Alfred de Lostalot, « Exposition des oeuvres de Claude Monet », Gazette des Beaux-Arts, 1er avril 1883

Thèmes abordés

Alfred de Lostalot, « Exposition des oeuvres de Claude Monet », Gazette des Beaux-Arts, 1er avril 1883, expositions impressionnistes

Résumé du document

Les expositions impressionnistes, décriées à leur début, ont fait couler beaucoup d'encre chez les critiques d'art. Par exemple, Louis Leroy a écrit des articles virulents sur Claude Monet, notamment à propos du tableau Impression exposé en 1872 : « Je me disais aussi, puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l'impression là-dedans… ». Par la suite, Alfred de Lostalot (1837 - 1909) défend Monet en publiant un article « Exposition des œuvres de Claude Monet », paru dans la Gazette des Beaux-Arts le 1er avril 1883, à l'occasion de l'exposition des œuvres de Monet dans un appartement transformé en galerie. Alfred de Lostalot est un médecin, mais aussi un homme de lettres et d'art ; il est très proche de ce milieu et pratique le dessin, la critique d'art, notamment publié dans la Gazette des Beaux-Arts et a également fondé la revue les Beaux-Arts illustrés. L'article, datant de 1883, paraît près de dix ans après la première exposition d'une toile dite « impressionniste ». Si au début du mouvement, l'auteur est sévère envers les impressionnistes (ce qu'en témoigne l'article paru en 1876 dans les colonnes du Bien public), son jugement change ; il fait d'ailleurs partie des premiers défenseurs de l'impressionnisme au sein de la Gazette des Beaux-Arts avec Duranty, Gonse et Charles Ephrussi. Son article témoigne de sa volonté de réhabiliter la peinture de Monet et plus généralement des impressionnistes ; il fait ainsi la distinction entre la foule et les amateurs éclairés, et cherche à analyser la manière et le but de la peinture impressionniste.

Extraits

[...] : peintres l'ont déjà pratiqué avant que des théories soient publiées les études de la nature et des impressions ne sont pas chose nouvelle tous les secrets de nature que Véronèse et Rubens, pour ne citer que ces noms respectés : référence à des peintres coloristes reconnus Un nouveau but : peindre sa manière de voir il a sa manière de voir, qui n'est pas celle de tout le monde, et il ne se soucie de mentir à son sentiment personnel, malgré tout le profit qu'il trouverait à se rallier au sentiment le plus répandu. : peinture impressionniste est en fait d'exprimer son propre sentiment, et non de chercher à plaire à l'opinion publique le plus répandu de précieuses garanties d'exactitude qu'aucune autre marque de fabrique ne leur assure au même degré. : peinture individualisée, expression / style / sentiment du peintre, s'oppose à marque de fabrique peut-être les tableaux et sujets académiques (cf. [...]

[...] critique de Leroy, refus aux Salons officiels) le nombre de ses admirateurs soit si restreint parmi les juges autorisés de la peinture ? l'estime des peintres et l'enthousiasme d'un petit cercle d'amateur L'opinion de ces amateurs me paraît fondée : le deuxième l'estime (cf. ses défenseurs Duranty, Gonse et Charles Ephrussi, les autres peintres impressionnistes comme Morisot) D'où vient que la popularité, qui s'attache si facilement aux faiseurs d'à-peu-près, semble le fuir : question orateur pour amener sa réponse sur le peu de succès du peintre pourtant elles méritaient d'attirer l'attention. [...]

[...] Durand Ruel a fait face à l'indifférence du public, témoignant de la tendance générale à éviter les expositions indépendantes Malgré le peu de succès de cette exposition, le public critique et refuse de reconnaître la peinture de Monet reproches réfutés par l'auteur Une indifférence envers les expositions indépendantes L'ensemble des peintures qu'il a montrées le mois dernier, dans l'appartement du boulevard de la Madeleine que M. Durand-Ruel a transformé en galerie d'exposition : témoignage du développement de galeries nouvelles et indépendantes dans des appartements (Cf. [...]

[...] ) Peut-être l'acuité visuelle de cet artiste lui permet-elle de serrer de plus près qu'un autre les phénomènes de la nature : référence aux qualités physiques du peintre l'acuité visuelle qui lui confère son talent et sa manière de voir propre à lui-même III) L'analyse des principes de l'impressionniste L'impressionniste est avant tout une peinture sur le vif de la nature ; Monet en peignant le sentiment et l'impression témoigne du réalisme relatif typique de l'impressionniste et, en fait, de la peinture en général La peinture transpose le sentiment du peintre, mot qui confère à l'impressionnisme une dimension musicale Une peinture sur le vif, la nature modèle de prédilection de Monet la beauté souveraine de la nature Le bruit s'est accrédité qu'il peint toujours en plein air, avec le modèle sous les yeux : représentation de la nature, sans améliorations prisent hautement la peinture de M. Monet. : raison de la reconnaissance de Monet auprès de ces amateurs Faire comme on voit et comme on peut. : maxime prisé par Lostalot, montrant l'importance des impressions visuelles D'ailleurs il prône une observation de la nature, mais avec l'intervention de l'invention personnelle : Nulle poésie n'est plus haute que celle de la nature quand on sait l'interroger et transcrire son langage (L'École française de Delacroix à Regnault p. 16). [...]

[...] : réfutation des critiques positives des amateurs, ce que peint Monet n'est pas l'exacte représentation de la réalité l'impuissance de son art : Monet n'a pas la capacité d'atteindre le réalisme absolu, ni aucun peintre Le peintre qui prétend au réalisme absolu poursuit donc une chimère. : Lostalot rappelle l'impossibilité du réalisme absolu La science nous le démontre avec sa rigueur implacable : les couleurs employées par les peintres ne sont que de ternes reflets des colorations naturelles ; elles n'ont ni l'éclat dans les clartés ni les profondeurs dans l'ombre : preuve scientifique qui appuie une fois de plus sa pensée au réalisme d'impression : il préfère utiliser cette expression, plus vraie et plus nuancée La transposition des impressionniste, une dimension musicale les sentiments qu'il vise et qu'il exprime sont d'un raffiné d'un poète. [...]