Guerre est une production théâtrale créée en 2003 par le suédois Lars Norén. Cette pièce commence quand la guerre finit. Norén met en scène une famille au lendemain de la guerre. Il traite de la façon dont un conflit transforme les êtres humains. Il évoque donc les traumatismes et les conséquences que provoque une guerre au sein d'une famille. La scène qui nous intéresse se situe à la fin de l'œuvre. À ce moment-ci, une des filles veut quitter le domicile familial avec son oncle, car elle pense qu'il n'y a plus aucun espoir là où elle est. Ensuite, la mère lui demande où est sa sœur qui se prostitue, elle répond qu'elle ne sait pas face à sa mère qui ne veut ni entendre sa fille, ni son mari, aveugle, qui a fait la guerre, et qu'elle trompe avec le frère de celui-ci qui s'appelle Ivan.
[...] La règle des trois unités (action, temps et lieu) est totalement exclue du théâtre contemporain. C'est grâce à cette écriture fragmentaire que la structure fait sens. C'est grâce à cette fragmentation que nous pouvons voir émerger un tout global. Avec l'ère post-moderne, nous repensons l'Histoire comme une succession d'événements non liés. Ensuite, remarquons qu'il a de nombreux silences dans la pièce. Ceux- ci signifient qu'il n'y a pas de mots pour exprimer la guerre : D : ( ) Son visage est la dernière chose que j'ai vue . [...]
[...] Voyons maintenant comment la structure du texte place l'homme dans l'impasse. Il n'y a aucune linéarité dans l'action, nous avons accès à différents moments, fragments de temps. Nous pouvons voir ceci avec le procédé noir/lumière qui coupe l'action brusquement pour en dévoiler une autre. Comme chez Sarah Kane dans sa pièce Anéantis, Norén utilise le procédé télévisuel du zapping aussi appelé l'esthétique du clip qui sert à séparer les différentes actions en plongeant la scène dans le noir quelques secondes puis en rallumant la lumière sur cette scène pour découvrir une nouvelle action : B : Tout est mieux qu'ici. [...]
[...] À la suite du traumatisme provoquée par la Seconde Guerre mondiale et de la découverte des camps de concentration, il y a une crise de la représentation, un malaise dans l'esthétique théâtral. Il s'agit dès lors de trouver une nouvelle image, un nouveau langage pour pouvoir représenter ce qui ne peut pas l'être, la Shoah. Avec la pièce Guerre, Lars Norén est bel et bien dans l'ère post-moderne. Ce dramaturge opère, comme le titre du livre de Maurice Blanchot l'indique, une écriture du désastre car il invente de nouvelles images, un nouveau langage scénique pour se sortir de l'impasse de l'irreprésentable. [...]
[...] Par exemple, aux pages 91 et 92 : D : Qu'est-ce que tu veux ? E : Ce que je veux ? Un temps bref. Ben . D : Pourquoi tu viens ici en pleine nuit ? E : Ben . Je ne sais pas. Silence D : Tu as dit quoi ? E : Rien . Je n'ai rien dit. Ceci se retrouve à la page 93 : E : Tu ne peux pas comprendre. D : De quoi tu parles ? [...]
[...] Leur parole n'est plus intelligible par celui qui la reçoit. À la suite de la guerre, Lars Norén nous démontre que ce qui se dit ne peut plus être compréhensible après ce qui s'est passé sur le champ de bataille. Même si ce qui se dit est court, bref, concis, aucune parole ne peut réparer le désastre causé. De plus, remarquons que leur conversation est dépourvue de sens à certains passages : E : J'ai même dû tuer ton chien blanc pour avoir quelque chose à manger. [...]
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