La poussée révolutionnaire de 1830 pousse les libéraux et les critiques d'art à demander aux peintres de représenter des types régionaux français plutôt que des figures historiques classiques traditionnelles. Le courant radical sous-jacent, durant la Monarchie de Juillet et qui doit amener à la Révolution de 1848, insiste constamment sur la nécessité d'un art lié à la vie contemporaine. Après la Révolution de 1848, une sensibilité nouvelle se fait jour dans la peinture française. L'imagination s'efface devant l'observation : les phénomènes de la vie contemporaine, les sujets sociaux sont privilégiés et encouragés par les exemples de la peinture hollandaise et espagnole. Le critique Jules François Félix Husson (1821-1889), dit Champfleury, qui redécouvre les frères Le Nain et publie des romans réalistes, soutient le mouvement. L'inspiration littéraire, mythologique ou religieuse disparaît au profit de l'exposition du réel. Les conséquences des évènements de 1848 transforment l'état d'esprit des jeunes artistes et bouleversent radicalement l'évolution de Gustave Courbet (1819-1877), d'Honoré Daumier (1808-1879) et bien sûr de Jean-François Millet (1814-1875).
Jean-François Millet s'inscrit historiquement dans le mouvement réaliste qui s'impose entre 1850 et 1870 mais pourtant il souhaite s'en détacher. Jean-François Millet est né à Gruchy, hameau de la commune de Gréville dans le Cotentin en Normandie. Aîné d'une famille nombreuse de paysans, il reçoit une instruction solide, notamment grâce à son oncle, curé lettré. Millet lit ainsi la Bible, mais aussi Homère, Virgile, Montaigne, La Fontaine, Shakespeare, Milton, Chateaubriand et Victor Hugo. Il travaille à la ferme familiale jusqu'à l'âge de 20 ans. En 1835, il est envoyé à Cherbourg par son père pour apprendre le métier de peintre auprès de Paul Mouchel et de Théophile Langlois de Chèvreville (1803-1845), ancien élève d'Antoine-Jean Gros (1771-1835). Le début de la carrière de Millet est essentiellement occupé par le portrait. Il s'installe à Paris en 1837, il fréquente l'atelier du peintre académique Paul Delaroche (1797-1856) et étudie à l'école des Beaux-Arts. L'ambition de se faire un nom dans la peinture d'histoire l'abandonne bien vite après les deux échecs pour le Prix de Rome en 1838 et 1839. A partir des décennies 1840-1850, Millet élabore progressivement son style. Vers 1845, il se détourne du néoclassicisme qu'il juge dépassé. Il se tourne alors vers le naturalisme. Ému par la Révolution de 1848, proche des humbles puisqu'il est lui-même originaire d'un milieu paysan, il devient le peintre des scènes rurales (...)
[...] On discerne trois raisons que Millet pourrait avoir de revendiquer sa qualité de paysan : son origine, il est fils de paysan, paysan lui-même ; le retour aux sources qu'il effectue en s'installant à Barbizon, au milieu d'une communauté villageoise ; enfin son objectif professionnel et son programme iconographique sont en prise directe avec la vie rurale. Pourtant à Barbizon, on sait notamment grâce à Edward Wheelwright (1824- 1900) qu'il se tient à l'écart des paysans. A Barbizon, Millet n'est pas intégré à la communauté villageoise, et ne le regrette même pas. [...]
[...] En vérité, avant 1848, on remarque chez Millet, une tendance réaliste ou ouvriériste. Le Vanneur, exposé au Salon de 1848, est l'une des premières œuvres d'influence rurale qu'il développe. A partir de 1849, Millet s'installe à Barbizon car il n'a jamais pu se faire à la vie parisienne. Il ne faut pas oublier que le contexte politique et social explique aussi pour une large part son évolution. La Révolution de 1848 donne sans doute à Millet l'idée de revenir aux sources de son existence. [...]
[...] L'homme et la femme se trouvent sur les lignes de forces verticales droite et gauche ils sont situés exactement sur les quatre points naturels d'intérêts du tableau. Ce jeu de lignes renforce encore plus leur présence. Le tableau représente un moment de prière ce qui explique à l'arrière plan la présence de l'église. L'utilisation de lignes directrices montantes renforce l'idée d'élévation de la prière vers le ciel. La fourche plantée, la brouette, le sac de pommes de terre et le clocher de l'église à l'arrière plan ne sont pas là par hasard. Ils renforcent les lignes verticales, horizontales et diagonales principales ou les contrebalancent. [...]
[...] Il fait ses peintures d'après des dessins exécutés antérieurement. D'habitude, il laisse de nombreux dessins qui prouvent son souci d'architecturer solidement ses compositions ; pour l'Angélus, nous conservons peu de dessins. La recherche est menée méthodiquement : l'armature géométrique, la perspective, les lignes de forces de la composition sont pensées, calculées et tracées avec une précision et une extrême rigueur. Une fois le procédé arrêté, Millet le reporte sur la toile selon le principe de la mise au carreau afin de ne pas s'écarter de la structure établie. [...]
[...] Très rapidement, L'Angélus sera hissé au rang d'icône populaire. Et dès les années 1880, sa peinture devient l'objet d'un véritable culte. L'Angélus de Millet est transformé en icône républicaine sous la IIIème République. Léon Gambetta (1838-1882) y voit une leçon de morale politique et sociale L'Angélus a été très largement reproduit sur différents objets et supports et copié ou réinterprété par d'autres artistes des XIXème et XXème siècles. Vincent Van Gogh (1853-1890) est l'héritier de Millet le plus immédiat car il fait de nombreuses copies de ses compositions et car lui aussi il a élaboré un art basé sur un dialogue personnel et un désir insatiable d'assimiler les valeurs du passé préindustriel. [...]
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