En 1101, Robert d'Arbrissel crée le monastère de Fontevraud, à la confluence de la Loire et de l'Indre (dans l'actuel Maine-et-Loire). C'était un clerc breton qui parvint, malgré sa vie d'ermite dans la forêt de Craon, à une cinquantaine de kilomètres au Nord d'Angers, à obtenir des seigneurs locaux quelques terres pour fonder sa communauté. Aux origines de cet ordre, les Plantagenêt, rois d'Angleterre, exerçaient également leur souveraineté sur l'Aquitaine et donc sur l'abbaye de Fontevraud dont ils furent les principaux bienfaiteurs. Peu à peu, la région passa sous l'autorité des rois de France qui, plaçant des abbesses de leur famille à la tête de ce monastère à partir du XVème siècle la transformèrent en abbaye royale. Ils contribuèrent par là à lui donner un nouvel essor, l'ordre fontevriste ayant souffert à la fin du Moyen Age de la désuétude dans laquelle était tombée sa Règle. Le 17 août 1792, un décret révolutionnaire ordonna le départ de toutes les religieuses des différents couvents de l'abbaye et le site fut mis en vente après avoir été divisé en plusieurs lots par l'Etat, son nouveau propriétaire. La plupart d'entre eux n'ayant pas trouvé preneur, Napoléon décida de transformer les bâtiments qui restaient en une prison centrale, fonction qui fut attachée au site jusqu'en 1963, date à laquelle son utilisation carcérale cessa au profit d'un rôle plus culturel de sauvegarde du patrimoine. Il convient de montrer comment chacune de ces trois périodes influença l'architecture de l'abbaye pour mieux comprendre le visage qu'elle avait au XIIème siècle. La fondation de l'ordre au XIIème siècle voit ainsi l'édification de l'abbatiale actuelle et la mise au point du plan général du monastère. Les aléas des changements de souveraineté permirent aux rois de France de placer la communauté fontevriste sous leur autorité : à cette période correspondent de profonds travaux dans l'abbaye. Les abbesses reconstruisirent ainsi au XVIème siècle non seulement le cloître du Grand-Moûtier (le principal et le plus grand, celui qui jouxte l'abbatiale) mais aussi les salles qui l'entourent : salle capitulaire, chauffoir, dortoir (du moins son escalier Renaissance) et réfectoire tout comme elles réaménagèrent les bâtiments extérieurs au cloître comme les infirmeries Saint-Benoît. Comme pour beaucoup de monuments en France, l'abbaye de Fontevraud a profondément souffert de la période révolutionnaire, notamment lors de son pillage, le 30 janvier 1793, et du vandalisme qui suivit. Enfin, la période carcérale de Fontevraud ne fut pas moins dommageable du point de vue de sa conservation, de lourds ajouts étant faits à ces bâtiments qui détinrent jusqu'à 1750 des prisonniers. La nef de l'abbatiale en garda ainsi longtemps des séquelles. Néanmoins, d'importantes campagnes de restauration furent entreprises dès 1906, notamment par l'architecte Lucien Magne, souvent dans le sens d'une remise en l'état de l'abbaye telle qu'à l'époque romane. Le site ainsi qu'il nous est présenté aujourd'hui, sans être similaire à celui de la fin du XIIème siècle, nous donne en conséquence de nombreuses informations sur l'architecture religieuse de la fin de l'époque romane.
La fondation de Fontevraud se situe au cœur de la réforme grégorienne, qui bouleversa l'Eglise d'Occident à partir du XIème siècle en remettant notamment en cause la suprématie de l'ordre bénédictin au profit de nouvelles règles, comme celle de Cîteaux. On peut donc se demander dans quelle mesure les choix opérés dans l'édification de cette abbaye traduisent les bouleversements religieux de la fin de l'époque romane.
[...] Les abbesses reconstruisirent ainsi au XVIème siècle non seulement le cloître du Grand- Moûtier (le principal et le plus grand, celui qui jouxte l'abbatiale) mais aussi les salles qui l'entourent : salle capitulaire, chauffoir, dortoir (du moins son escalier Renaissance) et réfectoire tout comme elles réaménagèrent les bâtiments extérieurs au cloître comme les infirmeries Saint-Benoît. Comme pour beaucoup de monuments en France, l'abbaye de Fontevraud a profondément souffert de la période révolutionnaire, notamment lors de son pillage, le 30 janvier 1793, et du vandalisme qui suivit. Enfin, la période carcérale de Fontevraud ne fut pas moins dommageable du point de vue de sa conservation, de lourds ajouts étant faits à ces bâtiments qui détinrent jusqu'à 1750 des prisonniers. La nef de l'abbatiale en garda ainsi longtemps des séquelles. [...]
[...] L'unique fonctionnalité du bâtiment ne semble pas ici de rigueur : l'architecte s'y est également livré à un véritable exercice de style, faisant apparaître dans la vallée de la Loire un style d'inspiration byzantine (seuls les lanternons sont des ajouts du début du XXème siècle). Par ailleurs, certains aspects propres à l'abbaye de Fontevraud vont également à l'encontre de l'idée selon laquelle ce monastère serait une illustration pleine et totale de l'influence cistercienne, au-delà de sa filiation avec la règle bénédictine. Premièrement, il faut remarquer que certains éléments architecturaux typiques de la région vont à l'encontre de la sobriété requise par les principes de Cîteaux. [...]
[...] On peut donc se demander dans quelle mesure les choix opérés dans l'édification de cette abbaye traduisent les bouleversements religieux de la fin de l'époque romane. Il faut remarquer en premier lieu que le monastère que fonda Robert d'Arbrissel semble, sous certains aspects, directement inspiré des idées cisterciennes. Néanmoins, l'ordre fontevriste est fondé à une époque où saint Bernard n'a pas encore édicté sa règle : l'abbaye de Fontevraud réunit donc certains particularismes qui illustrent la diversité des congrégations qui se sont créées entre la remise en question des bénédictins et l'affirmation de la règle cistercienne. [...]
[...] L'élévation de la nef répond elle aussi à une volonté certaine de sobriété. Chacun des trois niveaux de celle-ci est ainsi grandement simplifié : certes on peut observer un premier niveau d'arcatures aveugles et un autre de grandes arcades, mais leur ornementation se limite à celle de leurs chapiteaux, les colonnes étant par exemple nues, sans cannelure. De même l'éclairage n'est assuré que par de sobres fenêtres hautes qui malgré leur nombre important (deux par travée), étant percées dans des niches prises dans l'épaisseur des murs, ne vont pas dans le sens d'une complexification de l'ensemble. [...]
[...] Tout d'abord, on sait que l'actuel cloître du XVIème siècle reprend dans leur totalité les proportions du cloître roman. La monumentalité de cet ensemble un des plus grands d'Europe à l'époque pour ce type de monastère correspond à l'idéal monastique prôné par les tenants d'une réforme cistercienne. Celle-ci se dresse en effet contre l'idéal cénobitique bénédictin et entend y opposer un retour à une vie monastique érémitique : le cloître doit correspondre au désert selon les termes des théologiens de l'époque, par lequel les membres de la communauté peuvent accéder à l'état méditatif de l'ermite. [...]
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