Quand j'ai commencé une approche de l'œuvre de Kantor, j'ai trouvé des concepts forts, des commentaires sur des aspects très particuliers de son travail, une multitude d'opinions et de choses à dire sur lui. Kantor c'est « Le théâtre de la mort », « l'avant gardisme », « le dictateur », Kantor c'est ceci ou cela. Je me suis donc demandé comment est-ce que j'allais pouvoir aborder son œuvre et qu'est-ce que je voulais mettre en avant dans cet édifice. Finalement, c'est le mot édifice qui est resté. Son édifice. Cette impression de construction malgré la déconstruction, cet assemblage soudé, uni de techniques, d'objets, de petits bouts de scènes accolées me semblaient bien plus primordiales qu'un quelconque point de son parcours. Kantor a déblayé un terrain, a mis au niveau tous les arts et les sciences, il a fait une matière avec l'ensemble des composants du théâtre, de cette matière il a fait des instants, des « clichés » et les a assemblés pour faire des scènes puis des pièces. Sur ces pièces il a peint des manifestes pour les lier plus encore. Son œuvre me semble prête à emballer.
Bien sûr, je n'entends pas traiter de toute l'œuvre de Kantor, mais je tiens à montrer son aspect structuré et indépendant, et ce principalement avec l'appui de ses pièces de théâtre. Je ne tiens pas à m'étendre sur les motifs de cette unité indépendante ni à montrer sa complétude ou ses failles. Je veux juste faire l'ébauche d'un aspect : la recherche d'une unité, d'un tout, fait de la fusion d'éléments équivalents.
[...] Pour conclure Kantor a donc bel et bien créé un édifice solide et pertinent. Il dans le monde de l'art, mis en place un système où il était libre, une bulle de résistance à son usage et à l'usage de ceux qui l'ont rejoint. La structure de l'édifice telle que je l'ai montrée peut sembler réductrice, elle l'est. Il y a certainement des branches orphelines, des points d'encrages vacants. Je n'ai pas dit que la structure était parfaite ni même achevée. [...]
[...] Son œuvre est-elle emballée comme coupée du monde ? Ou n'a-t-elle pas plutôt une frontière faite pour être franchie ? Au centre de l'édifice On peut se demander ce qui porte l'œuvre, ce qui est à son centre et la maintient. Le liant est connu, la structure est connue, mais autour de quoi s'articule l'édifice ? Il y a bien sur les thèmes fort de la mort et de la mémoire, il y a bien sur une volonté colossale de la part de Kantor et des autres artistes, mais il me semble que ce sont là plus des moyens que des origines. [...]
[...] Dans Wielopole Wielopole, les scènes de la vie du Christ apparaissent dans un ordre non conventionnel, voir impossible (Kantor voulait mettre la crucifixion avant la naissance). C'est une mosaïque et pour Kantor cela reste une unité qu'on ne peut pas analyser De même ses souvenirs d'enfance ne sont pas chronologiques. Les pièces ne sont pas divisées en tableaux, ce sont des images juxtaposées qui se déroulent et, ce faisant, Kantor comprime le temps pour créer une unité, une conjonction qui soit basée sur la manipulation du passé A l'origine de la construction des pièces il y a un matériau. [...]
[...] Kantor aime tout ce qui est illégal illégitime comme sa présence sur scène ou le fait de jouer dans les vestiaires. Il se veut contre tout donc du côté interdit, du côté où l'on est seul. Il accorde beaucoup d'importance au seuil, le seuil de la porte. Il est lui-même, dit-il, resté des années sur le seuil de la Chambre de la Mémoire avant de faire le pas de bascule. D'un autre côté, Kantor emballe, en ce faisant délimite, marque une frontière entre l'intérieur et l'extérieur. [...]
[...] Voilà l'origine de la répétition et de la récapitulation : l'unité de l'œuvre. La présence de Kantor sur scène, un peu illégale, un peu discrète, comme un metteur en scène qui vient dire au revoir dans une pièce macabre, la reprise des machines, des comédiens, tout sonne comme un dernier rappel. L'œuvre de Kantor est un grand ensemble indépendant fait de sous unités indépendantes et liées. La question de la frontière occupe une place très importante dans l'œuvre de Kantor. [...]
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