Enseignant à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales depuis 1990, année de parution de Devant l'image, Question posée aux fins d'une Histoire de l'Art - ouvrage sur lequel porte notre étude - Georges Didi-Huberman est à la fois philosophe et historien de l'Art. Né en 1953, l'auteur fait connaître son travail avec L'invention de l'hystérie, essai paru en 1982 portant sur le traitement photographique des cas d'hystérie étudiés par Charcot. Le critique d'art Daniel Soutif, dans un article consacré à l'ouvrage au centre de nos préoccupations, révèle en quelques mots le coeur de Devant l'image, nous incitant à proposer à notre tour une étude critique de l'ouvrage de Didi-Huberman : "Pour satisfaire à cette double ambition Devant l'image travaille en quelque sorte sur deux plans, ou mieux, deux registres. L'un est celui d'une lecture qui se donne pour objet une autre lecture, celle-là même à laquelle l'histoire de l'art admet, explicitement ou implicitement, pouvoir réduire le regard sur les autres. L'autre joue, en contrepoint du regard porté sur certaines oeuvres judicieusement choisies pour les déchirures qui les traversent, regard aigu, acéré et sensuel à la fois, tout entier tendu vers l'illisibilité de ce que, par opposition au visible-lisible, Didi-Huberman nomme le visuel". Comment un historien d'Art peut-il dévaluer la discipline à laquelle il a consacré sa vie et, plus encore, prôner une science lacunaire, aporie contre laquelle tout chercheur souhaite lutter ?
L'extrait que nous nous proposons d'étudier figure en préface de Devant l'image, Question posée aux fins d'une Histoire de l'Art, de Georges Didi-Huberman. Placé en tête d'ouvrage, son caractère introductif est souligné par le sous-titre, Question posée, qui reprend le titre général de l'ouvrage et annonce donc qu'il va s'agir de poser une seule et unique question. Dans notre extrait, Didi-Huberman critique l'assimilation de l'Histoire de l'Art à une science, douée d'un discours exact et incontesté. Enonçons brièvement le déroulement de l'argumentation de Didi-Huberman, pour clarifier avec lui une préface déjà foisonnante, à l'image de l'ouvrage. Pour combattre cette idée trop généralement admise, il présente d'abord la nature double de toute oeuvre d'art qui est à la fois immédiate, puisqu'elle en appelle à la perception, mais aussi intellectualisée, dès lors qu'elle demande au spectateur, actif, un effort d'interprétation (l 1 à 15). C'est là qu'intervient l'Histoire de l'Art comme "discipline", comme science, alors que nous voulons pénétrer plus en avant dans l'oeuvre et que le spectateur s'avère impuissant ou "troublé". Il cherche dans le discours une assise à son rapport premier à l'oeuvre, qui s'offre à ses yeux sans encore faire complètement sens (...)
[...] Allant à l'encontre de la vision positive, au sens de productrice de gains, Didi-Huberman cible sa critique sur la nature proprement historique de l'Histoire de l'Art : cette discipline restrictive n'est en effet rien d'autre qu'une histoire des objets et non une création ex nihilo. L'Histoire, par définition, est recomposition d'un passé, qui même le plus rigoureusement présenté, ne pourra jamais posséder toutes les clefs de compréhension, comme Maurice Druon le disait si bien en évoquant le point de vue surplombant de Dieu, seul capable de recomposer une Histoire, événementielle mais avant tout vécue. [...]
[...] C'est ainsi la peinture d'une Histoire crique de l'Histoire de l'Art qui devrait occuper l'auteur dans le reste de son ouvrage. Plus encore, cette pratique va avoir le droit de ne pas savoir, de ne pas chercher à tout prix à dire ce qui sera toujours à côté . Le non-savoir : l'incertitude constitutive de l'Histoire de l'Art L'ouvrage, étudié dans son ensemble, vise à accepter l'idée d'un non-savoir apparent barbarisme qui demande d'abandonner l'obsession de la compréhension. On retrouve cette expression dès la ligne 11. [...]
[...] Commentaire de Question posée, tiré de Devant l'image de Georges Didi-Huberman de Souvent, lorsque nous posons notre regard sur une image de l'art à quelques paradoxes induits par la pratique lorsqu'elle cesse de questionner elle-même ses propres incertitudes Enseignant à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales depuis 1990, année de parution de Devant l'image, Question posée aux fins d'une Histoire de l'Art - ouvrage sur lequel porte notre étude -Georges Didi- Huberman est à la fois philosophe et historien de l'Art. [...]
[...] Le titre ironique de l'ouvrage cache mal son caractère polémique : la question posée se fait en vérité cri déchirant lancé contre une discipline qu'il faut scruter au microscope, puisque l'Histoire de l'Art a sa propre Histoire, qui explique ses travers contemporains et ses faiblesses. Proposant à de nombreuses reprises des plongées dans l'ouvrage, qui répond en toute logique aux interrogations formulées dans la préface, tout en dévoilant l'incipit, dans lequel sont déjà en germe les idées phares du penseur, nous tâcherons d'éclairer sa critique de l'Histoire de l'Art, comme pratique poussiéreuse en inadéquation avec l'expérience paradoxale, mais en cela riche, du regardeur. [...]
[...] ) couvre le propos de Didi d'une promesse de rigueur objective, on devine la critique. Ainsi les hommes gagnent en spectacle guignolisation et simplification parfois hâtive d'un vaste domaine. Le musée, par exemple, prétend présenter une période historique ou un lieu de production en ne déployant qu'un nombre limité d'objets, choisis à la discrétion du conservateur. Le Musée du Louvre et son ultra représentation de La Joconde, exemple que l'on retrouve au fil des pages de Didi-Huberman, est un modèle particulièrement évocateur : des panneaux parsèment le musée pour mener à celle qui a connu le succès grâce ou plutôt à cause du roman de Dan Brown L'Histoire de l'Art cautionne dès lors la spectacularisation qui a atteint des sommets dans une réinterprétation hautement discutable, puisque motivée uniquement par un souci narratologique, de la Cène de Léonard de Vinci. [...]
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