Les interventions contestataires du cinéma, ses ambitions politiques déclarées n'étonnent plus personne. A l'égal de la presse, de la radio, de la télévi-sion, le cinéma est de mieux en mieux perçu comme un instrument du dialogue des citoyens avec l'État, comme un moyen d'action des institués sur leurs institutions, comme le lieu d'une mise en cause ouverte de l'ordre établi et des idéologies dominantes. Le temps n'est pas loin, pourtant, où la politique au cinéma ne se concevait guère en dehors des propagandes étatiques. L'évolution actuelle, jusque dans les pays socialistes — l'U.R.S.S. et la Chine faisant pour l'heure exception —, tend à soustraire le cinéma politique au monopole du pouvoir. Et, dans les sociétés capitalistes, il est en passe de devenir l'apanage quasi exclusif des forces socio-politiques qui travaillent à se constituer en contre-pouvoir.
[...] Bibliographie. B. BRECHT, Écrits sur la littérature et l'art, trad. J.-L. Lebrave, J.-P. Lefebvre, A. Gisselbrecht & B. Lortholary vol., Paris J.-P. LEBEL, Cinéma et idéologie, Paris B. LEHMAN, Le Cinéma parallèle dans le monde in Clés pour le spectacle, 17, janv / L. [...]
[...] Sa première caractéristique est l'invention. Les temps de l'unité Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, le cinéma, universellement, n'a qu'une vocation : produire des rêves et des bénéfices. La fonction idéologique qu'il remplit ne s'en apparente pas moins étroitement à celle de l'école : comme l'école, il modèle son public, le rassemble autour des valeurs de la société établie, contribue à la reproduction de cette société. On verra longtemps le succès financier du film, qui sanctionne la convenance réciproque de l'œuvre et du public, faire figure de critère artistique. [...]
[...] Hanoun) se sont donné pour tâche première de subvertir le langage cinématographique traditionnel, de faire tenir leur contestation dans les formes. La portée politique du film, liée non plus au contenu manifeste de l'œuvre (sujet, thèmes, peintures) mais à ses structures, le spectateur étant atteint par les formes et ainsi provoqué à la lucidité et la réflexion, de nouveaux modes de communication sont à inventer. Jean-Luc Godard, Francesco Rosi, les frères Paolo et Vittorio Taviani, Glauber Rocha, Fernando Solanas, Nagisa Oshima, notamment, s'y sont attelés. [...]
[...] Car il ne suffit pas de détruire la culture dominante, encore faut-il pouvoir lui opposer une contre-culture, une culture-alternative destinée à la refouler puis à la remplacer. La contestation chaplinienne illustre fort bien cette exigence. Tous les films de Charlot jusqu'aux Temps modernes (1936) protestent contre la société américaine. Ils le font dans les faits mais non encore dans les idées. Charlot lui-même, plus que le prolétaire, incarne le bourgeois déchu, humilié, persécuté par la bourgeoisie en place. Pour être homme, il doit se faire reconnaître homme par les bourgeois. Il n'a rien en effet à opposer aux valeurs bourgeoises. [...]
[...] Faut-il faire fonds sur une minorité, voire une élite, ou atteindre les masses? La contestation doit-elle s'enfermer dans l'huisclos des avant-gardes? Ne serait-il pas plus judicieux de porter le cinéma politique fût-ce au prix d'une déperdition certaine au cœur même du système, dans le cinéma commercial et les télévisions officielles ou privées? A ces questions les œuvres contestataires du cinéma apportent les réponses les plus diverses et très souvent ennemies. Le cinéma politique n'est pas mieux unifié que la contestation politique au service de laquelle il se veut. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture