Domon Ken, largement considéré comme un photographe japonais de légende, a eu pour cheval de bataille majeur celui du réalisme photographique. On cite souvent sa phrase selon laquelle « si ce n'est pas réaliste, alors ce n'est pas de la photographie. » En 1950, dans les colonnes du magazine Camera il a déclaré que l'essence du mouvement réaliste était « l'absolu sur le vif, absolument sans pose ». Il en appelait également à « la communication directe entre l'appareil et le sujet ». Son charisme a eu une grande influence et de nombreux photographes amateurs ont suivi son mouvement.
Les artistes Japonais sont, sous la guerre, limités, ou au moins fortement aiguillés, par le gouvernement militaire en place. Parmi eux les photographes souffrent de la situation au même titre, voyant leur liberté restreinte au niveau des sujets autorisés mais aussi du point de vue matériel, la pellicule et le papier photographique devenant difficiles à se procurer. Cependant, dès la fin de la guerre, et alors que la situation économique et sociale est encore très difficile, le monde de la photographie quant à lui retrouve son essor très rapidement. Selon l'expression d'Anne Wilken Tucker dans son ouvrage The history of Japanese Photography , cet appétit d'image donne l'impression que « les gens voulaient satisfaire leur faim d'expression et de création qui leur avait été supprimée pendant si longtemps ».
[...] Sur le fil du misérabilisme En introduction à une discussion sur l'œuvre de Domon, je partirai du premier sentiment personnel suscité par la découverte de clichés variés, au fil des recueils Domon Ken no Shôwa qui reprennent en cinq volumes autant de séries célèbres, soit Fûbô visages Kodomotachi enfants Nihon no fûkei(« paysages du Japon Dokyumento nihon Le Japon documentaire et Nihon no butsuzô Sculpture bouddhique japonaise Fubô , Kodomotachi et Dokyumento Nihon , en particulier, comprennent de nombreuses photographies où la dimension sociale est évidente et omniprésente. Cette dimension s'accompagne souvent d'une charge émotionnelle qui peut être empreinte de poésie ou de mélancolie. Cependant, cette sensibilité peut également parfois, par la répétition d'images de détresse sociale, d'enfants pauvres, de bâtiments en ruines confiner à l'esthétique du pathos. [...]
[...] Ce sont ces magazines qui seront le support de l'élan massif de la photographie amateur des années 50, où vont émerger les deux courants principaux que sont le photoréalisme et le subjectivisme. Nous parlerons ici principalement du premier courant, puisque, promu intensément par Domon Ken tout au long de sa vie, il est le pivot de son œuvre. De façon générale, les années d'après-guerre sont celles du développement de la photographie comme art majeur au Japon, et cela grâce aux photographes amateurs en grande partie. Ils étaient encore relayés aux marges du genre jusqu'à la guerre, mais prennent de plus en plus d'importance à cette époque. [...]
[...] Il est né et a été développé grâce à la figure charismatique de Domon, mais, d'après Anne Wilken Tucker, son succès est également dû à deux tendances des amateurs : celle de vouloir représenter directement les sévères réalités de l'après-guerre, et celle de rejeter le style trop soigné de la photographie de salon de l'avant-guerre. Non seulement le mouvement du photoréalisme japonais aura été l'une des plus importantes sources documentaires concernant l'Histoire du Japon de l'après-guerre ; mais surtout, la fraîcheur des clichés du premier âge du réalisme nous frappe encore aujourd'hui. [...]
[...] Cette année- là, il commence ses séries de photographies de statues bouddhistes dans divers endroits du Japon. En 1959, il photographie les enfants pauvres de la région minière pauvre de Chikuho, près de Fukuoka. Il est hospitalisé en 1960, à l'âge de 51 ans, suite à une hémorragie cérébrale qui le laisse paralysé sur tout le côté droit de son corps. Cela ne lui permet plus de tenir un appareil de 35mm, mais il continue à photographier avec un appareil grand format, depuis sa chaise roulante. [...]
[...] En réaction, les photographes amateurs redoublent d'ardeur pour envoyer leur meilleur travail. La première photo qu'il sélectionne représente un groupe de musiciens de rue pris à Tokyo. L'année suivante, les participations sont sélectionnées à tour de rôle par plusieurs photographes, tandis que Domon et Kimura Ihee entament un dialogue en plusieurs épisodes, à propos du photoréalisme, dans le numéro de juin 1951. En 1952, Domon comme Kimura reprennent le rôle de juge des concours mensuels, et il apparaît que la période entre 1952 et 1954 voit le photoréalisme atteindre son apogée. [...]
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