Le retable de Saint François d'Assise recevant les stigmates, conservé au Musée du Louvre sous le numéro d'inventaire 309, est attribué à l'artiste italien Giotto di Bondone et daté entre 1295 et 1300. Mesurant 313x163 cm, le tableau à été exécuté selon la technique de détrempe sur bois, très utilisée à l'époque, la peinture à l'huile n'existant pas encore. D'après les descriptions de Vasari au XVIème siècle, le retable était situé dans l'une des chapelles privées de l'église San Francesco à Pise. Les armoiries se trouvant sur le cadre d'origine confirment l'appartenance du retable à un commanditaire privé et laïc, la famille des Ughi, florentins exilés à Pise ou bien la famille Cinquini. Cette œuvre est considérée comme caractéristique de la peinture italienne à l'époque gothique s'insérant dans le courant de pensée naissant qu'est l'humanisme.
Si le terme d'art gothique est utilisé dès le XVème siècle pour désigner les œuvres de la fin de la période médiévale, au XIXème siècle le courant romantique lui donne une résonance bien plus favorable. Il ne détermine aucune école ou courant en particulier, mais englobe la production artistique en Europe du XIIème au XVIème siècle. Dans le domaine de la peinture, au sein même de cette dénomination, différents styles régionaux émergent, influencés par les maîtres comme Giotto ou Duccio.
Le contexte politique dans lequel s'oppose le Saint Empire à la papauté se fait fortement ressentir dans les régions d'Italie où s'affrontent les Gibelins et les Guelfes. L'émergence des cité-états est propice au développement de l'art à travers lequel l'ordre pontifical réaffirme son pouvoir et les grandes familles affichent leur dévotion liée au renouveau de la spiritualité.
L'œuvre de Giotto permet de soulever de nombreux thèmes spécifiques à la période gothique et notamment le statut de l'artiste, l'échange des influences artistiques grâce au développement des chantiers, l'élaboration de l'iconographie franciscaine ainsi que l'apparition de la pensée humaniste. Ces thématiques seront abordées dans un premier temps avec une description formelle du retable puis dans un second temps avec une analyse iconographique puis stylistique. L'étude permettra de dégager les diverses influences reçues et transmises par l'artiste.
[...] Le retable de Saint François d'Assise recevant les stigmates est composé du panneau principal ou pala, au sommet triangulaire, mettant en scène le saint recevant les stigmates et d'une prédelle en partie inférieure, divisée en trois parties égales dans lesquelles s'insèrent des scènes annexes mais essentielles dans la vie du saint et de l'Eglise : Le songe d'Innocent III, Le pape approuvant les statuts de l'ordre et Saint François prêchant aux oiseaux (voir ill.1). Dans la scène principale, saint François d'Assise prend appui à terre sur son genou droit et semble repoussé vers l'arrière par la force des stigmates qu'il reçoit. Son corps est dissimulé par la robe de bure marron qui le caractérise. [...]
[...] Les frères sont en prière, à genoux, tout comme saint François plus en avant vers le pape. La scène s'inscrit dans un cadre architectural orné de fenêtres, de voûtes et d'un plafond à caissons. La dernière et troisième scène est d'un registre plus intimiste et spirituel puisqu'elle figure le saint se rendant à Bevagna, le bien heureux François prêcha à beaucoup d'oiseaux ; et ceux-ci, remplis de joie, se déployaient sur les collines, étendaient leurs ailes, ouvraient leur becs, effleuraient sa tunique La scène de saint François prêchant aux oiseaux est traitée de façon plus minimaliste que les autres. [...]
[...] Si le premier date environ de la même période que le retable, en revanche le second date de 1317. Les différentes œuvres montrent des similitudes indéniables mais un développement de l'expressivité des figures et une palette beaucoup plus riche ont parfois remis en cause l'attribution du retable à Giotto, malgré la signature OPUS iOCTI FlORENTINI sur le cadre, car il est certain que Giotto faisait appel aux artistes de son atelier ou bottega Ce problème d'attribution ainsi que de datation témoigne des limites fixées par le manque d'informations et de sources textuelles au Duecento. [...]
[...] Cette notion de réalité transparaît également à travers les monuments et les tenues vestimentaires contemporains. Cette iconographie renouvelée est également le moyen de mettre l'accent sur le nouveau rôle des ordres mendiants et plus précisément de l'ordre franciscain à l'époque gothique. La scène la plus caractéristique est le sermon aux oiseaux qui illustre l'action de prédication de l'ordre ainsi que le retour à la simplicité et à la nature. Les deux autres scènes de la prédelle attachent plus d'importance au développement historique et politique de l'ordre. [...]
[...] Le dégradé des couleurs pour les vêtements et les chairs produit des nuances approchant le clair-obscur. Ces nombreux procédés permettent d'animer les personnages et surtout saint François à qui Giotto insuffle une réelle présence physique tout en créant l'illusion de la profondeur. Cette évolution stylistique n'est pas sans rapport avec les traités artistiques de l'époque comme le Speculum Majus de Vincent de Beauvais datant de 1244, étudiant les proportions et l'intégration des figures dans l'espace. Tout en s'inscrivant dans le style gothique, Giotto pose les premiers jalons de la Renaissance que sont la perspective et la luminosité des couleurs. [...]
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