La définition de l'œuvre d'art a toujours été problématique. Personne n'avait imaginé sinon lui-même que Miró deviendrait ce célèbre peintre si emblématique du surréalisme lorsqu'il peignait ses premières toiles au début du siècle dernier. Une œuvre d'art n'est pas toujours reconnue comme telle par ses contemporains. Nous comprenons dès lors la difficulté à laquelle se sont confrontées les philosophes pour définir l'art selon des critères immuables. Une tout autre question préoccupe les artistes, particulièrement dans une époque où les technologies occupent une place prépondérante, celle de la reproduction de leurs œuvres, qui devient de plus en plus réalisable.
Pour bien comprendre les conséquences que peut avoir la reproduction, il nous faut tout d'abord donner une définition précise de l'art. Ainsi, nous exclurons dans l'exposé tout ce qui a attrait à la littérature ou à la musique, qui bien qu'étant des activités artistiques, ne sont pas reconnues comme œuvres d'art. En octobre 1927 s'ouvre à New York le procès « Brancusi contre Etats-Unis ». Intenté par Constantin Brancusi, sculpteur roumain déjà renommé, ce procès lance aux Etats-Unis le débat sur la définition de l'art. De fait, il s'agit lors de celui-ci de convenir si l' « oiseau », œuvre abstraite du sculpteur, doit être considéré ou non comme de l'art à part entière. L'art est donc en soi inutile, et doit, par l'expression des émotions qui s'en dégage, affecter la sensibilité du public. Qu'elle plaise ou non, une œuvre d'art met en éveil les sens, la vue principalement, mais aussi l'ouïe ou le toucher de façon secondaire.
[...] Ainsi, l'art doit partir en premier lieu d'une intention désintéressée, et ne doit donc servir qu'à matérialiser le beau Gautier dira lui-même : Il n'y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien ; tout ce qui est utile est laid On soulève ici la faiblesse de sa définition, devant la difficulté de définir le beau qui reste une notion abstraite et subjective. Certains ont essayé de le mesurer grâce aux mathématiques. Ainsi, le nombre d'or permettrait selon Léonard de Vinci, génie du XVe, d'évaluer un degré de perfection dans la nature, chez les humains par exemple, en analysant les rapports entre différentes parties du corps. [...]
[...] Toutefois, il peut être à l'origine de chef d'œuvres techniques, pensons aux Compagnons. Néanmoins, l'Allemand Gropius forme en 1919 une école qui concilie l'art à l'utile, en créant en séries des objets fonctionnels à usage courant, tout en leur conférant une certaine dimension esthétique ; c'est la naissance du design. Les principes tels que l'unicité ou la contingence de l'œuvre sont ainsi bafouées et nous avons assisté au cours du XX à un accroissement de la reproduction de l'art, liée à l'industrialisation de l'art. [...]
[...] La reproduction devient ici un puissant outil de diffusion. Tout le monde connaît Guernica ou le Sacre de Napoléon pour les avoir vus mainte fois représentés dans les ouvrages d'histoire. Outre une dimension historique sur laquelle nous reviendrons dans la seconde partie, il semble que la représentation massive d'une œuvre d'art fait sa réputation. Ainsi, la reproduction devient inéluctablement un indicateur pertinent pour donner la valeur d'une œuvre. De même, lorsque les faussaires exerçaient encore de façon significative, il va sans dire que les œuvres les plus reproduites étaient les plus recherchées, à condition bien entendu que les originaux eussent disparus. [...]
[...] Nous en avons déduit que la reproduction pouvait avoir plusieurs origines. En effet, certaines formes d'art vont de pair avec la reproduction, nous l'avons vu, comme la photographie ou la lithographie. Mais de plus en plus, elle dépend de la motivation des artistes qui sont à la recherche du profit. Nous avons soulevé dans cette partie le problème de la remise en cause des principes premiers de l'art, due essentiellement à l'industrialisation de l'art. Dans la seconde partie, nous nous sommes intéressés au statut de la reproduction, et tout particulièrement à notre époque. [...]
[...] Mais reproduction et muséalisation de l'art ne risquent-elles pas d'entraîner une décontextualisation des œuvres d'art ? En effet, peut-on vraiment comprendre une œuvre lorsqu'on la sort de son milieu initial ? Prenons le cas des frises du Parthénon. Celles-ci se trouvent au British Museum à Londres, à plus de 3000 kilomètres de l'endroit où elles ont été sculptées 5 siècles av. J.-C . À vouloir diffuser et à reproduire les différentes cultures du monde en les sortant de leur contexte, on risque peut-être d'arriver à une uniformisation de la culture. [...]
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