Jean-Luc Godard, Histoire(s) du cinéma, voix télévisuelle, Toutes les histoires, Une histoire seule, cinéma français, Seul le cinéma, Fatal beauté, 1998
Dans le grand paysage du cinéma français, il y a des voix qui comptent. Ce grand paysage c'est l'histoire du cinéma français, et pour qu'une voix y résonne, elle n'a pas besoin de jaillir d'un corps vivant, elle n'a même pas besoin de faire du bruit. La voix de Méliès ne compte-t-elle pas autant que celle de Renoir ? Jean-Luc Godard fait vibrer ces voix dans ses Histoire(s) du cinéma, et semble hésiter entre l'hommage et la résurrection, à un moment où sa propre voix ne se fait plus entendre.
Godard, réalisateur emblématique de la nouvelle vague, trouve en 1988 les fonds suffisants pour réaliser son histoire du cinéma. Projet entrepris dès introduction à l'histoire du cinéma, recueil de conférences données à Montréal durant lesquelles il exposait en partie sa pensée en même temps qu'il expérimentait déjà par la projection de courts extraits aux étudiants ce qui allait devenir l'essence des Histoire(s). Cette « introduction » date de 1980, il lui aura donc fallu attendre huit années pour enfin voir son projet se réaliser. Problème, Godard vend son âme au Diable et produit son film pour la télévision, qui plus est pour Canal Plus. Certes, Godard avait déjà tourné pour la télévision publique, mais passer du côté obscur semble être un geste désespéré.
[...] Flux permanent d'idées qui se succèdent les unes aux autres, décousues, et qui pourtant semblent former une unité avec les images. Pensée ou idée de la pensée ? Les films qu'il choisit comme fragments de l'histoire du cinéma sont toujours mis en relation avec l'un de ses films, et ainsi s'articulent les cours. Déjà l'histoire du cinéma se confond avec l'histoire de son cinéma. Un jeu d'influences évident, et genèse d'une pensée. Godard n'a jamais essayé autre chose que de mettre en scène les maîtres (Fritz Lang dans Le mépris) dans son propre cinéma. [...]
[...] Morceaux choisis des Histoire(s) du cinéma - Jean-Luc Godard Université Paris 8 Vincennes - Saint-Denis - Année universitaire 2013- 2014 Dans le grand paysage du cinéma français, il y a des voix qui comptent. Ce grand paysage c'est l'histoire du cinéma français, et pour qu'une voix y résonne, elle n'a pas besoin de jaillir d'un corps vivant, elle n'a même pas besoin de faire du bruit. La voix de Méliès ne compte-t-elle pas autant que celle de Renoir ? Jean-Luc Godard fait vibrer ces voix dans ses Histoire(s) du cinéma, et semble hésiter entre l'hommage et la résurrection, à un moment où sa propre voix ne se fait plus entendre. [...]
[...] Toutes les Histoire(s) reposent sur ce concept qui appartient tout entier à Godard. Ce travail n'est pas un travail de cinémathèque et d'historien au sens classique. Malgré toute l'admiration que porte Godard à Langlois, le réalisateur se rend rapidement à l'évidence. Il ne peut pas raconter ses Histoire(s) en salle, à partir des bobines. Le procédé est trop contraignant d'une part, mais surtout empêche d'atteindre à la forme totale désirée. Forme qui combine tous les arts. Nous avons déjà dit que les entrées philosophiques étaient de trop. [...]
[...] C'est que le cinéma est pour Godard un objet idéal, plus qu'une forme d'art. Il est à la fois l'art qui contient tous les autres arts, comme le pensait Eisenstein, mais parce que réductible à la technologie et à la diffusion, il n'en est pas vraiment un. Du moins l'a été pendant quarante ans, tant qu'on pouvait rêver Ce n'est pas Auschwitz comme événement historique qui a tué le cinéma, mais les images des camps, des morts, et la banalisation de la diffusion de ces images qui attente à l'idéal godardien du cinéma. [...]
[...] Le cinéma omniprésent dans les Histoire(s) est un fantôme qui parle. Et quand Godard se met en scène ou que sa propre voix récite des phrases de sa grande bibliothèque mémorielle, on se demande si lui aussi n'est pas un fantôme, un mort-vivant. En dépit de brèves références à Ecce Homo, le geste que Godard accomplit n'est pas nietzschéen. Parce qu'il est surtout pessimiste, que Godard ne veut pas croire à un renouveau, que la flamme s'est définitivement éteinte à Auschwitz Godard n'est pas le philosophe-artiste idéal de Nietzsche. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture