La situation du théâtre est très différente de celle de la poésie. Sans doute, là encore, la production du second demi-siècle mêle-t-elle œuvres traditionnelles et œuvres d'avant-garde ; mais il faut souligner que le grand public accueille les unes et les autres avec la même satisfaction et le même appétit. L'admirable effort des compagnies dramatiques pour faire connaître les créations les plus hardies sans dédaigner le répertoire jugé plus accessible explique cette vie intense que connaît notre théâtre. Jean-Louis Barrault a conduit au triomphe aussi bien Anouilh que Beckett, Ionesco que Billetdoux. Après le TNP (Théâtre national populaire), dirigé entre autres par Jean Vilar (à partir de 1951) et par Georges Wilson, qui depuis sa naissance a attiré plusieurs millions de spectateurs, on a créé des troupes permanentes en banlieue et en province. Le travail accompli par Antoine Vitez a été à cet égard exemplaire. Ainsi peut se former le public ; ainsi peut se créer une nouvelle génération d'auteurs dramatiques. On jugera significatif l'attrait tardif exercé par le théâtre sur nos plus grands écrivains récents.
[...] Eugène Ionesco (1912-1994), écrivain d'origine roumaine, est une figure dominante dans la littérature contemporaine : pendant de nombreuses années, on a joué chaque soir au théâtre de la Huchette, avec un égal succès, La Cantatrice chauve et La Leçon ; Rhinocéros a été l'un des meilleurs spectacles montés par Jean-Louis Barrault. Jacques Mauclair a triomphé à l'Athénée dans Le roi se meurt. Plusieurs titres sont chaque année à l'affiche des scènes étrangères. Pourquoi ce triomphe ? Chaque pièce de ce dramaturge constitue une sorte de farce métaphysique, ou, pour reprendre une expression de l'auteur lui-même, un guignol tragique : nous sommes plongés dans un univers étrange et schématique où nos hantises et nos réactions sont présentées grossies, grotesques et pourtant bouleversantes. [...]
[...] À côté de ce dramaturge né, notons : 1. Le théâtre poétique de François Billetdoux (1927-1991) dont Madeleine Renaud a fait triompher au Théâtre de France II faut passer par les nuages ; René de Obaldia, dont Vilar a monté Génousie au TNP en 1960 et dont Du vent dans les branches de sassafras (1965) est l'un des succès les plus durables des dernières décennies du XXe siècle Le théâtre plus rhétorique de Henry de Montherlant, dont La Guerre civile (1965) constitue un bon exemple : La Guerre civile. [...]
[...] Les Nègres (1958). Treize acteurs noirs se jouent eux-mêmes la comédie. Ils se donnent la représentation des nègres vus par des Blancs, des Blancs vus par des Noirs portant des masques, des Noirs vus par des Noirs, etc. L'ensemble est un vaste pamphlet anticolonialiste et antiraciste. Le théâtre d'avant-garde, ou le nouveau théâtre L'apparition, un soir de janvier 1953, sur l'étroite scène du théâtre de Babylone, à Paris, des personnages de En attendant Godot, de Samuel Beckett (1906-1989), marque une date dans l'histoire de l'art dramatique contemporain, et toute une partie de la production dramatique actuelle en porte la marque : on lui donne parfois le nom, peu satisfaisant à dire vrai, d'« antithéâtre ou de Nouveau Théâtre : ne s'agit-il pas en effet de revaloriser plutôt le théâtre à l'état pur en mettant directement le spectateur face à la situation dramatique ? [...]
[...] Dans Rhinocéros (1959), il refuse de céder à la folie collective qui s'est emparée de son entourage, et, alors que tous ses concitoyens se transforment en rhinocéros, il choisit de rester le dernier, le seul homme (on a pu y voir une caricature du nazisme ou tout aussi bien du régime des Gardes de fer que Ionesco avait connu en Roumanie). Dans Le Piéton de l'air (1962), il peut voler et contempler du haut du ciel notre enfer voué à la destruction atomique. Dans Le roi se meurt (1962), enfin, souverain sans âge d'un pays croupissant, entouré de deux reines consolatrices, mais inefficaces, il affronte la mort à laquelle il avait toujours évité de songer : Les hommes savent. Ils font comme s'ils ne savaient pas. Ils savent et ils oublient. [...]
[...] Le théâtre contemporain La situation du théâtre est très différente de celle de la poésie. Sans doute, là encore, la production du second demi-siècle mêle-t-elle œuvres traditionnelles et œuvres d'avant-garde ; mais il faut souligner que le grand public accueille les unes et les autres avec la même satisfaction et le même appétit. L'admirable effort des compagnies dramatiques pour faire connaître les créations les plus hardies sans dédaigner le répertoire jugé plus accessible explique cette vie intense que connaît notre théâtre. [...]
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