« Au lieu de découper le matériau, je m'en sers pour découper l'espace », cette phrase de Carl André peut paraître un peu déroutante lors d'une première lecture car le mouvement minimaliste, auquel l'auteur appartient, est généralement surtout caractérisé par la réduction extrême des formes et des moyens qu'il met en œuvre. De plus, le fait d'aborder la notion d'espace en tant qu'espace réel et non en tant qu'espace pictural ou sculptural, semble extrêmement novateur. Les idées évoquées ici par Carl André par cette phrase étant nouvelles, leur étude semble nécessaire afin de comprendre la portée du mouvement minimaliste et surtout celle de la nouvelle conception des relations entre l'œuvre et l'espace proposé par cet artiste.
Afin de déterminer dans quelle mesure les idées évoquées par Carl André ont influencé les problématiques de l'art moderne, nous étudierons dans une première partie le choix exprimé par Carl André quant à la question de l'intervention de l'artiste sur les matériaux, c'est-à-dire quant au rejet de la subjectivité apportée par la main de l'artiste. Ensuite, nous verrons comment à travers la notion de découpage de l'espace, les minimalistes ont redéfini la problématique de la distinction entre l'art et la vie, entre l'œuvre et l'espace réel, qui est une des préoccupations majeures des artistes dans tous les domaines de la création artistique de l'époque. Cette question, liée à l‘autonomie de l'œuvre, est également intimement lié à la définition de la place du spectateur dans une œuvre.
[...] On peut également nommer Barnett Newman et ses colorfield painting, peintures qui représentent un espace totalisant car le mur sur lequel elles sont accrochées fait partie intégrante de l'œuvre (à la différence des monochromes d'Yves Klein (nouveau réalisme)). Dans le domaine sculptural, on peut citer Tatlin et ses sculptures non illustratives ou le sculpteur Constantin Brancusi et sa Colonne sans fin, qui a fortement influencé Carl André notamment de par l'épuration des formes proposées et l'absence de socle. Ces recherches autour de l'influence des modalités d'accrochage des œuvres vont être complètement débordées par les artistes minimalistes qui s'intéressent plus globalement à la relation existant entre l'œuvre et le lieu d'exposition et par conséquent, leur travail et leur réflexion sont centrés sur la perception des objets et leur rapport à l'espace. [...]
[...] Par ailleurs, cette conception des relations entre l'œuvre et l'espace empêche le spectateur de trouver un point d'observation privilégié car aucun élément n'est mis en valeur. Au sein de l'œuvre Lever, évoquée plus haut, aucun point de vue n'est privilégié car ces plaques industrielles standards sont posées au sol les unes à la suite des autres sans aucune hiérarchie de place ni de volume et n'importe quel module peut être remplacé par un autre. Enfin, Robert Morris a également insisté sur le rôle du spectateur en créant de très grandes structures. [...]
[...] Les œuvres de Dan Flavin peuvent également illustrer les propos de Carl André à ceci près que dans son cas, c'est la lumière qui est considérée comme un matériel autonome propre à créer des situations et à découper l'espace. En effet, ses œuvres sont organisées en fonction des particularités architecturales du lieu mis à disposition de l'artiste et transforment ce lieu. L'installation de tubes fluorescents aux couleurs, dispositions et dimensions diverses, proposent une perception totalement nouvelle de l'espace : des coins se recoupent, paraissent dédoublés, ou disparaissent, des couloirs entiers semblent dématérialisés. [...]
[...] Au lieu de découper le matériau, je m'en sers pour découper l'espace Au lieu de découper le matériau, je m'en sers pour découper l'espace cette phrase de Carl André peut paraître un peu déroutante lors d'une première lecture car le mouvement minimaliste, auquel l'auteur appartient, est généralement surtout caractérisé par la réduction extrême des formes et des moyens qu'il met en œuvre. De plus, le fait d'aborder la notion d'espace en tant qu'espace réel et non en tant qu'espace pictural ou sculptural, semble extrêmement novateur. [...]
[...] La matérialité de la toile est niée pour mieux pénétrer dans le monde imaginaire proposé. Tout au long de la première moitié du XXème siècle, le tableau prend peu à peu le statut d'un objet à part entière, notamment grâce à Jasper Johns et Robert Rauschenberg et leurs Combine Paintings De même, Franck Stella, qui est considéré comme un précurseur direct de l'art minimal, affirme de façon plus nette la réalité matérielle du tableau avec ses Shaped Canevas. Ces œuvres, réalisées à partir du début des années 60, présentent des formes de châssis très particulières qui déterminent l'orientation des motifs de l'espace pictural, tel que des bandes colorés dans le cas de Mas o Menos (voir annexe 1). [...]
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