Ce document propose une étude critique du film « Elephantman » de David LYNCH, un des monuments du cinéma mondial. Cette étude peut également se révéler très utile pour le thème de "l'Autre" abordé en classe de seconde : un moyen d'aborder la question de l'altérité au travers une création cinématographique riche et féconde. Comment le personnage de John MERRICK et le traitement qu'en donne Lynh nous permet-il une réflexion particulièrement pertinente sur le thème de "l'Autre". Qui est le monstre ?
[...] Cet épisode trouvera un écho dramatique et nécessaire pour John dans la construction de soi avec le miroir que lui tend le gardien. Il lui faut, s'il veut pouvoir vraiment advenir à lui-même, affronter l'épreuve du miroir, pour pouvoir vraiment savoir QUI il est, pour pouvoir s'envisager. Tout comme le petit enfant qui effectue ce stade du miroir pour grandir, se comprendre comme unique, actif, possesseur de son monde et acteur plein de ses décisions, de ses paroles, John fait l'apprentissage douloureux de la séparation avec l'image, le rôle qu'on lui a attribué : l'homme docile ou la chose exposée. [...]
[...] Peut-être faut-il n'y voir qu'un et c'est déjà beaucoup- accomplissement de soi. II- L'autre éveil d'une conscience : Treves et le spectateur Le docteur Treves se présente derrière la caméra de Lynch comme un personnage on ne peut plus ambigu. Il apparaît, en effet, comme une sorte de docteur Jekill par son rationalisme médical, son souci du genre humain, sa capacité à comprendre et à s'émouvoir mais aussi comme un mister Hyde, plus sombre, tenté par la gloire de sa trouvaille, sa tendance à dupliquer l'attitude de Bytes en exhibant John Merrick, son goût pour les présentation très théâtralisée de son spécimen comme l'atteste son discours devant l'académie de médecine Ses larmes initiales mêmes par lesquelles le spectateur rencontre par la voie de la suggestion ne sont pas claires : horreur, compassion, terreur de l'inconnu se mêlent. [...]
[...] Il fallait un artiste qui saisisse l'humanité singulière de Merrick et l'atmosphère puissamment ambiguë de cette époque. David LYNCH, fasciné par le monstrueux sous ses formes les plus visibles ou les plus insidieuses et retorses, apparaissait le plus à même de relever le défi, metteur en scène idéal des personnages atypiques que l'on trouvait déjà dans Eraserhead, puis avec Dune, Sailor et Lula ou la série télévisée Twinpeaks. Ici, David LYCH se fait quelque peu violence en mettant sous le boisseau- pas totalement néanmoins- ses labyrinthes, ses expérimentations et sa quête des mystères pour faire dans le cinéma qui va droit au but, entamant au fer rouge l'émotion et les conscience comme le chirurgien Treves dans sa salle d'opération. [...]
[...] Au début du film, John Merrick n'est que l'homme-éléphant : en l'exploitant comme bête de foire, on nie en lui de toute évidence une identité qui lui serait propre. Il ne constitue pas aux yeux du monde une personne mais un objet, un objet de profit (Bytes se désigne comme son propriétaire un objet de divertissement dont on se moque ou d'examen dont on applaudit le découvreur comme lors de la séance d'anatomopathologie. Mais le film de Lynch est aussi, grâce, il est vrai, à l'intervention à double tranchant du chirurgien Treves, l'histoire émouvante de l'éveil d'une conscience, celle du passage à l'âge d'homme. [...]
[...] La mère est La grande absente et hante Merrick et le spectateur par son omniprésence. Photographie reliquaire, discours, personnages de substitution, jusque dans la ritournelle obsédante qui tient tantôt de la berceuse pour enfant, tantôt de l'orgue de barbarie (sic de la foire aux monstres du XIXème siècle. Aucune rancune dans les paroles de John Merrick à son égard, au contraire ; lorsqu'il parle d'elle, c'est en terme d'amour, incommensurable, inextinguible, une soif d'amour qu'il peut toujours réactiver par le discours, à défaut de gestes directs. [...]
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