Il s'agit d'une analyse de la séquence finale du film "There will be blood" de Paul Thomas Anderson en 2007.
[...] Il dépose d'ailleurs avec la délicatesse et la lenteur d'un rituel lithurgique deux verres sur un rebord de bois comme un écho à l'eucharistie. Notons aussi qu'il propose un verre à Daniel mais cette « communion » est refusée en guise de premier signe d'adversité. A contrario, Plainview occupe un tout autre espace, celui des deux pistes de bowling aux mêmes couleurs terreuses, sableuses que ses terres forées durant tout le film. Elles se caractérisent par une horizontalité et une profondeur telle une longue nef pour filer la métaphore du lieu de culte. [...]
[...] Ajoutons aussi que ce plan (photogramme possède de nombreux échos esthétiques à ceux de l'hôtel Overlook dans Shining (1980) de Stanley Kubrick : symétrie, profondeur de champ, éclairage central et photographie aux teintes blafardes. Les deux pistes de jeu deviennent presque anthropomorphiques et s'apprêtent à accueillir, à « avaler » Eli Sunday. Ainsi, la configuration spatiale et sa mise en scène résument bien l'univers de chaque protagoniste. Puisque chacun a pris place ; que le duel commence . Photogramme 1. Eli Sunday, le "prophète" devant son autel. Photogramme 2. Les deux pistes de bowling, le territoire symbolique du capitaliste Daniel Plainview. [...]
[...] L'étymologie du titan Cronos pourrait signifier « l'avaleur » et son règne fut entamé dans le sang et la violence jusqu'à la célèbre dévoration de ses enfants (annexe : document d). Anderson ajoute donc peut-être une dimension mythologique à son personnage. D'autre part, dans cette même scène, Plainview se fait aussi un metteur en scène. Dans le photogramme P.T. Anderson réunit le visage d'Eli en amorce gauche avec un flou qui l'apparente à une masse noire informe et donc malléable aux conseils donnés par Daniel tel un metteur en scène dirigeant son acteur. Photogramme 3. [...]
[...] Il fait face à un homme taiseux, assis et immobile. Plus tard, avec les mêmes intentions, Eli rappelle à ses souvenirs -dans un déni total caractéristique du personnage- leur longue amitié. En outre, cette première réplique n'est pas anodine car sa connotation religieuse (le « miracle ») est aussi révélatrice de l'importance du décor de cette séquence. En effet, il nous semble que les deux espaces de la salle de bowling séparés par les trois panneaux de bois rejouent symboliquement l'affrontement des deux personnages : la Foi et le Capitalisme. [...]
[...] Ce chantage ainsi mis en scène se fait donc l'incarnation, la personnification du métier de Plainview : il assaille Eli comme il fore la terre. Cette révélation ajoute une nouvelle dimension au magnat du pétrole : l'omniprésence et l'omnipotence. En effet, avec la technique du drainage, Plainview ne signale même plus sa présence -et sa menace- par un derrick perforant verticalement la surface, il change de stratégie d'exploitation et de régime géométrique : il achète les alentours et se dissémine partout sous la surface tel un rhizome, un monstre à mille têtes qui aspire le pétrole environnant. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture