Disons pour commencer que les biographes de Simmel n'ont pas la tâche facile dans la mesure où ses archives personnelles ont été détruites au début de la Seconde Guerre mondiale. Georg Simmel est né à Berlin en 1858, et mort à Strasbourg en 1918. Sa tombe, aujourd'hui en ruine, se trouve au cimetière de Cronenbourg. « Ruine ou occasion de mémoire ? » Telle est la question qui sert de sous-titre à l'article de Claudia Portioli, intitulé : "La tombe de Simmel dans l'obscurité". Mais peut-être cette tombe parvient-elle à réaliser cette « impression de paix » dont Simmel pense, dans le texte Réflexions suggérées par l'aspect des ruines qu'il consacre au sujet, qu'elle est le propre de certaines ruines. Bien que d'origine juive, ses parents s'étaient convertis au christianisme : au catholicisme du côté de son père, au protestantisme évangélique du côté de sa mère. Il semble s'être rattaché à elle sur le plan religieux. Il reste que ses origines juives le poursuivront, puisque l'antisémitisme en vigueur à l'époque en Allemagne fut suffisamment « efficace » pour faire obstacle à sa carrière, tandis qu'il postulait pour une chaire à l'université de Berlin.
C'est ainsi qu'il fût « relégué » à Strasbourg, aux frontières du Reich, où il enseigna durant la Grande Guerre, avant de décéder d'un cancer du foie. Toujours est-il qu'une certaine aisance financière, due à l'héritage paternel, lui permit de vivre sans trop se soucier d'avoir à gagner sa vie, lui permettant surtout de consacrer l'essentiel de son existence à ses recherches, universitaires ou non, à son enseignement universitaire, somme toute marginal (...)
[...] 2.1.1. Simmel et la musique : A propos de la musique, on pourra en effet faire mention d'un passage extrêmement intéressant, dans le texte que Simmel consacre à Michel-Ange. Il s'agit, comme très souvent chez Simmel, d'une analogie (nous évoquerons plus tard l'emploi constant des analogies dans les réflexions, et même dans les raisonnements de Simmel). Là, c'est de l'analogie entre la sculpture (en l'occurrence celle de Michel- Ange), et la musique qu'il s'agit. Tout comme la sculpture est l'art qui ne peut absolument pas partager son espace, l'art qui autodélimite son propre espace, et par conséquent dispense, auprès de celui qui la reçoit, un « sentiment de solitude infinie », la musique, dit Simmel, partage avec la sculpture cette « clôture » de l'espace. Pour plus de précision, nous citerons ce passage : « (Ces) figures concrètes idéelles (Simmel parle en réalité dans ce passage des figures de la fresque du plafond de la chapelle Sixtine, qui sont bien évidemment des peintures, mais ayant un « être sculptural » - sans pour autant être des « sculptures peintes », comme Simmel fait remarquer qu'on l'a trop souvent dit), dans leur immédiateté et leur autonomie totales, procurent l'impression de cette solitude infinie, et par là elles portent à son point culminant ce caractère de profond sérieux, en vérité déjà teinté de tragique, qui est fondé dans l'essence même de la sculpture et qu'elle partage avec la musique. (...)
[...] Ainsi est né un nouveau tout, composé à la fois d'un élément d'art et d'un élément de nature fondus dans une unité caractéristique. Certes, si l'on se place au point de vue du but que l'esprit a poursuivi en édifiant un palais ou une église, un château ou un portique, un aqueduc ou une colonne commémorative, il semble que l'état présenté par la ruine de tous ces édifices soit un hasard dénué de sens ; mais un nouveau sens s'empare de ce hasard, l'embrassant en même temps que la formation de l'esprit, en une seule idée, fondée non plus dans une téléologie humaine, mais dans une profondeur où celle-ci et l'entrelacement des forces naturelles inconscientes jaillissent d'une source commune. [...]
[...] Georg Simmel et l'esthétique 1. Vie et œuvre La vie Disons pour commencer que les biographes de Simmel n'ont pas la tâche facile dans la mesure où ses archives personnelles ont été détruites au début de la seconde guerre mondiale. Georg Simmel est né à Berlin en 1858, et mort à Strasbourg en 1918. Sa tombe, aujourd'hui en ruine, se trouve au cimetière de Cronenbourg. Ruine ou occasion de mémoire ? [...]
[...] On attribuera volontiers cette impression de paix produite par la ruine à un autre motif : l'évocation du passé. Elle est la demeure de la vie d'où la vie s'est retirée. Mais ceci n'a rien de négatif ou de surajouté. Il n'en est pas ici comme il en est des choses innombrables, qui après avoir flotté dans la vie ont été par hasard jetées sur la rive et qui d'après leur nature pourraient tout aussi bien être reprises par son courant. [...]
[...] Cet équilibre se trouve rompu lorsque l'édifice tombe en ruine, signant en quelque sorte ainsi la revanche et la vengeance de la matière soumise, malgré elle, aux exigences de l'esprit. De là ce sentiment de mélancolie qui s'empare de l'esprit à la contemplation des ruines, qui semblent signer le triomphe de la matière, hostile aux victoires de l'esprit. Et malgré cela, la ruine est une apparition bien plus significative que ne le sont les fragments provenant de la détérioration d'autres oeuvres d'art. [...]
[...] Nous voulons dire par là qu'il pose les fondements depuis lesquels l'homme accède au sens de la spatialité. Cette anthropologie s'inscrit dans une dialectique de la nature et de l'esprit. Pour le dire rapidement, s'il y a bien, semble-t-il, quelque chose comme une réalité de l'espace, cette réalité n'est pas séparable de la réalité physique, matérielle et, en tant que celle-ci est considérée en-soi, il est alors impossible de dire si cet espace (inséparable des choses) est pensable comme continu ou comme discontinu. [...]
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