Le film muet Américain le plus controversé est, et restera sans doute longtemps The Birth of a nation de David Wark Griffith : sorti en 1915, le premier très long métrage de l'histoire du cinéma américain a non seulement réussi la gageure de créer une forme narrative excitante et qui reste captivante pour son public sur plus de trois heures, mais il a surtout été à la base d'une renaissance du Ku-Klux-Klan, et profondément heurté la communauté afro-américaine à l'époque de sa sortie, par la représentation insultante des Noirs américains, par une glorification de la société secrète de terroristes sudistes, et par des intertitres aussi indélicats que : « Les graines de la division furent plantées lors de l'arrivée des Africains en Amérique ». Griffith, sudiste par tradition familiale (sa famille était originaire du Kentucky, un état neutre lors de la guerre civile dont la plupart des habitants étaient plutôt favorables à la cause sudiste), a toujours revendiqué le rôle que son père Jacob aurait joué aux côtés du General Lee, et a toujours proclamé avoir réalisé un film qui restituait la vérité des faits. De son coté, le révérend Thomas Dixon, l'auteur des ouvrages dont s'inspire le film, était un fervent admirateur du Klan de 1866. Pour en tester le racisme, il suffit de toute façon de voir le film, dont la représentation des Noirs, de leur bêtise, du danger qu'ils sont censés représenter pour la population blanche et la pureté de son sang, est constamment odieuse, et inacceptable. Pourtant, ce n'était pas la première tentative de Griffith d'aborder le sujet de la guerre de Sécession, qui était une guerre relativement proche en 1915.
[...] Ce thème sera ensuite affiné dans un film situé dans un état non précisé, mais qui pourrait bien être le Kentucky : In the Border States est l'histoire d'un échange, d'une petite fille nordiste qui aide un soldat sudiste à se cacher, mais qui réclame de celui-ci la vie sauve pour son propre père, un sergent nordiste lorsque la vie de celui-ci est en danger La famille, cadre privilégié de Griffith, devient ici une métaphore de la nation toute entière, sauvée du conflit par la grâce d'une toute jeune fille À ce lyrisme symbolique un peu lourd, vient s'ajouter un troisième court métrage sur ce même thème, sorti en fin 1910, The Fugitive : il y est question cette fois d'un soldat du Nord qui s'est réfugié chez la mère d'un soldat rebelle qu'il vient de tuer. Celle-ci, après avoir hésité, ne livre pas le Nordiste, préférant éviter à une autre mère ce qu'elle a vécu. Le thème était important pour Griffith, qui assimile la guerre fratricide à un déchirement familial, une lutte entre frères Cette tendance sera à la base de Naissance d'une Nation, avec la figure tutélaire de Lincoln pour réconcilier la Nation, mais aussi, tristement, le KU-Klux-Klan pour sauver la face du Sud. Avec ses courts métrages, heureusement, on en est loin. [...]
[...] De son côté, le révérend Thomas Dixon, l'auteur des ouvrages dont s'inspire le film, était un fervent admirateur du Klan de 1866. Pour en tester le racisme, il suffit de toute façon de voir le film, dont la représentation des Noirs, de leur bêtise, du danger qu'ils sont censés représenter pour la population blanche et la pureté de son sang, est constamment odieuse, et inacceptable. Pourtant, ce n'était pas la première tentative de Griffith d'aborder le sujet de la guerre de Sécession, qui était une guerre relativement proche en 1915 : elle s'était déroulée entre 1861 et 1865, et de nombreuses familles avaient des parents, grands-parents qui l'avaient vécu, certains d'entre eux étaient d'ailleurs encore en vie. [...]
[...] Le Kentucky n'avait pas choisi, bien qu'étant un état esclavagiste, la cause du Sud; on peut sans doute parler de prudence, d'autant que cet état situé au nord du sud risquait de servir de tampon entre les deux camps, et redoutait d'être le siège de trop nombreuses batailles. Les citoyens ont été laissés à leur choix, de partir pour le Nord, pour le Sud, ou de ne rien faire : un endroit idéal pour y situer un film dont les héros étaient pris entre deux feux. In old Kentucky(1910) raconte donc le déchirement d'une famille dont un fils s'engage pour le Sud, et un autre pour le Nord. La réconciliation finale était celle de toute une nation. [...]
[...] Sa sœur prend sa place et meurt au combat. La famille décide donc de cacher le fils dans la maison aux volets clos du titre, afin de se protéger du déshonneur. Ici, le metteur en scène adopte le point de vue du Sud, mais met en avant le sens sudiste de l'honneur extrême et exacerbé ; à cette histoire baroque, mais traitée frontalement et avec conviction, vient faire écho le film The battle de 1911 : il nous conte cette fois le parcours d'un soldat de l'Union dont le premier réflexe est de fuir devant l'intensité des combats ; moqué par sa fiancée exaltée, il reprend courage et accomplit une action héroïque : le film inverse les habitudes : en romantique sudiste, Griffith aurait pu prendre fait et cause pour le Sud, mais probablement est-il amené à honorer les deux camps afin de ménager l'ensemble de son public Toutefois, une comparaison entre les deux montre que la veine noire de Griffith est sans doute plus inspirée par le Sud que par le Nord. [...]
[...] C'est encore plus fort dans The house with closed shutters dont l'héroïne va faire le sacrifice de sa vie afin de racheter la faute de son frère; l'esprit du sud, nous dit en substance Griffith, est incarné par ce sacrifice et cette héroïne, qui mourra d'ailleurs le drapeau en mains Swords & hearts, moins noir, est sorti en 1911. Il s'agit d'un film plus romantique, moins noir, dans lequel une jeune fille pauvre sauve la mise d'un officier sudiste, à son insu. Lorsque la fiancée du jeune homme le lâche lors de la reconstruction pour une bel officier nordiste, c'est vers l'héroïne qu'il se tourne, ayant trouvé la véritable âme sœur. [...]
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