Tous les quatre ans, l'approche de l'élection présidentielle américaine nous rappelle, de façon médiatique, l'importance de la figure du leader aux États-Unis. De Washington à George W. Bush, les Américains ont toujours choisi un homme fort, y compris en se trompant : Coolidge ou Hoover, par exemple, ont sans doute été des erreurs d'interprétation de la part des électeurs. Le cinéma a relayé cette obsession de l'image du grand homme durant l'ensemble du 20e siècle, et au-delà, comme le prouve la profusion de films consacrés au président américain en cette année d'élection. Les présidents qui ont bénéficié ou subi un portrait filmé sont assez peu nombreux, dans la mesure où un choix naturel s'opère de la part du peuple américain. De même qu'il a fallu choisir les sculptures des présidents représentés sur le Mont Rushmore, tous les élus n'ont pas le même traitement cinématographique.
[...] Est alors mise en avant la dimension profondément humaine du président des États-Unis. Au-delà de ces films, centrés sur le personnage même du président, on peut citer des oeuvres de genres différents, qui ont pour point commun le fait de faire intervenir un président fictif plausible, mais polémique ; deux exemples renvoient aux années 60, à la guerre froide, et à l'exploration de la qualité mythique du président : dans Dr Strangelove (1964), de Stanley Kubrick, une vaste part de film se situe dans la salle de guerre du Pentagone, un endroit plutôt secret : on sait qu'il existe, mais on n'y a pas accès : cela autorise les fantasmes, voire les fantaisies : dans ce film volontiers railleur, Peter Sellers incarne un président à la Capra, modéré et doux, en décalage permanent face à la folie furieuse des militaires, et politiciens qui l'entourent ; deux années auparavant, dans Advise & consent, son observation au microscope de la vie politique américaine, Otto Preminger a présenté, incarné par Franchot Tone, un président vieillissant, mourant, qui au moment de choisir un nouveau secrétaire d'État, doit faire face à la fronde d'une partie des sénateurs de son parti. [...]
[...] Pour leur part, les biographies de Président sont pour leur part généralement motivées par une œuvre politique durable, qui ne peut être aussi facilement mise en doute. Le film Wilson, mis en chantier à la Fox durant la guerre, qui entendait consacrer la mémoire d'un grand président, est d'une insipidité rare À l'inverse, le seul exemple de film politique qui ne s'attache qu'à critiquer ouvertement un président, qui plus est en exercice, est W d'Oliver Stone, mais le but est de condamner à chaud. [...]
[...] L'acteur, lui-même malade, y est magistral, et le film de Preminger est une œuvre essentielle pour comprendre les fonctionnements tortueux, mais fascinants de la politique américaine. Enfin, dans ce petit panorama des films qui présentent la figure de présidents fictifs, il convient de montrer aussi que la farce a eu droit de cité dans ce domaine. La figure modérée du président Muffley dans Dr Strangelove a déjà été citée, mais le président interprété par Jack Nicholson dans Mars Attacks (Tim Burton, 1996) est fascinant d'excès en tout genre : face à la menace d'invasion martienne, son manque total d'intelligence, et les réactions systématiquement inappropriées qu'il a à opposer aux menaces martiennes précipitent bien vite le pays dans le chaos. [...]
[...] On peut rapprocher de cette méchante comédie de science- fiction nihiliste la plus subtile charge troublante de Joe Dante The second civil war, réalisée en 1997 pour la chaine HBO, dans laquelle un état fait sécession pour des raisons absurdes, mais là le président n'est qu'un des rouages de la machine. À ces trois types d'interventions de présidents fictifs, vient s'ajouter un film unique en son genre, rare et hallucinant : Gabriel over the White House (1932) de Gregory La Cava : Walter Huston y joue un président élu, en 1932, qui est aussi corrompu, cynique et jouisseur que ses prédécesseurs, n'envisageant pas un seul instant de changer quoi que ce soit au monde, et laissant la crise se dérouler avec une totale indifférence pour le sort des petites gens. [...]
[...] Certains sont très bien servis : Lincoln, qui de Griffith à Ford, en passant par Anthony Mann est sans doute le principal bénéficiaire, y compris lorsqu'il s'agit de l'en rappeler le souvenir : Capra, qui n'a jamais fait un film en costumes contrairement à John Ford par exemple, a quand même donné un rôle au monument de Washington dédié à la gloire de l'ancien président dans Mr Smith goes to Washington en 1939. Ce même monument, détourné, revient dans le récent Planet of the apes (2000)de Tim Burton. [...]
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