Depuis mi 2009, les établissements publics nationaux relevant du Ministère de la Culture ont mis en place la gratuité pour les visiteurs de moins de 25 ans, après analyse des expériences étrangères et des tests effectués en France sur une quinzaine de musées. De même, du côté des spectacles, il n'est pas rare que certains publics (étudiants, chômeurs) aient un accès gratuit durant certains jours. Pour la Fête de la Musique, des milliers de concerts gratuits ont lieu partout en France ; et c'est encore gratuitement que les adolescents d'aujourd'hui téléchargent illégalement des dizaines de chansons numériques. Ainsi, si parfois la gratuité d'accès à la culture semble une évidence, c'est aussi parfois un délit. Cette ambivalence de la question est à relier à la définition même du mot « culture », dont l'acception française est très large. Ainsi, pour beaucoup, la culture fait partie des loisirs, alors que pour d'autres, elle rime avec instruction. Cela ne doit pas faire oublier qu'il peut s'agir tantôt d'un service public, tantôt d'une prestation, voire d'une industrie, privée.
Il est donc normal d'observer, parmi les enjeux de la gratuité d'accès à la culture des penchants antagonistes et contradictoires. C'est donc autour de trois thèmes majeurs que les acteurs de la culture se doivent de réfléchir afin de discerner l'enchevêtrement des enjeux de cette mesure : la démocratisation culturelle, le financement de la culture et l'image même de cette dernière (...)
[...] Dissertation concours ISCP 2010, externe La gratuité d'accès à la culture, quels enjeux ? Introduction Depuis mi 2009, les établissements publics nationaux relevant du Ministère de la Culture ont mis en place la gratuité pour les visiteurs de moins de 25 ans, après analyse des expériences étrangères et des tests effectués en France sur une quinzaine de musées. De même, du côté des spectacles, il n'est pas rare que certains publics (étudiants, chômeurs) aient un accès gratuit durant certains jours. [...]
[...] La gratuité concerne les collections permanentes. De même, à la Comédie Française, la gratuité est appliquée aux étudiants le premier lundi de chaque mois, dans la limite des places restantes. Les bibliothèques numérisent en masse leurs volumes de libres de droits afin de les rendre accessibles au plus grand nombre par Internet, gratuitement. Les Archives font de même avec leurs fonds généalogiques, évitant aux lecteurs des centaines de photocopies payantes. Parallèlement, comme la gratuité apparaît comme n'étant pas le seul critère de démocratisation culturelle, on a communiqué différemment et on créé de nouvelles activités, comme le slam au musée du Louvre, les concerts traditionnels au Quai Branly, l'exposition d'œuvres contemporaines au château de Versailles etc. [...]
[...] Il est donc normal d'observer, parmi les enjeux de la gratuité d'accès à la culture des penchants antagonistes et contradictoires. C'est donc autour de trois thèmes majeurs que les acteurs de la culture se doivent de réfléchir afin de discerner l'enchevêtrement des enjeux de cette mesure : la démocratisation culturelle, le financement de la culture et l'image même de cette dernière 1er enjeu : la démocratisation culturelle ? 1.1 La gratuité ici et ailleurs La démocratisation de l'accès à la culture a été élevée en point d'orgue de la politique culturelle française par Jack Lang, dans les années quatre-vingt, d'où le lancement de l'Année du Patrimoine, des Journées du Patrimoine, de l'Année de l'Archéologie etc. [...]
[...] Toutefois, ces opérations sont très ponctuelles. On a donc regardé avec attention les expériences vécues par nos voisins étrangers, en Grande-Bretagne, par exemple, où la plupart des musées londoniens sont gratuits pour tout le monde, tous les jours, depuis longtemps. Mais les établissements anglo-saxons ne sont pas gérés de la même manière. Le test réalisé en France l'an dernier sur une quinzaine de musées nationaux devenus gratuits pendant six mois n'a pas abouti aux mêmes conclusions Des résultats mitigés En effet, il apparaît que, si l'on a bien constaté une hausse du nombre de visites, le nombre de primo-visiteurs a peu augmenté : ce sont essentiellement les habitués qui reviennent. [...]
[...] Le constat est terrible mais terriblement logique : lorsque l'on a payé, on apprécie d'en avoir pour son argent ; lorsque c'est gratuit, peu importe, puisque l'on pourra revenir, et que de toute façon cela n'a demandé aucun effort en contrepartie Le risque du tout culturel Le risque, au fond, c'est le tout culturel si ce qui était déjà gratuit car peu coûteux à produire et susceptible de passer pour un divertissement est au même tarif (c'est-à-dire gratuit) que ce qui est inestimable et unique car appartenant au patrimoine national, comment la génération suivante va-t-elle être capable d'opérer un tri, un tri dont on sait, tant dans les archives, en archéologie, à l'Inventaire, dans les musées, dans les salles de spectacle, qu'il est nécessaire pour la vitalité de la production culturelle, l'émulation et la protection du patrimoine ? Le méli-mélo incompréhensible risque d'apparaître rapidement comme inextricable. Le problème de la gratuité pose donc aussi la question, assez taboue en France, de la valeur de ce qui est vu et donc de la capacité critique des futurs visiteurs ou spectateurs. Conclusion Nous avons donc pu voir à quel point la gratuité est au centre d'un certain nombre de questions actuelles et essentielles. [...]
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