L'idée de David Zerbib a été inspirée du texte « Paradoxe sur le comédien » écrit par Denis Diderot entre 1773 et 1777, et publié après sa mort. Diderot propose une réflexion autour du métier de comédien, partant de l'idée reçue selon laquelle l'art du comédien consiste à jouer des émotions vives et intenses, et que l'acteur devrait être doué d'une grande sensibilité. Diderot en prend le contrepied, pour affirmer que bien au contraire, l'art du comédien est un art de l'intelligence, de l'analyse, une activité de réflexion.
[...] Si l'on se réfère au schéma de Schechner, ce film est sur le mode du premier mouvement. Mais peu importe le mode sur lequel il est formé, Altar of Fire relève d'une volonté de garder une trace d'un comportement, bien qu'il ai été légèrement modifié par les deux anthropologues lors du tournage (suppression d'éléments selon eux trop modernes utilisés par la tribu, sélection de moments du rituel lors du montage, etc.). Tout ceci mène à une nouvelle ontologie de la présence, elle aussi basée sur la trace selon Dérida. [...]
[...] Notre expérience ordinaire de la chose nous fait croire que l'on revit le passé dans le présent. Seulement, et c'est là que réside le paradoxe, l'acte est le même, sans vraiment être le même. La performance, qui se veut comme ayant une temporalité unique et pour seul support le corps, se distingue donc des autres arts vivants, où l'oeuvre et la réalisation sont distinctes, et répétables. La conférence a été divisée en quatre temps : la vie dans la performance, une répétition obstinée, ou comment démasquer le spectateur, restauration et reconstitution, survivre. [...]
[...] La performance peut donc être répétée, sans toutes fois être exactement la même. Ce questionnement sur l'ouverture de la performance au théâtre et à la danse, et donc sur le statut du corps de l'artiste dans la performance, est un questionnement qui l'habite jusque dans sa définition même : la performance est considérée comme un nouveau médium d'expression artistique, échappant au découpage traditionnel et réconciliant art et vie. Elle est sensée rassembler les domaines du théâtre, de la danse, de la musique et des arts plastiques, tout en échappant selon certains à la représentation. [...]
[...] Le travail de restauration de ce comportement se fait lors des répétitions. Par exemple, la performance de Chris Burden rappelle les mises à mort des westerns, et autres situations dans lesquels Buffalo Bill excellait. Ainsi, la performance se présente ici sous l'angle du twice behavior (soit en français, le comportement répété deux fois le comportement de la performance étant vécu au moins deux fois. Richard Schechner a élaboré un schéma pour expliquer sa théorie : le point central est le moi, le performer, le point de subjectivité. [...]
[...] Ainsi, la présence du performeur n'est pas figurée, elle est littérale. La base de cette réflexion sur le paradoxe du non-comédien se trouve dans les recherches théoriques et pratiques de Richard Schechner, théoricien du théâtre contemporain, figure des néo-avant-gardes et directeur de la Performance Group dans les années 1970. Dans son livre Between theater and anthropology, restauration of behavior (1985), Richard Schechner développe une conception de la performance basée sur les rituels de passages étudiés en anthropologie (cf théorie des rites de passage de Victor Turner). [...]
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