Les films d'Almodovar ne sont pas seulement des films de divertissement. Ils sont essentiellement des films de réflexion. En effet, le cinéaste espagnol traite des thèmes fondamentaux tels que l'amour, la solitude et le désir. Comme il le déclare dans ses conversations avec Frédéric Strauss : « Je veux dire la nécessité absolue de se sentir désiré. Dans cette ronde du désir, il est très rare que deux désirs se rencontrent et se correspondent, ce qui est une des grandes tragédies de l'être humain. ». Selon le cinéaste de la Mancha, chaque être humain est désirant, mais plus encore il souhaite susciter le désir de l'autre. Pourtant, le désir est toujours voué à l'échec car il ne se satisfait jamais de l'objet de son désir. L'objet obtenu, le désir désire un autre objet. Le thème du désir est récurrent dans le cinéma d'Almodovar. Il est présent dans les différentes étapes de son œuvre. Il existe, en effet, deux périodes dans le travail d'Almodovar : tout d'abord, jusqu'à la fin des années 1980 (période de la movida), son oeuvre est marquée par la provocation et la vulgarité. Il révèle toute l'euphorie de l'Espagne délivrée du joug franquiste. Puis, depuis le début des années 1990, son cinéma se veut plus académique et plus profond, même si l'on retrouve des éléments provocateurs de ses premiers films. Dans ces deux périodes, Almodovar utilise le désir comme un élément moteur de l'action. Tous les personnages de ses films sont dans le désir : désir de l'autre, désir d'amour, désir d'une vie perdue, désir d'objets. Ils sont prêts à aller au bout de leur désir, même si cela est synonyme de folie et de mort.
Il est donc nécessaire d'étudier le thème du désir dans l'œuvre d'Almodovar. Pourquoi le désir reste-t-il toujours obscur ? Quels sont les moyens utilisés par les personnages pour pallier à la non réalisation de leur désir ?
A travers l'étude de 5 films (Femmes au bord d'une crise de nerfs, Talons Aiguilles, Kika, Tout sur ma mère et Parle avec elle), nous analyserons tout d'abord le désir d'amour, puis le désir d'enfant. Enfin, nous montrerons en quoi le désir de création artistique est essentiel puisqu'il permet aux personnages de combler leurs angoisses.
[...] Le thème du voyeurisme, très présent dans Kika, souligne l'influence de Buñuel sur l'œuvre d'Almodovar. Ainsi, Almodovar a tenté d'analyser le thème du désir sous des formes variées: désir d'amour, d'enfant, de création artistique mais aussi désir pervers. Selon lui, tout désir est nécessairement frustré car autant il est facile de satisfaire l'objet de son désir, autant il est difficile de rencontrer une réciprocité de désir. Le désir est d'autant plus puissant que les hommes et les femmes sont dans l'incapacité de communiquer de manière directe et sincère d'où l'injonction inscrite dans le titre d'un de ses films : Parle avec elle. [...]
[...] Désir de la création artistique Presque tous les personnages chez Almodovar sont potentiellement des créateurs d'Art. Dans Kika, Ramon est photographe voyeur. Son beau-père Nicholas est écrivain. Quand à Kika, elle est maquilleuse ce qui peut être considéré comme une activité artistique. Dans Talons Aiguilles, Becky est chanteuse. Dans Tout sur ma mère, Esteban, le fils de Manuela tient son journal intime et rêve de devenir écrivain. Manuela est une ancienne actrice de théâtre. Huma et Nina sont deux actrices interprétant Un Tramway nommé désir. La mère de sœur Rosa peint des faux Chagall. [...]
[...] Désir de d'aimer Tous les films d'Almodovar racontent des histoires de désir d'amour. Ainsi, dans Femmes au bord d'une crise de nerfs, Pepa est amoureuse d'un homme marié Ivan qu'elle poursuit jusqu'à l'aéroport. Dans Parle avec elle, Begnito désire Alicia au point de lui consacrer toutes ses journées depuis 4 ans. Pourtant, ce désir d'amour est toujours frustré car tout au plus les personnages rencontrent l'objet de leur désir mais pas le désir de l'Autre en tant que tel. Par exemple, dans Parle avec elle, Begnito rencontre le corps inerte mais intact d'Alicia sans pour autant s'enquérir de son désir. [...]
[...] Il souhaite lui donner une autre image de l'homme intégrant les angoisses, les fêlures, les désirs et les fantasmes. Sa grande culture cinématographique et littéraire est réintroduite dans ses films pour conduire le désir fasciné du spectateur (extrait du Rôdeur de Jospeh Losey dans Kika, de l'Amant qui rétrécit dans Parle avec elle, d'un Tramway nommé Désir dans Tout sur ma mère). De façon existentielle, Almodovar semble dire qu'à défaut de tisser des liens, il reste à l'homme les avatars du désir. [...]
[...] Elle devient une mère aimante et oblative puisqu'elle accepte de se compromettre en laissant ses empreintes sur le pistolet utilisé par sa fille pour tuer son mari. Il y donc enfin réciprocité de désir entre la mère et la fille, mais durant un lapse de temps relativement court. Il existe aussi des mères phalliques et autoritaires. C'est le cas de la mère du Jugue Dominguez dans le même film Talons Aiguilles. Paradoxalement, le désir d'enfant semble plus provenir des hommes que des femmes dans le cinéma d'Almodovar. [...]
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