalité des élèves au lieu de les enfermer dans une rigueur et leur parler avec le cœur au lieu de les assommer avec du par cœur.
[...] Après les six premières minutes du film, la caméra nous plonge dans l'univers de la classe. Les plus belles scènes du film sont en effet celles qui filment l'effort plus que la réussite. Le premier plan nous présente trois enfants, assis autour d'une table, ils sont filmés de profil, tenant un feutre à la main. On sait que l'instituteur est présent par le son de sa voix mais il est hors champ. La caméra fait un gros plan sur sa main guidant celle d'un enfant, l'exercice est là, devant nos yeux : reproduire, grâce au modèle, le mot maman sur une feuille blanche. [...]
[...] On esquisse également un sourire lorsqu'il montre ses mains sales et qu'il répond naturellement à la question du maître : "le pouce, l'index, le majeur, l'annulaire et l'auri . zontal." Après une ellipse, la caméra de profil nous présente un nouvel élève, à côté duquel est assis le maître. Celui-ci tente de lire une histoire mais s'arrête car trop intéressé par ce que font les autres dans la classe. Lorsque le maître le reprend, on note le regard caméra de l'enfant souriant, avant qu'il ne reprenne sa lecture. [...]
[...] Cette perspective permet au réalisateur comme au spectateur, d'y projeter ses propres souvenirs d'enfance, rendant ainsi le film très émotionnel. Une autre dimension majeure des films sur l'enfance et l'école est la critique ou l'éloge d'un type de pédagogie. Pour une étude plus spécifiquement axée sous cet angle de vue, le film réalisé en 1949 par Jean- Paul Le Chanois L'École buissonnière serait un excellent complément à ce corpus. Ce film relate les débuts du célèbre pédagogue Célestin Freinet, interprété par Bernard Blier. [...]
[...] Victor revient dans le champ avec le livre et la clef, un sourire confiant aux lèvres. Itard joue la colère, jette rageusement les deux objets par terre, empoigne l'enfant assez violemment par les épaules, le secoue. On observe par un corps à corps assez violent les deux personnages qui se dirigent vers le placard, symbole de punition, jusqu'au moment où Victor mord le professeur Itar. Alors l'exercice est terminé : le ton de la voix change, la musique de Vivaldi reprend doucement, les deux êtres s'étreignent, en plan taille, dans l'encadrement de la porte. [...]
[...] Dans la deuxième séquence, l'entrée de Mouchette dans la classe est annoncée, en son off, par le résonnement de ses sabots sur le sol. Assise au premier plan de la caméra, le port de la blouse noire la différencie et l'isole de ses camarades qui sont vêtues de blanc. Le mouvement de caméra champ contre champ tel un combat de boxe, traduit une volonté de rupture et de conflit entre l'enfant et l'adulte. Le regard que la maîtresse porte à Mouchette semble emprunt de violence et de haine par un jugement physique. [...]
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