Mélodrame, théâtres, imaginaire collectif, Pixerécourt, Charles Nodier, Anicet Bourgeois, Julien de Mallian, pièce de théâtre, représentation, genre théâtral, spectaculaire
Le mélodrame occupe une place prépondérante sur les planches des théâtres dès le début XIXe siècle. Il est par essence un genre « à grand spectacle » et permet le fonctionnement de l'imaginaire collectif. C'est un drame populaire qui érige une nouvelle construction scénique. Son registre est particulièrement tourné vers le pathos et détient un caractère éminemment moralisateur. De multiples formes théâtrales du XIXe participent d'ailleurs au spectaculaire et à la sollicitation des sens. Le mélodrame, lui, met en scène des figures manichéennes où le bien triomphe toujours sur le mal, à l'image de la scène finale de La citerne (1809) d'un des grands auteurs du genre, Pixerécourt, où cette dernière s'effondre et provoque ainsi une inondation, laissant triompher la vertu. Les lieux et univers tendent à éveiller les émotions des spectateurs et à les souder autour de valeurs conservatrices communes. Le mélodrame fait alors couler beaucoup d'encre. Les avis divergents et les écrits sont en effet nombreux à ce sujet.
[...] Nodier s'écrie d'ailleurs : « ce n'était pas peu de chose que le mélodrame » (l.26) puisque justement, le peuple a besoin d'entendre que « même ici-bas, la vertu n'est jamais sans récompense, le crime n'est jamais sans châtiment » (l.25-26). C'est donc aussi une forme d'éducation par le divertissement qui s'impose au public, à cette époque. Bien que Nodier termine son « Introduction » en affirmant que le mélodrame, « c'était la moralité de la révolution » (l.27), nombreux sont ceux qui ne sont pas partisans du mélodrame et des nouvelles formes qui en découlent. Nodier lui-même paraît émettre quelques réserves quant au « drame de la nouvelles école » (l.13). L'accueil du mélodrame paraît alors nuancé. [...]
[...] Ainsi, Nodier considère le « drame de la nouvelle école » (l.13) (comme il l'appelle), et la tragédie comme n'étant « guère autre chose que des mélodrames relevés de la pompe artificielle du lyrisme » (l.13). À l'image de l'opinion soulevée dans la « Chronique théâtrale » quant au caractère indigeste de La Nonne sanglante, les nouvelles pièces de mélodrame dites romantiques ne semblent plus refléter son « but primitif » (l.14), comme le suggère Nodier. Elles n'en sont qu'un pâle reflet tentant de reprendre ses bases pour l'emmener ailleurs, sur un chemin que Pixerécourt lui-même pense mauvais à emprunter. [...]
[...] Pourquoi la naissance du mélodrame semble-t-elle aussi indispensable que décriée ? En quoi peut-elle relever du spectaculaire ? Il paraît d'abord évident que le mélodrame voit le jour à l'aube d'un monde où l'avènement de formes nouvelles est nécessaire tant pour le théâtre que pour la société tout entière. Pour autant, il semblerait que ce dernier, qui exprime des nouveautés dans son écriture et dans ses réalisations, n'inspire pas l'adhésion de tous, en particulier à travers ses évolutions au fil de l'histoire. [...]
[...] Le spectaculaire est un moyen vers la provocation d'émotions mais aussi vers la création d'éléments formels nouveaux. C'est bien au-delà de son caractère moralisateur que peut être étudié le mélodrame. Il donne en effet lieu à des évolutions majeures dans le monde du spectacle et dans le milieu théâtral, favorisant l'effervescence de pièces, de tableaux et d'écrits ancrés dans l'époque où il faisait alors autorité. Le mélodrame atteste bien des différends et controverses qui peuvent être liés au changement. Il est le porte-parole d'une société en détresse et d'auteurs à la recherche d'une révolution créatrice. [...]
[...] Le drame de La Nonne sanglante joue avec les peurs du spectateur et insiste sur le fait que « tout chrétien frémira » (v.11) à la vue du fantôme. La place accordée au public est d'ailleurs aussi capitale sur la peinture de Daumier puisqu'il est érigé au premier plan, la mine fascinée voire terrifiée. Le pathétique provoque les sens et les musiques accentuent son effet, à l'instar des compositions d'Alexandre Piccini pour la pièce de La Nonne Sanglante. Les figures présentées sur les planches sont codées et détiennent, elles aussi, un caractère moral certain. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture