Comédie burlesque, cinéma, parole dans l'art, cinéma muet, Buster Keaton, pouvoir des actes, parole poétique, Marx Brothers, bruits cinématographiques, Une nuit à l'opéra
De tous les genres de cinéma, la comédie est sans doute l'un de ceux qui permettent le mieux de s'interroger sur la fonction de la parole dans l'art. La parole constitue également, de manière inattendue, une dimension importante des comédies dites "muettes". Les comédies furent d'abord muettes, sans être pour autant silencieuses si l'on pense aux nombreux intertitres qui accompagnaient l'action ou bien aux partitions musicales interprétées lors de leur projection.
[...] Les principes du burlesque au temps du muet Il est possible de distinguer au sein du burlesque une première période muette. Cette forme de comédie se fonde primitivement sur un art du gag visuel consommé qui est clairement influencé par le cirque et la pantomime. Keaton dans ses Mémoires (Slapstick. Les mémoires de Buster Keaton) définit le burlesque comme un style de comédie très codifiée malgré son apparente simplicité. Agir ou parler ? Le mécano de la General de 1926 est l'une des œuvres qui caractérisent le mieux le style burlesque chez Keaton avant l'arrivée du cinéma parlant. [...]
[...] Dans Une nuit à l'opéra de Sam Wood, Groucho entend faire signer à Chico le contrat d'engagement d'un ténor dont Chico défend les intérêts. Chico soupçonneux agace Groucho qui lui lance : Votre parole me suffit. La mienne vous suffit-elle ? . Chico répond : Non, je ne pense pas . Finalement, aucun contrat ne sera signé, les deux protagonistes ayant chacun fait preuve d'une forme de démesure dans l'usage des mots et dans la prise en compte du respect de leur interlocuteur bien loin de l'éthique de la discussion théorisée par Apel et Habermas. [...]
[...] Se soustraire à la parole Le personnage d'Harpo est muet sans être pour autant silencieux tant ses apparitions sont accompagnées de bruits nombreux et variés. Aux mots, Harpo préfère le langage musical ou bien ceux du travestissement et de la pantomime. Chico est probablement le seul protagoniste des films des Marx Brothers à proposer une réelle résistance à la puissance de la parole de Groucho. Pour se soustraire à cette dernière, il faut la combattre par la mise en échec de la parole elle-même. [...]
[...] Il ne peut compter sur la parole pour s'approprier le monde. Chez Johnnie c'est son corps qui parle pour lui, un corps qu'il déforme, déstructure, étiré au gré des multiples péripéties auxquelles il doit faire face. Keaton suggère ici que le pouvoir des mots est infiniment inférieur au pouvoir des actes illustrant l'adage voulant que les actes en disent toujours plus long que les paroles . Son héros est un taiseux, un silencieux, mais paradoxalement un homme qui s'exprime beaucoup grâce à son corps-parole comme le nommera André Bazin. [...]
[...] En résumé, le burlesque chez Keaton fait de la parole un enjeu visuel plus que sonore, et du silence une esthétique. Les Marx Brothers ou le burlesque par la parole Du muet au parlant : un changement difficile Le public aimait les grandes stars du burlesque muet. Il espérait beaucoup de leur passage au parlant pour enfin entendre leur voix. Le public s'éloigne des films de Buster Keaton trouvant que sa voix n'est pas en harmonie avec son personnage d'homme ordinaire au flegme imperturbable. [...]
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