L'art vidéo qui a connu ses balbutiements grâce au Portapak développé par Sony dans les années 60 n'a jamais quitté sa qualité première : celle de capturer et d'ainsi documenter un temps fuyant. L'inscrire sur une pellicule, ainsi, c'est le pérenniser autant que se l'approprier. Les artistes y voient un fabuleux support, prétexte à capturer d'intenses performances dont le visionnage éprouve, dès lors, l'artiste tout autant que le spectateur. La vidéo, du latin video, vides, videre, voir, se fait polymorphe : le regardeur est voyeur, au sens qu'il pénètre dans un univers qu'on offre à son regard, tout en étant spectateur, puisque la vidéo étire la temporalité à loisir, comme l'exemple 24 Hours Psycho de Douglas Gordon nous le prouve. Les articles proposés, cependant, enrichissent cette question du voyeur : l'oeuvre de Bartoloméo, très clairement, tient du documentaire, plus que du medium artistique, de l'informatif, davantage que du conceptuel. Le titre de l'article d'A. Visinet est explicite : Investigations intimes suggère une enquête et donc de rassembler des preuves matérielles dans le monde réel alors que l'intimité est par essence le fameux jardin secret de Candide qui doit être préservé pour s'épanouir. L'intime, le personnel, le privé, autant de notions qui impliquent justement un interdit, celui, justement, de voir. L'article prend soin d'illustrer cette difficulté : filmer l'intimité, de l'artiste souvent, c'est assister à une mythologie personnelle en germe, d'un artiste qui se sait regardé. La vidéo comme outil doit cependant tendre vers l'universellement partagé pour être ressentie plus que comprise. Quand la caméra se fait témoin ou outil de surveillance presque, quels rapports entretiennent l'art vidéo et l'intimité ? Si l'intimité est le secret, on comprend les difficultés que soulève sa collision avec un art monstratif qui le dénature, dès lors que l'art arrache cette intimité individuelle pour la transformer.
Medium qui s'étire dans le temps, il trouve un bel écho chez Pierre Michon qui affirme que les hommes sont "faits de maille et s'ils ne l'étaient pas, nous ne raconterions pas d'histoires n'est-ce pas ?" (Les Onze, 2008) (...)
[...] Quand la caméra se fait témoin ou outil de surveillance presque, quels rapports entretiennent l'art vidéo et l'intimité ? Si l'intimité est le secret, on comprend les difficultés que soulève sa collision avec un art monstratif qui le dénature, dès lors que l'art arrache cette intimité individuelle pour la transformer. Medium qui s'étire dans le temps, il trouve un bel écho chez Pierre Michon qui affirme que les hommes sont faits de maille et s'ils ne l'étaient pas, nous ne raconterions pas d'histoires n'est-ce pas ? [...]
[...] On évoquera d'abord la capture du temps, à échelle humaine, puis la démultiplication du quotidien et donc la réinvention de l'intimité de l'artiste. Capturer un moment d'existence a longtemps été un souci de l'art vidéo, en témoigne le regard scrutateur de l'artiste, devant son moniteur, image de lui-même. Certains artistes quittent un instant leur étiquette pour se livrer en tant qu'hommes et retenir par la pellicule l'incessant égrènement des secondes. La vidéo, en filmant une scène aussi intime que la mort d'un proche, chez Sophie Calle sa mère, tout comme Bill Viola dans Nantes Tryptich, en appelle à l'expérience commune. [...]
[...] L'inscrire sur une pellicule, ainsi, c'est le pérenniser autant que se l'approprier. Les artistes y voient un fabuleux support, prétexte à capturer d'intenses performances dont le visionnage éprouve, dès lors, l'artiste tout autant que le spectateur. La vidéo, du latin video, vides, videre, voir, se fait polymorphe : le regardeur est voyeur, au sens qu'il pénètre dans un univers qu'on offre à son regard, tout en étant spectateur, puisque la vidéo étire la temporalité à loisir, comme l'exemple 24 Hours Psycho de Douglas Gordon nous le prouve. [...]
[...] La vidéo est moyen, qui dédouble la réalité, au point de s'assigner un jumeau perturbateur, Jean-Loup. Qu'ils fassent du football ou de la musique avec leurs ventres, les deux frères exploitent la circularité de leur pratique : la vidéo filme un intime fantasmé tout en interrogeant la pratique artistique. Ainsi, le but de football fabriqué par Jean-Loup est-il une sculpture et la chaussette que l'artiste sèche à l'aide d'un sèche-cheveux dans son spectacle au Rond-Point, est-elle un ready-made ? Remarquons qu'alors l'intimité de l'artiste est prétexte à une pratique réflexive sur la création mais aussi sur l'activité quasi schizophrénique du créateur, le multiple Pierrick Sorin de Nantes en étant la preuve ! [...]
[...] Le regard de l'artiste permet alors de révéler la banalité ou les pensées les plus intimes des personnages, comme si les artistes étaient doués du même pouvoir que le diable boiteux dans la croyance populaire, celle de faire disparaître les toits de Paris pour révéler ainsi les mauvaises mœurs ! Cette question de l'intimité pose un problème de taille : celle de la définition que l'on veut bien accorder à ce terme. Est-ce l'intégrité corporelle et donc tout ce qui a trait au corps-tabou ou aux sensations ? Est-ce ce qui se déroule dans la sphère privée, loin des yeux ? [...]
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