La gratuité des musées soulève de nombreux enjeux. Enjeux financiers tout d'abord : comment remplacer les bénéfices initialement procurés par la billetterie ? Sur quelle base seront calculées les éventuelles subventions ? Il est évident que la gratuité des visites supprimera une source non négligeable de recettes. D'ailleurs, lors de sa campagne électorale, l'UMP, préconisant la gratuité des musées, avait estimé entre 150 et 200 millions d'euros le coût de cette mesure. Mais l'enjeu de la gratuité ne se limite pas à un problème d'ordre économique.
L'idée de gratuité des musées entraîne de nombreuses interrogations: comment gérer le nouvel afflux de visiteurs dans les musées, tout en continuant à offrir au public une visite enrichissante et la plus personnalisée possible ? Quel moyen trouvera-t-on, autre que le « pass », la carte d'abonnement ou d'adhésion, pour fidéliser des publics ; ces cartes offrant une communication privilégiée à ceux qui le souhaitent ? Dans quelle mesure les musées vont-ils devoir adapter leur politique culturelle ? Est-on certain que la gratuité d'un musée participe à la démocratisation culturelle visée? Quel public se cache derrière ces 50% d'augmentation de la fréquentation des musées ? Est-ce réellement les publics ciblés par la gratuité? Les chiffres ont ici besoin d'être analysés. Enfin, la gratuité ne met-elle pas en péril la qualité du musée ou encore la valeur que le visiteur lui attribue? En somme, l'efficacité de la gratuité est-elle prouvée? Si elle augmente le nombre de visites, ne risque-t-elle pas aussi d'engendrer certaines pertes, plus sérieuses encore que des pertes financières ? De nombreuses questions que nous tâcherons d'éclaircir.
[...] Quel moyen trouvera-t-on, autre que le pass la carte d'abonnement ou d'adhésion, pour fidéliser des publics ; ces cartes offrant une communication privilégiée à ceux qui le souhaitent ? Dans quelle mesure les musées vont-ils devoir adapter leur politique culturelle ? Est-on certain que la gratuité d'un musée participe à la démocratisation culturelle visée? Quel public se cache derrière ces 50% d'augmentation de la fréquentation des musées ? Est-ce réellement les publics ciblés par la gratuité? Les chiffres ont ici besoin d'être analysés. [...]
[...] Peut-être que nous devrions plutôt préférer une gratuité ciblée à une gratuité totale. On pourrait cibler la gratuité dans le sens où elle serait mise en place pour les publics défavorisés de la culture tels que les enfants et étudiants, les titulaires des minima sociaux ou les chômeurs. Par ailleurs, on ciblerait la gratuité en l'instaurant durant certaines périodes, occasionnelles et donc plus attractives. Par exemple, les études l'ont prouvé, la gratuité des musées et monuments nationaux, établie et fortement médiatisée à l'occasion de journées telles que la Nuit des Musées ou les Journées du Patrimoine, se montre efficace à ouvrir la culture à de nouveaux publics. [...]
[...] Pour un visiteur, la rentabilité est aussi le mot d'ordre dans les musées : il faut rentabiliser son ticket d'entrée. L'attention du visiteur n'en sera que plus grande. Aussi, la gratuité ne va-t-elle pas amener à une dépréciation de la qualité d'un musée compte tenu de l'afflux considérable de visiteurs? Ainsi, la gratuité cache un véritable problème : le visiteur doit continuer à se sentir invité, accueilli, considéré, accompagné, enrichi, et autonome, sentiments auxquels il s'attend inévitablement en poussant la porte d'un musée. [...]
[...] Selon Marie-Hélène JOUZEAU, Directrice du Musée du château des Ducs à Nantes, si l'objectif du musée est d'accroître l'accessibilité physique et intellectuelle aux collections, d'élargir et diversifier la fréquentation, la mise en œuvre de politiques volontaristes s'impose, politiques qui ne sont pas nécessairement antinomiques avec l'entrée payante De façon similaire à l'argumentation de Madame JOUZEAU, une étude récente[3], réalisée pour le Ministère de la Culture par Anne GOMBAULT (pour le management) et Christine PETR (pour le marketing), démontre que le prix n'est pas le seul obstacle à la fréquentation des équipements culturel, ni même le principal. La gratuité ne crée pas l'envie de consommer de la culture et moins encore pour ceux qui n'ont pas connu d'expériences satisfaisantes en la matière expliquent les deux professeurs. Ainsi, pour beaucoup, le prix semble n'avoir jamais été un facteur de décision : on ne choisit pas le musée le moins cher. Dès lors, la gratuité totale est-elle vraiment judicieuse en terme de démocratisation de la culture ? [...]
[...] Aujourd'hui encore, trop de personnes se tiennent à l'écart ou sont tenues à l'écart de la Culture. Trop de musées ou de monuments historiques restent peu fréquentés, voire inconnus. C'est pourquoi, trois domaines d'action sont à privilégier en 2008 en ce qui concerne le secteur de la culture : l'éducation culturelle et artistique à l'école, le secteur des médias qui favorise l'accès à la culture, et, l'élargissement des publics. C'est pour élargir les publics, et, plus généralement, pour démocratiser la culture que l'expérience de gratuité des musées a été choisie. [...]
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