N'oublie pas que tu vas mourir, Xavier Beauvois, peinture, motif pictural, romantique, héros, Bosnie-Herzégovine, memento mori, film, tableau, la mort de Sardanapale, Eugène Delacroix, fresque romaine, détails de la crucifixion, Charles Baudelaire
"Memento mori", "souviens-toi que tu es mortel" en latin, est le point de départ de Xavier Beauvois quand il réalise en 1995 son second film "N'oublie pas que tu vas mourir". Le cinéaste regroupe ici deux drames majeurs de la fin du XXe siècle, la guerre de Bosnie-Herzégovine et le SIDA. Baigné dans l'esthétique réaliste de l'image de Caroline Champetier, Benoît, le personnage principal interprété par le cinéaste lui-même, va devenir un vrai héros romantique.
[...] Cette image apportait un contraste avec le titre plutôt plombant et collait avec le message du film, l'un des premiers à parler du sida : « s'il y a mort inéluctable, elle peut arriver plus tôt que prévue à cause d'une relation amoureuse. »[1] Ce à quoi Xavier Beauvois ajoute : « N'oublie pas que tu vas mourir, n'oublie pas que tu vis : c'est deux fois la même recommandation fraternelle. ( . ) Et dans cet esprit, il est bien intelligent que, pour l'affiche du film, ce titre soit comme graffité sur la reproduction d'une fresque érotique d'une maison romaine de Pompéi. ( . [...]
[...] Xavier Beauvois voit aussi dans ce thème romantique une résonnance avec son époque : « La fin de siècle se prête à une attitude romantique, parce que la majorité des jeunes se sentent impuissants devant l'avenir. De ce sentiment naît alors un comportement désespéré, une jouissance absolue. Lorsque Benoît saisit que, pour lui, l'amour se révèle impossible, il choisit, via un acte fou et aberrant, de ne pas se suicider par lui-même. »[6] Au-delà du thème, le romantisme va se traduire à l'écran notamment par le paysage. [...]
[...] Mais le cœur du film reste l'exposé que fait Benoît du tableau devant ses camarades, qui intervient après l'annonce de sa séropositivité. On remarque un changement dans la mise en scène. Benoît est coupé de ses camarades, de son milieu, par le champ contre champ. Il a complètement basculé dans le tableau notamment par le très lent travelling arrière qui l'inscrit dedans. Cette inscription annonce le programme de Benoît et met en équivalence son parcours, sa situation, avec celui de Sardanapale. [...]
[...] Dès les premières minutes, Benoît se rend chez un psychiatre, filmé devant un tableau de peinture abstraite. Les personnages seront filmés de façon récurrente devant des tableaux, comme pour traduire leur intériorité, exprimer en image ce qu'ils éprouvent au fond d'eux-mêmes. Ainsi, le psychiatre apparaît devant un tableau aux formes géométriques abstraites, se référant sans doute à sa capacité de discernement des concepts abstraits de psychanalyse. De même, les murs de l'appartement d'Omar, qui apparaîtra pour Benoît comme un guide dans l'exploration excessive de la vie, sont recouverts de nombreux tableaux qui traduisent la dispersion de Benoît dans des expériences telles que la drogue ou le sexe. [...]
[...] De même, lorsque Benoît et Claudia, sa petite amie, visitent une exposition de peinture, ils sont filmés devant des tableaux représentant des crânes. Le discours de la guide est sans ambiguïté par rapport à la situation de Benoît : « un crâne pour rappeler que tout est illusoire, pour dire qu'à tout moment, la mort peut arriver, briser tout, emporter tout sur son passage, la beauté, la vanité ».[3] Ça rejoint le « memento mori », leitmotiv du film. Un autre tableau est utilisé à deux reprises dans le film, avant et après l'annonce de la séropositivité de Benoît. [...]
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