Long-métrage du réalisateur américain Gus Van Sant, ELEPHANT est inspiré d'un drame réel : le massacre de 13 lycéens perpétré par deux adolescents dans le lycée de Columbine le 20 avril 1999. Cette tragédie a profondément marqué les États-Unis et a déjà donné lieu à un film de Michael Moore, Bowling for Columbine.
Dans ELEPHANT, le déroulement des faits est vu à travers des points de vue différents et l'action est répétée, démultipliée. La temporalité se fait malléable et bouscule l'enchainement de la cause et de l'effet. L'auteur filme des êtres, des corps, des mouvements dans l'espace. A aucun moment, il n'insistera sur un élément psychologique chez les jeunes tueurs qui pourrait donner une motivation à leur acte.
[...] A aucun moment, il n'insistera sur un élément psychologique chez les jeunes tueurs qui pourrait donner une motivation à leur acte. Plus qu'un film sur la violence, Elephant se veut d'abord un film sur l'adolescence. Cette transition délicate entre l'enfance et l'âge adulte durant laquelle beaucoup de jeunes en recherche d'identité se retrouvent confrontés à une perte de repères. Le réalisateur s'attache, non à montrer la violence, seulement évoquée à la toute fin du film, mais à en rechercher les racines secrètes : comment peut-on en arriver à des gestes aussi irraisonnés ? [...]
[...] L'impression de désorientation s'accompagne de l'absurdité du mouvement de Michelle. En effet, le personnage ne cesse d'emprunter les lignes droites des couloirs. Mais ses mouvements semblent circulaires, car ceux-ci l'amènent à tourner à droite à plusieurs reprises, comme si le personnage effectuait une boucle et revenait à son point de départ. Ce plan-séquence met en valeur le fait que le temps est éphémère. La profondeur de champ est faible. Cette faible profondeur de champ et les variations d'exposition créent une impression presque imaginaire. [...]
[...] Dans les séquences charnières du film, reprises sous différents points de vue, Gus Van Sant filme des croisements. Nous nous intéresserons particulièrement à la séquence au cours de laquelle le personnage de Michelle évolue dans les couloirs de son lycée avant de se rendre à la bibliothèque. Cette séquence débute environ à la cinquante cinquième minutes du film. Michelle est une jeune fille timide, rondelette et visiblement complexée. Elle ne semble pas assumer sa féminité et fait figure de garçon manqué. [...]
[...] De plus, le mouvement de la caméra renforce cette impression. En effet, la caméra accompagne Michelle lorsque, par peur d'un quelconque rapprochement avec les deux lycéens croisés sur son passage, elle se met à raser les murs d'encore plus près. Lorsque la sonnerie du lycée retentit, l'accélération de sa course renforce encore cette impression de tristesse et de misère psychologique. En effet, la peur de Michelle d'être en retard et la peur du voisinage des deux autres lycéens semblent suffire à créer une certaine panique chez le personnage, qui se met à courir. [...]
[...] En effet, alors que le mouvement de caméra fixe le dos de Michelle (en nous interdisant de voir son visage), ce plan-séquence donne l'impression d'accéder à ses émotions et son esprit de manière assez troublante. Ainsi, on ressent la frustration du personnage, le repli sur elle-même et le fait qu'elle se sous-estime. Le cadrage serré sur son dos voûté et la très faible profondeur de champ donnent l'impression d'une vision resserrée : le spectateur s'identifie à elle. En effet, Michelle semble se replier sur elle-même et se couper du monde extérieur. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture