La maltraitance médiatique n'est pas un phénomène nouveau en son essence, mais ses moyens d'exécution semblent sans cesse renouvelés: de nouveaux acteurs émergent, de nouvelles victimes apparaissent, de nouveaux moyens de communication naissent, sans qu'aucune réponse juridique n'y soit clairement apportée. Ainsi, alors même que la maltraitance médiatique apparaît à première vue comme un concept flou, elle recouvre une réalité intuitivement palpable. Au cœur de la notion de maltraitance médiatique, qui suppose de traiter brutalement ou violemment une personne en paroles dans les médias, se cristallise la difficile conciliation entre liberté d'expression d'une part, et respect des droits de la personne (dignité, vie privée, réputation) d'autre part. On comprend aisément qu'une couverture « Casse-toi, riche con ! » puisse tout autant être louée du point de vue de la liberté de presse, mais condamnée au regard du respect de la réputation de l'intéressé.
Il semble nécessaire de s'interroger sur la manière dont les acteurs et les victimes de la maltraitance médiatique appréhendent cette réalité, au carrefour de deux valeurs protégées par notre société démocratique.
[...] Cette question fait écho à la réflexion menée par Marshall McLuhan sur les médias : le médium est le message Appliquée à la maltraitance médiatique, cette théorie semble indiquer qu'in fine le message n'importe que peu, comparé à la nature et au nombre de médias qui la rendent publique. La multiplication des acteurs dans le champ médiatique, qui sont autant de maltraitances potentielles, pose aussi la question de la responsabilité. La maltraitance médiatique n'est constitutive d'aucunes infraction pénale. Elle n'est pas susceptible d'être le fondement d'une instance judiciaire, et n'entraîne ni condamnation pour son auteur, ni réparation pour sa victime. [...]
[...] Ainsi, une première maltraitance, celle de la fabrique de l'évènement, engendrerait une autre maltraitance, celle dont est victime la personne. Néanmoins, l'expression de l'anonyme sur internet constitue une formidable avancée démocratique, en témoigne le mouvement des pigeons né sur le réseau social Facebook au début du mois d'octobre, protestant contre les mesures de fiscalité des entreprises, envisagées par le gouvernement, alors contrait de les réétudier. Les acteurs du médiatique se multiplient, assurant ainsi le relai d'une même information de manière exponentielle. [...]
[...] Ces affaires posent aussi la question de l'ambivalence de la relation entre médias et justice. Les médias apparaissent tout à la fois au service de la justice, agissant comme révélateurs, ou moyens de pression sûrs les mirent en cause, mais bafouent ses valeurs presque en toute impunité. En effet, lors d'une mise en examen, le fait de médiatiser des soupçons vaut sanction : avant même l'examen sérieux des faits ou la délibération des juges, une sanction est appliquée au suspect simplement par la manière dont il est traité dans les médias. [...]
[...] Estimerait-il ainsi que la maltraitance dont il est l'objet serait légitime, puisque ses agissements litigieux relèveraient de la sphère publique ? Dans l'entretien accordé au Point le 11 octobre 2011, Dominique Strauss- Kahn se dit en revanche victime d'une véritable chasse à l'homme ajoutant que ce qui est inacceptable, c'est qu'on piétine vie privée et celle de tous ceux qui croisent ou fréquentent Il semble ainsi communément accepter que les personnes publiques, considérées comme puissantes, fassent l'objet d'une certaine maltraitance. [...]
[...] Cette liberté et ce pouvoir s'entrecroisent ainsi, faisant émerger des tensions entre liberté de presse et d'expression et droit de chacun au respect de sa personne, travail critique du journaliste, ou même de l'amateur et acharnement médiatique, droit à la vérité et respect de la présomption d'innocence. Autant d'interrogations qui posent aussi, en marge, la question de la maltraitance légitime Cela pose in fine celle de la conciliation entre deux valeurs démocratiques : d'une part, la liberté de presse et d'opinion, et d'autre part le droit de chacun au respect de sa personne. L'étude de cette question sera traitée du point de vue des auteurs de maltraitance médiatique puis sous l'angle de ses victimes. À mesure que les canaux médiatiques se développent, les acteurs se multiplient. [...]
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