Habitants d'une Pologne se recherchant parmi les idéaux et les mouvements révolutionnaires de ses voisins, d'une Pologne qui a été privée de son histoire pendant plus d'un siècle, mais aussi privée de jugement et d'identité, les polonais se questionnent sur le sens de leur nationalité et de leurs existences. (...)
[...] Mais la seconde guerre mondiale ainsi que le régime stalinien bloque subitement cet élan de dynamisme. L'extermination de toute l'intelligentsia polonaise et la censure étouffe l'art. La plupart des artistes quittent ce pays où ils ne peuvent s'exprimer. La production artistique durant cette période sont presque nulle ou les quelques œuvres produites n'ont pas été répertoriées : les informations concernant la vie sous régime communiste sont quasi inexistantes. Le multiculturisme a été occulté pendant près de cinquante ans, au profit de slogans vantant l'unité nationale. [...]
[...] La force de la mémoire J'étais destinée à vivre en des temps extraordinaires par la variété de leurs formes de haine collective et d'adulation collective. Petite fille, j'enviais même ces jeunes du pays voisin, qui portaient des chemises marron, adoraient si fort leur chef, et croyaient si fermement dans ses idéals. Quand ils se sont mis en marche pour nous tuer, tout se transforma en haine, jusqu'à la défaite et la mort des tueurs eux-mêmes. Puis, d'autres marcheurs enthousiastes apparurent, adorant de nouveaux idéals qui devaient durer pour toujours, et un autre chef, grand et bon. [...]
[...] Au-delà d'une critique de l'humanité, on peut voir dans Foule V la représentation d'un peuple polonais perdu, qui n'a plus de mémoire, plus de passé, plus de main pour se bâtir un avenir. Juste des pieds, des pieds forts des marches, marches des dictateurs totalitaristes, et des courses, parfois, pour leur échapper. Des pieds car il faut avancer. Mais des pieds qu'ils ne savent pas vers où diriger. L'œuvre a été offerte par l'artiste au musée d'art moderne de Paris en mémoire de l'exposition qui lui avait été consacrée à l'ARC en Janvier 1982, alors que la loi martiale était proclamée en Pologne et les frontières fermées ; Œuvre faisant donc référence à une époque où avoir des pieds ne servait à rien, car il n'y avait pas d'issues. [...]
[...] Vers 1955 apparaissent dans l'art polonais des figures cauchemardesques tout droit venues de Goya, souvenirs vifs des souffrances et persécutions subies pendant la guerre, renforcées par la période stalinienne et la guerre froide. Certains spécialistes parlent alors d'une géométrie de la peur dans l'art polonais. On appelle la période 1955-1960 le dégel à cause du dynamisme de la vie culturelle et intellectuelle pendant ces années. C'est pendant cette période que Magdalena Abakanowicz fait ses compositions monumentales à la gouache sur carton et toile.La distance qui la sépare de la sophistication des principales tendances a intensifié sa vision. [...]
[...] C'est cette tête que l'artiste a refusé de donner à ses 27 personnages. Cette ablation du cerveau et de 4 des 5sens, est clairement une critique de l'humanité, où les gens ne réfléchissent plus et se suivent comme des moutons, manipulés et incapables de réfléchir, de comprendre le monde, de parler, de s'opposer, de communiquer. Humanité d'hommes sans têtes qui ne peuvent plus réfléchir, avec des moignons en lieu de mains, qui ne permettent pas d'agir. Une société formatée où, hommes et femmes, de la même façon, sommes un troupeau, un troupeau d'humains sans tête, aveugles et sans jugement, qui faisons peur. [...]
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