Son sujet s'inscrit dans le débat pluriséculaire – et omniprésent, rappelle Marc Kravetz en préface- relatif au rôle des médias au sein de la société. Mais si le propos est critique, « l'angle » choisi se distingue des travaux d'Halimi, Chomsky, ou de Bourdieu par son point de départ –historique, donc- et son ambition. Car le travail de Géraldine Muhlmann vise à dessiner les contours du « journalisme idéal », à tracer les grandes lignes de l'évolution de ses pratiques depuis le XIXe siècle, en concentrant son analyse sur la mise en scène du conflit par le journaliste. Et à proposer un outillage analytique original, opposant les journalistes « rassembleurs » aux « décentreurs », dont l'ambition est de fédérer un public derrière eux, ou de faire voir ce qui est caché, ce qui est autre...
[...] Il y a une part d'inaccessible dans le présent qui échappera toujours au compte-rendu du journaliste. La conclusion du travail de l'auteur raisonne comme une véritable profession de foi. Le rôle de la presse, c'est à la fois de constituer du commun, de créer du nous, et faire vivre le conflit, indispensable au maintien de la démocratie. Problématique centrale Géraldine Muhlmann propose ici une analyse de l'exercice journalistique moderne selon deux pôles d'interprétation : le journalisme de rassemblement et le journalisme de décentrement. [...]
[...] Soient deux expériences visant à remettre en cause le journalisme dominant. Le premier refusait le clivage entre fiction et réalité : il y a toujours de la subjectivité, donc de la fiction, dans tout point de vue. Et le réel n'est qu'un foyer de contradictions, de malentendus, de fantasmes divers. Comme pour le New Journalism, Libération constitue une tentative infructueuse de remise en cause du journalisme dominant. Car ces deux expériences nieront la singularité en fondant leur je dans un nouveau total ou particulier la première entretenant l'illusion de l'ubiquité (elle minimisait les conflits de points de vue afin de tous les épouser), la deuxième étant achoppée à la tentation de rassemblement des dominés. [...]
[...] Le statut du journaliste change, sa fonction aussi : il devient reporter de nouvelles venues de plus en plus loin. Le journaliste moderne est ainsi animé d'une volonté de rassembler son lectorat derrière lui, et de créer un sentiment d'appartenance (à une communauté de sens et de valeurs, à une vision commune de la réalité). A partir de 1830 aux Etats-Unis d'Amérique, le reporter s'efforce de s'adresser au public le plus large, aux opinions les plus diverses sur un sujet donné. [...]
[...] Une triple formation dont Une histoire politique du journalisme se fait l'écho. Cet ouvrage constitue, avec Du journalisme en Démocratie, l'un des deux livres tirés de sa thèse de doctorat (et pour laquelle elle a été primée lors de la 6ème édition du Prix le Monde de la recherche universitaire). Son sujet s'inscrit dans le débat pluriséculaire et omniprésent, rappelle Marc Kravetz en préface- relatif au rôle des médias au sein de la société. Mais si le propos est critique, l'angle choisi se distingue des travaux d'Halimi, Chomsky, ou de Bourdieu par son point de départ –historique, donc- et son ambition. [...]
[...] Murrow (correspondant à Londres pendant la Seconde guerre mondiale pour CBS) suivent le modèle du journaliste porteur d'un nous qui fédère la communauté derrière lui. Et nous donne à voir que le conflit peut être imbriqué dans le geste de rassembler. Mais le rôle de témoin-ambassadeur semble avoir ses limites. Le célèbre muckraker fouille-merde Lincoln Stevens ou le reporter Walter Lippmann en sont une illustration. Ils prirent tous deux conscience au début du XXe siècle de l'ambivalence de leur profession. [...]
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