Transposer au cinéma une œuvre aussi littéraire que Les Liaisons dangereuses relève de la gageure puisque l'œuvre de Laclos se construit autour de l'échange de lettres et le succès rencontré et non démenti depuis sa parution tient justement, pour les critiques, à la perfection de la forme épistolaire. Ce pari peut sembler non tenu par le film de Stephen Frears, en 1988, et l'on peut établir entre l'œuvre source et le film un écart assez important. Mais sans doute le but recherché n'est-il pas de substituer un film à une œuvre littéraire. Frears et son scénariste, C. Hampton, n'en demeurent pas moins fidèles au roman de Laclos et le film semble tout droit sorti du roman. Mais avec les moyens qui sont propres au cinéma, Stephen Frears réalise l'une des meilleures adaptations qui soient.
[...] Alors qu'elles sont au cœur du roman de Laclos, les lettres sont certes présentes chez Frears, mais elles ne sont pas constitutives du film. Si la première image inscrit le titre à l'intérieur d'une lettre et rappelle ainsi l'œuvre source, la correspondance est relayée au rang de motif. Au lieu de s'écrire, les personnages se rencontrent et conversent de vive voix : ainsi la marquise de Merteuil et le vicomte de Valmont se rencontrent dans plus de sept scènes, ce qui a pu passer pour une hérésie, dans la mesure où leur réunion, leurs retrouvailles est l'objet d'une âpre négociation dans le roman. [...]
[...] Enfin le scénario du film procède à quelques rajouts : Mme de Merteuil se rend au château de Mme de Rosemonde pour secourir Cécile et sa mère, elle y voit sa rivale Danceny, chargé d'un message pour Mme de Tourvel par Valmont, se rend à son chevet et lui murmure les dernières paroles de Valmont, ce qui est loin de respecter la lettre du roman. Toutefois, ces erreurs ne creusent pas de précipice entre le roman et le film. Ne montrer que des personnages en train de s'écrire en se servant de la voix off eût été fastidieux. Et lorsque l'on voit le film de Frears, l'œuvre matrice ne paraît pas trahie. Dans un deuxième temps, les Dangerous Liaisons sont l'équivalent des Liaisons Dangereuses. [...]
[...] L'adaptation filmique de Stephen Frears semble-t-elle respecter l'œuvre littéraire ? Transposer au cinéma une œuvre aussi littéraire que Les Liaisons dangereuses relève de la gageure puisque l'œuvre de Laclos se construit autour de l'échange de lettres et le succès rencontré et non démenti depuis sa parution tient justement, pour les critiques, à la perfection de la forme épistolaire. Ce pari peut sembler non tenu par le film de Stephen Frears, en 1988, et l'on peut établir entre l'œuvre source et le film un écart assez important. [...]
[...] Enfin, Stephen Frears opère des suppressions, modifications et rajouts. Parmi les entorses au récit initial, il faut compter l'absence de personnage comme Prévan, qui n'est pas même mentionné. Il constitue dans le roman un contrepoint non négligeable à la double intrigue principale puisqu'il montre avec quelle habilité la marquise séduit et humilie le plus prestigieux des séducteurs du moment. Belleroche dont il est question du début à la fin du roman n'est qu'une silhouette, au début du film, vite évacuée et oubliée. [...]
[...] Enfin, le film met en évidence le combat latent entre les deux protagonistes. Celui-ci est figuré dans les scènes où ils sont ensemble par un jeu de champ/contre-champ. Ainsi, à la fin de la séquence les deux personnages sont ensemble dans le cadre, le visage de Valmont en gros plan, Mme de Merteuil en arrière plan, juste derrière lui qui lui susurre les mots qui le transportent, mais lorsque Valmont décline l'offre que vient de lui faire la marquise, il se détache et lui fait face, lui tient tête et le jeu de champ/contre-champ redémarre. [...]
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