Présentation de la filmographie de Tati: "Les vacances de Mr Hulot", Mon oncle", "Playtime".
Tati avait coutume de dire aux apprentis cinéastes : "Le cinéma, c'est un stylo, du papier et des heures à observer le monde et les gens". Pour écrire ses films, du premier au dernier gag et en prévoir tous les rouages ; pour imaginer, sur la bande-son, le moindre bruit, sa modulation, son intensité, son rythme ; pour faire exister, avec un visage, des vêtements, une silhouette et des signes particuliers, le plus humble des personnages, à peine entrevu sur l'écran, Tati avait besoin de temps et le prenait. Quatre ans entre Jour de fête et Les Vacances..., cinq entre Les Vacances... et Mon oncle, dix entre Mon oncle et Playtime.
Il avait aussi besoin d'argent : il engloutit des millions dans l'édification du gigantesque décor futuriste de Playtime. Le tournage s'y prolongea des mois ; le légendaire perfectionnisme du cinéaste ne fut pas responsable de tous les retards, car il fallut souvent attendre l'arrivée d'argent frais ! Et lorsque apparurent enfin sur l'écran géant de l'Empire ces images bourrées de gags dans leurs moindres recoins, certains crièrent à la démesure, à la mégalomanie... Vaincu par l'incompréhension d'une critique pressée et par les mises en demeure de ses créanciers, Tati dut tailler dans le vif, couper des séquences entières. Rien n'y fit, car le public n'était plus au rendez-vous. Déjà gorgé de télévision et bombardé d'images choc montées au pas de charge, il avait perdu cette patience qui lui avait permis, dix ans auparavant, de s'introduire en douceur dans le monde nonchalant de M. Hulot.
[...] Inventeur de gags d'une précision fascinante, metteur en scène scrupuleux et meilleur poète que producteur, il a passé les quinze dernières années de sa vie à payer les dettes qu'il avait contractées pour monter le projet pharaonique, mais pas déraisonnable, de Playtime au début des années soixante. "C'est alors que j'ai eu l'idée de présenter M. Hulot, personnage d'une indépendance complète, d'un désintéressement absolu et dont l'étourderie, qui est son principal défaut, en fait, à notre époque fonctionnelle, un inadapté". Avec son "visage à la Prévert sur le corps de De Gaulle" (Michèle Manceaux), M. [...]
[...] Jacques Tati Plan : 1. Biographie succincte 2. Les Vacances de monsieur Hulot 3. Mon Oncle 4. Playtime 5. Synthèse & conclusion 6. Bibliographie Biographie succincte : 1907 (Le Pecq) - 1982 (Paris). De son véritable nom Tatischeff. A préparé l'Ecole des Arts et Métiers. A l'instar de Chaplin inventant Charlot, Tati, ancien acteur de music-hall, invente Monsieur Hulot. Sa mise en scène épurée et quasi abstraite, ses gags subtils et purement cinématographiques (il expérimente beaucoup) traduisent à merveille les dérèglements, les rites, le ridicule d'un monde en mutation ("Mon Oncle" ; "Playtime" ; "Trafic" ; "Parade", 1974) dont Tati nous décrit la volonté de maîtrise obsessionnelle. [...]
[...] On est loin du village de Jour de fête et de la carte postale de bord de mer. Ici l'on voit la résidence de Mon oncle se dresser à la verticale et se multiplier à l'infini jusqu'à emprisonner les gens dans des cubes et les isoler de tous. Alors quand il les réunit c'est dans un restaurant, à peine achevé. Les couleurs sont un peu plus chaleureuses. Et par sa maladresse légendaire, Hulot cassera tout jusqu'à y foutre un joyeux foutoir. [...]
[...] L'émotion naît de ces relations avec les autres personnes, rejetés par les uns, admirés par d'autre, appréciés par certains, mais finalement oublié quasiment par tous au moment des adieux. La première fin bouleversante d'un film de Tati, et ce n'est pas peu dire. Dans les 3 films suivants, Tati réussira de nouveau le coup de maître de créer des fins de film absolument phénoménales, mais celle des Vacances est un modèle d'efficacité dramatique. Où l'on hésite entre joie et tristesse, où l'amertume n'est jamais très loin du rire. Une pure merveille. Mon Oncle : (1958) Scénario : Jacques Tati. Photographie : Jean Bourgoin. Décor : Henri Schmitt. [...]
[...] Cette pièce centrale est aussi le tournant de la carrière de Tati. Ses délires visuels et ses ambitions technologiques sont décuplés, elles atteindront leur apothéose avec le film suivant, le plus ambitieux projet de l'histoire du cinéma français, Play Time. Encore une fois l'oeuvre s'avère d'une richesse incroyable, d'une drôlerie irrésistible, d'une beauté visuelle et sonore phénoménale et surtout d'une portée émotionnelle magique. Jacques Tati oppose deux mondes, celui de la tradition où il fait bon vivre, continuation de la place du village de Jour de fête, et l'autre, celui du progrès où le corps humain, dans ses fonctions ordinaires (s'asseoir dans un fauteuil, ouvrir un placard, se servir d'une cuisinière), ne trouve plus ses marques. [...]
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