Le correspondant à l'étranger, bien qu'on puisse aujourd'hui le qualifier d'espèce en voie de disparition vu les coûts énormes qu'il entraîne pour le média qui l'engage, est l'un des éléments essentiels de l'information internationale. En effet, lorsqu'il privilégie des événements qui surviennent dans son pays d'accueil pour ensuite les transformer en information qu'il transmettra vers son pays d'origine, il rend la compréhension de ces événements accessible à un public qui, quoique intéressé, n'y est pas pour autant initié. La fonction de correspondant à l'étranger comporte de nombreux aspects qui font partie intégrale du processus de collecte d'information. Plusieurs de ces aspects sont décrits dans le livre Chienne de guerre d'Anne Nivat qui, de septembre 1999 à février 2000, a agi en tant que journaliste pigiste en Tchétchénie et dans quelques républiques voisines auprès des quotidiens français Libération et Ouest-France. Ce livre, à travers les différents récits qu'il comporte, permet donc au lecteur de mieux saisir les différentes caractéristiques du métier de correspondant à l'étranger.
[...] Pour sa part, Anne Nivat avait étudié le russe comme langue seconde en France. Par contre, ne parlant pas le tchétchène, elle devait donc tenter de communiquer avec les Tchétchènes en russe ou trouver quelqu'un, Islam par exemple, pour lui servir d'interprète. Par ailleurs, pour ne pas faire d'erreur d'interprétation, le correspondant doit aussi apprendre à comprendre le langage non verbal ainsi que les symboles utilisés par la société auprès de laquelle il travaille. Par exemple, en Tchétchénie, on peut reconnaître les boïviki par leur bonnet de marque Reebok. [...]
[...] La censure punitive, elle, sera exercée par exemple lorsqu'un média ne respecte pas la ligne du parti au pouvoir. Bref, une des tâches importantes du correspondant à l'étranger sera de démêler toute l'information reçue, d'en retenir l'essentiel, de tenter de déceler la proportion de vérité qui s'y cache et enfin, de compléter cette information par d'autres sources afin de bien comprendre tous les angles de la problématique traitée. En second lieu, le journaliste à l'étranger doit composer avec la culture du pays où il élit domicile pour un certain temps. [...]
[...] Lorsqu'il se retrouve dans un pays en guerre, comme ce fut le cas d'Anne Nivat, la tâche du correspondant sera beaucoup plus difficile et dangereuse. D'abord, qu'il soit accrédité ou pas, il doit, dans la mesure du possible, cacher son identité de journaliste. En effet, lorsqu'ils travaillent en milieu de guerre, il est plus fréquent que des journalistes soient kidnappés ou tués quand ils se font surprendre à filmer, prendre des notes ou interviewer des témoins. De plus, les autorités invitent fortement la population à dénoncer les journalistes lorsqu'ils en voient. [...]
[...] Enfin, le milieu de guerre oblige un certain détachement moral de la part du correspondant. En effet, les journalistes œuvrant en milieu de guerre rencontrent des gens éplorés qui leur racontent comment les conséquences de la guerre les touchent, comment, chaque jour, meurent des innocents qui ne demandent pas mieux que se termine cet enfer. Aussi, le correspondant bien qu'étant parfois témoin lui-même des pires atrocités, ne doit pas pour autant verser dans le sentimental, tâche qui peut parfois sembler très difficile. [...]
[...] Dans un pays autoritaire ou en guerre, comme c'est le cas ici, le correspondant doit d'abord composer avec le fait que le gouvernement, les groupes paramilitaires et même la population peuvent être portés à présenter une version des événements favorable à leurs idéologies ainsi qu'à leurs objectifs. Par exemple, lorsque Anne Nivat réalise une entrevue avec Camil Bassaïev, celui-ci choisit ses mots tout en ne perdant pas une occasion de ridiculiser les Russes. On constate donc une propagande de type politique. [...]
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