Le travail de l'américain Tony Oursler est, à l'instar de plusieurs de ses
contemporains, une recherche sur les formes de représentaton artistique qui vise à faire
sortir l'image de son cadre habituel. L'artiste projette la plupart du temps ses oeuvres
non pas sur des écrans, mais sur des objets (ici des sphères en fibre de verre, mais aussi
cubes de plexiglas dans Digtal 3 (1998), poupées de chiffon dans The Watching (1992),
System for a Dramatic Feedback (1994) et Switch (1996), façades de bâtiments pour
Window Project (2005)... Hybridation entre vidéo, sculpture et architecture, l'oeuvre de
Tony Oursler met l'homme au centre d'un incessant questionnement sur la persistance du
simulacre dans le monde moderne, dont un des vecteurs est la télévision, considéré par
l'auteur comme un média “mimétique”, imitant la réalité et se substituant de plus en plus
à celle-ci. L'auteur s'interroge sur les conséquences de ce déferlement d'images par le
biais de la thématique de regard et de la fascination de l'homme pour la mort et l'horreur
(elles aussi largement diffusées par la télévision, tout particulièrement aux États-Unis,
pays d'origne de Oursler, où les mass-média ont instauré une culture de la peur sans
précédent (cf . le documentaire de Michael Moore, Bowling for Columbine, sur le culte des
armes aux États-Unis).
[...] Esthétique des arts numériques. Tony Ousler : Eyes (1996) TONY OURSLER, EYES (1996) Présenté dans le cadre de la rétrospective Dispositifs à la Galerie du Jeu de Paume à Paris, du 15 mars au 22 mai 2005 D'énormes sphères en fibre de verre, suspendues dans l'espace ou simplement posées à même le sol. Sur la surface de chacune est projeté un oeil géant, en vidéo. Des images télévisuelles, pornographiques et/ou violentes, sont elles-mêmes réfléchies sur ces globes. L'espace est très épuré, ne laissant apparaître que les globes et les appareils de projection. [...]
[...] En passant par l'image plutôt que par le réel, celui qui était prévenu du pouvoir pétrifiant du monstre détenait une arme: l'art subtil d'affronter la mort sans lui faire face . Tony Ourlser , Eyes (détail) Courtesy Tony Oursler et Metro Pictures, New York Tony Oursler projections vidéo sur fibre de verre Il semble par contre aujourd'hui nécéssaire, à l'inverse de la symbolique véhiculée par le Mythe de Persée affrontant Méduse, de passer par le réel pour appréhender l'image, et plus urgent d'affronter la mort en face que de se lasser fasciner par ses simulacres dont les yeux-écrans de Oursler sont victimes. [...]
[...] Le sujet n'est plus en rapport frontal avec l'image. Il la pénètre, il s'y déplace, il la modifie.”2 Le sujet étant pour Couchot celui qui produit l'image (l'artiste), il en devient lui aussi un agent, selon la formule de Fred Forest L'auteur n'est donc plus face à un objet fini, mais il établit une relation dynamique avec une oeuvre en transformation, un processus. Il peut dès lors la modifier, la réactualiser, dans un mouvement d'aller-retour avec celle-ci, démarche impossible avec une production “traditionnelle”, tel qu'un tableau ou une sculpture. [...]
[...] Il contribue de plus à appuyer cette idée de simulacre qui persiste en arts médiatiques et dont l'Américain use tout en la dévoilant. La figure humaine, le corps morcelé est une constante chez Tony Oursler. Il amène l'homme en face de l'homme instaurant une relation de miroir qui relève du fétichisme. . la présence d'objets-écrans donnant corps aux images vidéo sont DEBRAY, Régis. Vie et mort de l'image, Gallimard, Paris COUCHOT, Edmond. Un nouveau champ d'expérimentation dans le monde des images, critique de l'exposition Brouillard précis. [...]
[...] l'imagination, et plus particulièrement l'imagination collective, produit la réalité”7, le rapport réalité/fiction instauré par les médias (la télévision en particulier) que met en scène Tony Oursler se veut une projection de l'imagination collective, donc un reflet de la société qui produit ces images. L'inversion du regard est une fois de plus au centre du questionnement : Est-ce la télévision qui nous a rendus ainsi, ou est-ce nous qui avons créé cette télévision ? Plan de Eyes, installation de Tony Ousler. Tony Oursler. Projection vidéo sur fibre de verre Cité dans COUCHOT, Edmond et HILLAIRE, Norbert. L'art numérique, comment la technologie vient au monde de l'art, Paris, Flammarion p LÉVY, Pierre. [...]
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