« Si la photographie n'est pas bonne, c'est que vous n'êtes pas assez près ». Cette citation de l'un des plus grands photographes de guerre, Robert Capa, illustre une tendance dans l'art de montrer la guerre qui a prévalu pendant une partie du XXème siècle, à savoir la nécessité pour le photographe de participer au conflit qu'il couvre, de ne pas hésiter à prendre de grands risques en se retrouvant au cœur de l'action, des combats et des bombardements afin de rendre compte au monde entier ce dont il a été le témoin. Au XXème siècle, les techniques et les reportages photographiques n'ont cessé de se développer et ont ainsi permis une large diffusion de la photographie. La première guerre photographiée est la guerre de Crimée, mais ces photographies, qui ne montrent ni la mort, ni la souffrance, ni le déroulement des combats, restent consensuelles et ne provoquent de toute façon pas de remous au sein de l'opinion publique, n'étant pas publiées dans la presse. Peu après, la guerre de Sécession est le premier grand conflit à être complètement couvert par la photographie, et de grands photographes comme Gardner ou Sullivan s'attachent à montrer la vie quotidienne des armées mais aussi des cadavres sur les champs de bataille, tandis que l'avancement des techniques ne permet toujours pas de photographier les combats eux-mêmes. Parallèlement, la peinture et la gravure continuent à représenter la guerre. Si lors de la Première Guerre mondiale les appareils, plus légers et maniables, ont évolué, la photographie de guerre est alors fortement soumise aux directives des gouvernements et retransmet donc une image figée et enjolivée de la guerre. C'est donc la guerre d'Espagne qui marque une révolution tant dans l'histoire de la presse que dans celle de la photographie.
[...] Il faut tout de même reconnaître que la révélation de certaines photos chocs a donné lieu à des mouvements pacifistes après 1945 qui ont été nourris par une résistance puissante à la guerre. Cependant, il est toujours difficile de cerner avec précision l'impact de la photographie de guerre sur l'opinion publique. Ceci dit en termes d'évolution, l'opinion publique européenne, qui fabrique une mémoire collective de ces conflits, ne retrouve pas aussi facilement des images d'Indochine ou d'Algérie que du Vietnam. II Photographier le Vietnam : quelles photographies ? [...]
[...] C'est notamment le cas de Yann Morvan, grand photographe de guerre (il a notamment couvert la guerre du Liban) et de James Nachtwey. Ce dernier, qui est sans doute l'un des plus grands photographes dans son domaine, a couvert depuis 20 ans une série de guerres et de famines et considère qu'il relève véritablement du devoir des photographes de montrer les horreurs de notre monde, d'aller sur le terrain afin de créer des images puissantes capables de sortir le public de son indifférence afin qu'il proteste et mette fin à cette situation. [...]
[...] Il insistait sur la manipulation de la photographie par le pouvoir politico-militaire. FERRO (Marc) et PLANCHAIS (Jean), Les médias et l'Histoire, le poids du passé dans le chaos de l'actualité, CFPJ Cet ouvrage montre les effets pervers de la médiatisation par l'image (désinformation, difficulté pour l'historien de se faire entendre) mais reste essentiellement centré sur la télévision. PORTELLI (Hugues), Médias en guerre in Pouvoirs Paris, aut Article très intéressant dans sa partie abordant la manipulation des médias par le pouvoir d'une part, et l'urgence du direct d'autre part. [...]
[...] Alors qu'au début de la guerre, le marché de la photographie est assez développé en France, il s'affaiblit sous l'occupation. De nombreuses agences photographiques françaises ferment, et la propagande devient vecteur primaire de l'information, pour diffuser l'idéologie nazie notamment via le gouvernement de Vichy : constituée à Berlin, elle circule en France dès les premiers jours de l'Occupation, mais ne crée cependant pas de véritable adhésion des français au nazisme. La photographie joue également un rôle important dans la formation du culte de Pétain : son portrait est rapidement transformé en icône, il symbolise alors le gardien de tous les français (seul face au pouvoir de Hitler)[2] et reçoit en cela l'assentiment populaire. [...]
[...] La photographie est moins politisée. Comme le dit le photographe de guerre Yann Morvan[24], "les photographes ont déjà tout dit des misères de leurs semblables, et l'on recherche plus à faire partager une émotion qu'à informer sur les forces en présence". L'uniformisation esthétique des photographies en une esthétisation de la violence et de la misère, durant les années 1990, est flagrante en Grande-Bretagne comme en France. Il est intéressant de voir que même la mémoire photographique des camps de concentrations à évolué au cours de cette période, stigmatisant elle aussi l'horreur. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture