La Guerre d'Espagne a été le premier grand conflit « médiatisé ». Le premier où le cinéma a joué un rôle important. Tous les camps ont utilisé ce médium pour leur propagande, les républicains comme les nationaux. Entre juillet 1936 et avril 1939, 453 films ont été produits en Espagne, des courts et des longs métrages, des films d'actualité, des documentaires et des films de fiction, des films anarchistes et des apologies de l'ordre phalangiste, quasiment tous de propagande.
Il existe véritablement dans l'Espagne républicaine une volonté politique de créer une industrie cinématographique, mais il manque à ce pays pauvre la puissance financière pour créer une industrie capable de rivaliser avec Hollywood et de s'imposer en Amérique latine. Et bien que la production de films ait été quantitativement importante, les problèmes économiques et matériels ont engendré une production qualitativement hétérogène. Néanmoins, si certaines productions sont parfois vulgaires, banales et sans personnalité, un véritable élan créateur est véritablement donné. En est pour preuve le superbe Las Hurdes / Tierra sin pan de Buñuel (1932), dans lequel le cinéaste, abandonnant le surréalisme, se met au service du réel et montre l'horrible réalité de la plus misérable région d'Espagne. Le documentaire est la vraie richesse du cinéma espagnol de cette époque. En effet, malgré le départ de nombreux réalisateurs espagnols qui ont quitté leur pays, des étrangers tels que Ivens, Carter, ou Malraux y viennent : le conflit mobilise bon nombre d'artistes et d'intellectuels.
Espoir –ou Sierra de Teruel pour le titre espagnol- a été produit pour mobiliser l'opinion publique internationale, car André Malraux cherchait à réaliser un film de propagande afin d'obtenir le soutien financier et politique des démocraties à la République espagnole. On sait que le film fut terminé trop tard pour pouvoir influer sur le sort de la guerre, mais il reste un film mythique, qui a frappé les esprits. Ce film inachevé, souvent confus, reste un chef-d'œuvre qui colle à la peau de son époque. Il ne ressemble à aucune autre œuvre cinématographique, et il faudra attendre le cinéma néoréaliste italien de l'immédiat après-guerre pour trouver des points communs avec le scénario et la réalisation de Malraux.
[...] L'heure de l'Espagne était passée. C'est à des républicains exilés que Sierra de Teruel fut présenté à Paris, et deux projections privées eurent lieu dans la petite salle du 44 Champs-Élysées, à laquelle une dizaine de personnes assista. Alors que le film devait sortir le 15 septembre 1939, il fut interdit par la censure du gouvernement Daladier, qui, craignant l'intervention de l'Espagne dans la guerre, ne voulait rien faire qui pût blesser les susceptibilités franquistes Il ne fut projeté qu'à la Libération où il reçut un accueil enthousiaste, mais il fut mal distribué, car le sujet semblait malvenu : bien sûr, le film exaltait l'esprit de résistance, mais il rappelait aussi l'avant-guerre, la politique de non-intervention, le climat infect des guerres civiles, leurs trahisons et leurs atrocités. [...]
[...] Mais au moment de la présentation publique en septembre 1940, Espoir est frappé d'interdiction. Ce n'est que cinq ans plus tard, après la guerre, qu'il sort en salle. Ajoutons à ces péripéties qu'Espoir faillit ne jamais voir le jour, car les Allemands, pendant la guerre, étaient fermement décidés à détruire toute copie existante. Par ailleurs, tourner à Barcelone en 1938, c'était tourner dans un pays en guerre. Il fallait constamment improviser au milieu des pénuries, des privations et parfois de bombardements. [...]
[...] Le tournage du film Le tournage commença en juin 1938, avec l'accord du gouvernement républicain. Pour son film, André Malraux s'adjoignit Max Aub, écrivain et auteur dramatique espagnol, qui connaissait admirablement le français, et qui fut pendant toute la réalisation le double espagnol d'André Malraux, son interprète et son agent d'exécution. André Malraux demanda à Denis Marion de l'assister pour le scénario, et à Boris Peskine de faire le découpage. Sur la recommandation de Jacques Prévert, il engagea Louis Page, qui possédait une solide expérience d'opérateur, et qui avait déjà été directeur de la photographie sur d'autres films. [...]
[...] Les personnages En se rendant en Espagne, Malraux prend part à un combat auquel se mêlent de nombreux étrangers, dont lui-même. Dans le camp républicain se côtoient des combattants internationaux mus par un certain idéal, ou un certain esprit d'aventure, et des Espagnols qui luttent pour leur terre, pour leur vie. Parmi les étrangers présents dans l'escadrille aérienne, on trouve, entre autres, un Belge, un Arabe, un Italien et un Allemand. Les origines de ces combattants ont été bien calculées, on peut d'ailleurs remarquer que n'apparaît aucun volontaire anglo-américain. [...]
[...] Là encore, cette particularité de l'action s'imprime dans un mouvement général qui progresse vers la fusion. L'utilisation du mouvement de caméra reprend plastiquement cette loi des contraires convergents et fusionnants, et anime ce qui devrait être inanimé d'un mouvement esthétique, et qui rend la vision du spectacle plus proche d'une universalité scénique des faits et de leur représentation. Il reste à ajouter que ces procédés et modélisations de la structure filmique parviennent à créer une véritable hallucination du livre dans le film, en reprenant les procédés littéraires de la description du drame par ce qui peut être considéré comme leurs équivalences dans la syntaxe cinématographique. [...]
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