L'image du harem est assez déformée par les occidentaux. C'est surtout à travers la peinture et la littérature qu'on reçoit les premières informations concernant la vie au harem. On y évoque une vie extraordinaire, mystérieuse, riche et interdite. Une vie interdite dans une double acception du terme. Premièrement du point de vue oriental, car le mot harem venu du arabe, signifie interdire. Et bien évidement cette signification correspond à l'institution harem, qui est en réalité aussi simple que mystérieuse, logique et très bien organisée. Deuxièmement, le harem ou plutôt le genre de vie qu'on y mène est interdit par les dogmes chrétiens. Le paradoxe est le fait que les premiers européens qui ont réussi à s'approcher d'un harem, ont estimé que cette institution leur rappelait le monastère. Ils n'ont pas eu tout à fait tort, puisque les musulmanes définissent le harem comme une institution éducative où l'Islam est au premier plan.
Comme chaque chose qui est interdite, le harem attire l'attention d'une manière qui s'explique par la recherche de l'exotisme, et la propension naturelle à revêtir de fantasme ce qui échappe à la compréhension directe. Des peintres, musiciens et écrivains européens se sont nourris de cet inconscient collectif rempli d'érotisme, où les mœurs semblent plus libérées que celles de l'Europe. Ce brin d'érotisme qui provoquait la curiosité des Occidentaux et éveillait leurs fantasmes faisait précisément tout l'attrait commercial des créations artistiques qui y puisaient une inspiration facile.
Cette transfiguration d'une réalité méconnue, somme toute prosaïque, en un imaginaire fantasmagorique, est particulièrement apparente dans la mode musicale de la « turquerie », qui s'est développée à partir du XVIIIème siècle comme une « caricature » de la musique militaire utilisée comme entraînement des troupes à la bataille par les janissaires, en général mercenaires chrétiens.
Ce style, venu progressivement à la mode après le siège de Vienne par les Ottomans, a servi de vecteur à un grand nombre de livrets d'opéra se déroulant au harem, avec la connotation sensuelle déjà évoquée. Et comme il se doit, cette imagerie musicale s'est elle-même confondue avec la perception du public occidental vis-à-vis de l'Orient.
Le plus bel exemple en est bien sûr l'opéra L'enlèvement au Sérail de Mozart, qui a rencontré un succès immédiat à cause de l'utilisation des percussions dès le morceau d'ouverture, et de son intrigue amoureuse, basée sur le conflit entre un amour courtois à l'occidentale et l'amour sensuel à l'orientale, ce dernier renvoyant le spectateur à son propre fantasme. A cette mode classique, antérieure à la Révolution Française, devait succéder une interprétation romantique, non moins fantaisiste de ce même fantasme, qui apparaissait dès lors comme une donnée permanente de la vision occidentale de l'Orient. Ainsi se sont succédé dans des styles très divers : Gluck : Les pèlerins de La Mecque ; Gretry : La caravane du Caire ; et plus étonnant, Rossini : L'italienne à Alger suivi de Le turc en Italie !
Les artistes peintres orientalistes représentaient dans leurs tableaux des images de harem, des scènes de la vie au harem, qui correspondaient plus au fantasme qu'à la réalité. Selon les historiens turcs, ils peignaient ce qu'ils s'imaginaient être un harem. La plupart de ces peintres ne sont jamais allés en Orient et ceux qui sont allés, n'ont évidemment pas pu entrer dans un harem. Donc tous les tableaux de cette inspiration, de Delacroix, Renoir, Ingres ou Matisse, ne sont que la représentation des mythes et de leurs fantasmes personnels.
Pour montrer ce qu'on comprend en entendant le mot « Harem », voilà une synthèse de plusieurs documents, écrits par Occidentaux pour Occidentaux qui traitent le même sujet : « Le Harem »
[...] Le harem dirige l'Empire pendant dix ans. Kösem choisit ses vizirs et les autres fonctionnaires. Après la mort de Murat IV, Kösem opposée à la mère du nouveau sultan Ibrahim se fait étrangler. C'est par manque d'information que les occidentaux ont créé cette image fantasmagorique du harem et qu'ainsi s'est propagé en Europe le mythe et l'anecdote à la place de la vérité. Disons que le harem est resté une institution inconnue des occidentaux ou des non musulmans, et qu'il fait partie d'un monde curieux qui a enrichi l'imaginaire de la culture européenne, sans pour autant représenter une quelconque réalité. [...]
[...] Le reste des forces ottomanes est fourni pas les provinces. L'élément principal est formé par le corps des cavaliers sipahi. On comprend à partir de ces explications que la structure et la hiérarchie de l'Empire Ottoman se reflètent plus ou moins dans la hiérarchie du harem. La structure dans le harem a une forme hiérarchisée comme celle de l'Empire Ottoman, où chacun occupe une fonction bien définie. La femme esclave, la maîtresse favorite ou la concubine sont l'analogue féminin de l'organisation des janissaires. [...]
[...] Il y a deux classes dans l'Empire ottoman : les dirigeants et les dirigés. C'est exactement la structure du harem, qui est divisé en deux parties masculine et féminine, les dominants et les dominés- les femmes. Les raya sont les sujets ordinaires : ils produisent et font vivre la caste des serviteurs de l'Etat, la classe des askeri, militaire, titulaires de fiefs ou de fonctions- des avantages accordés par le sultan- qui dépendent d'une juridiction spéciale, celle des kadiaskeri. La distinction entre les askeri et les rayas ne se pose pas en termes de religion ou d'origine ethnique : des chrétiens des Balkans reçoivent des fiefs sans avoir été contraints de se convertir à l'islam ; des askeri peuvent être rétrogradés dans la catégorie des rayas, et les rayas peuvent être promus au statut d'askeri. [...]
[...] Après elles, prennent place les favorites les maîtresses préférées du sultan. Elles sont les maîtresses les plus gâtées, on les appelait ikbal elles possèdent leur propre appartement dans le harem et des esclaves personnelles. Entre les ikbal existaient deux classes, les ikbal sans enfant et les ikbal avec enfants. Les deuxièmes bien sûr ont la possibilité d'avoir le statut de femme du sultan, en tant que mère d'un prince, qui pourrait un jour devenir sultan. La nouvelle épouse du sultan reçoit une sorte d'attestation, elle se fait reconnaître dans les traditions de l'Empire. [...]
[...] Fatima Mernissi estime quant à elle que le harem est plutôt un lieu où les femmes rêvent de s'émanciper. Au cours de l'histoire de l'Empire Ottoman il existe une période marquée par les mères sultanes- les valide, qui ont réussi à exercer leurs qualités de souverain. L'influence des sultanes commence sous Soliman, qui est dominé par son épouse favorite Roxelane. L'avènement de sultans faibles facilite la prise du pouvoir par les sultanes. Ces femmes alors manipulent leur époux et leur fils. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture