« Depuis toujours, je n'ai qu'un seul but : maintenir l'unité et le prestige de notre maison. Pour cela, j'ai toujours adapté nos structures aux circonstances. Durant la Grande Guerre, en temps de paix et pendant la crise. Au vu des circonstances actuelles, il devient plus que nécessaire de protéger les aciéries Essenbeck de toute pression politique éventuelle. Je n'ai jamais flatté le régime actuel et je n'aurais jamais de rapports avec ce « gentleman ». Néanmoins, la bonne marche de nos affaires et l'extension de nos activités nous imposent des contacts quotidiens et le soutien de ces messieurs ». Cet extrait de discours prononcé en début de film par le propriétaire du groupe industriel Essenbeck s'inscrit dans un film dont la trame se joue sur le fond historique de l'avènement d'Hitler et du nazisme dans l'Allemagne des années 30.
Par le sujet traité, par la profondeur des personnages, par le scénario imaginé, Luchino Visconti invite le spectateur à revivre la montée du totalitarisme du point de vue mal connu des industriels. Leur place dans l'histoire allemande et même internationale est loin d'être insignifiante. C'est pourquoi il sera nécessaire de synthétiser toutes les perspectives historiques que le film propose de mettre en avant et comment un débat peut s'ouvrir dans la mesure où en tant qu'œuvre d'art et de fiction, le projet finalisé par le cinéaste n'en demeure pas moins une vision subjective sur le déroulement historique des faits antérieurs. Mais pour tenter de comprendre la position de l'artiste, il s'avère également nécessaire d'entreprendre une brève biographie à la suite de laquelle, nous tenterons d'effectuer un commentaire historique du film.
[...] Ses rédacteurs sont accessoirement tous membres du Parti communiste et appellent à un nouveau cinéma, plus réaliste, naturel inspiré du cinéma français des années 1930. Visconti s'engage ensuite dans plusieurs projets cinématographiques essentiels à sa carrière : la Terre tremble, Bellissima, Senso. Visconti traverse donc une période faste en réalisation. C'est avec méfiance que Visconti apprend les évènements de 1968. Il y entrevoit la possibilité d'un retour au fascisme. Dans cette perspective, il réalise une trilogie sur fond d'histoire allemande ( Les Damnés en 1969, Mort à Venise en 1971 et Ludwig en 1973). [...]
[...] Mais comme nous l'avons précisé par avant ce dernier est relativement en difficulté depuis les répercussions sans précédent de la crise économique mondiale. De ce fait, Hitler joue avec habileté le rôle de la conciliation et de la complicité avec le grand patronat. En réalité, il s'agit d'une instrumentalisation réciproque, sachant que chacun tente de satisfaire ses intérêts et se jouer de la complicité de l'autre. Ainsi, les grands groupes industriels allemands (Thyssen, Krupp) ont longtemps cru pouvoir manipuler Hitler afin de favoriser leurs intérêts économiques. [...]
[...] L'appréciation en a été rendue difficile par le temps s'écoulant et l'impossibilité de se référer en temps voulu aux ouvrages ayant traité de ce film. Nous avons donc réalisé une analyse basée essentiellement sur nos connaissances et nos impressions. Toutefois, nous ne pensons pas avoir fait fausse route en affirmant que Les Damnés est une métaphore percutante de cette Allemagne déchirée entre le recul face au danger menaçant et l'engagement fanatique devenu irréversible. : Expression attribuée à Edouard Herriot en 1926 désignant le monde des affaires. [...]
[...] La première scène se déroule le soir du 27 Février 1933, soirée au cours de laquelle le Reichstag fut incendié. L'ensemble du film décrit les relations de pouvoirs et de passations que les évènements politiques peut engendrer au sein de la direction de l'entreprise familiale. Par son scénario et son script, l'œuvre de Visconti fait montre d'une analyse historique lucide sur la situation des grands industriels allemands de l'époque. Néanmoins, cela n'efface pas l'accent mis avant tout sur l'évolution psychologique des personnages dans leur rôle, car Les Damnés se préfigurent avant tout comme la chronique d'un drame psychologique et familial sur fond de nouvelle ère historique et nationale. [...]
[...] Le patronat allemand et Hitler ou l'instrumentalisation réciproque Une intrigue métaphorique Dès les premiers dialogues, des tonalités germaniques se font entendre et le début du film se présente comme une scène d'exposition d'un drame antique. Décors ficelés, personnages cernés et dialogues aiguisés situent très rapidement le contexte global qui entoure l'histoire qui prend forme. Chaque personnage possède un rôle particulier capable de résumer les diverses formes de réactions que l'avènement du nazisme a pu provoquer chez le grand patronat allemand. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture