Le cinéma occupe une place de choix dans l'œuvre de la romancière Marguerite Duras. Tout d'abord, le cinéma est un thème récurrent de son œuvre ; on peut, à cet égard citer Un Barrage contre le Pacifique, adapté pour le théâtre sous le titre Eden Cinéma mais aussi au cinéma par René Clément en 1957. Ces deux titres montrent la diversité artistique de l'écrivain, qui ne se définissait justement que comme « un écrivain qui fait du cinéma » . Mais le cinéma n'est pas uniquement un motif de l'œuvre durassienne, l'écrivain en subit également les adaptations décevantes. C'est véritablement le « dégoût des films qu'on faisait à partir de ses livres » qui semble amener Marguerite Duras a réaliser ses propres films, alors même qu'elle participe déjà d'une étroite collaboration entres les deux arts en écrivant des scénarios pour des réalisateurs. On peut citer les scénarios de deux courts métrages : Nuit noire, Calcutta (Karmitz) et Les Rideaux blancs (Franju), mais aussi la création des dialogues de La Voleuse (Chapot), des scénarios d' Une Aussi Longue Absence (Colpi) et d'Hiroshima mon amour (A. Resnais) qui est un succès. La collaboration avec Alain Resnais en 1959 peut apparaître comme un véritable catalyseur de l'œuvre cinématographique de Duras. En effet, elle reprendra certains de ses procédés comme le montage sans raccord, l'utilisation de la voix off avec une diction artificielle, le tout dans une bande-son extrêmement soignée. En 1966, Marguerite Duras réalise son premier film La Musica, puis en 1966, un commentaire cinématographique de son œuvre Détruire dit-elle (1969), avant de connaître un relatif succès avec Nathalie Granger (1972).
En 1973, Marguerite Duras réalise La Femme du Gange. Ce film s'inscrit dans le cycle des Indes (avec Le Ravissement de Lol. V. Stein (1964), Le Vice-consul (1965), L'Amour (1971). Pour la première fois, les voix off sont utilisées de manière systématique et permettent une narration évasive et une impression d'absence et d'irréalité de la diégèse. Tourné en juillet 1974, India Song sort en 1975, trois ans après La Femme du Gange. « Si La Femme du Gange n'avait pas été écrit, India Song ne l'aurait pas été » écrit Marguerite Duras. Effectivement, India Song s'inspire autant du cycle romanesque des Indes (surtout du Vice-Consul) que des procédés cinématographiques découverts pour La Femme du Gange. Le résumé de l'œuvre a été donné par Marguerite Duras elle-même : pendant la mousson en 1937, lors d'une réception à l'ambassade française de Calcutta, la femme de l'ambassadeur, Anne Marie Stretter, danse avec Michael Richardson, son amant, ainsi qu'avec le vice-consul qui est amoureux d'elle. Le vice consul, tout comme la mendiante dont les cris rappellent l'horreur de l'Inde, est exclu du cercle des invités, car il est révoqué pour avoir tiré sur des lépreux. Après l'avoir observée avec son amant « le vice-consul maudit criera son amour à Anne-Marie Stretter. ». Après la réception, celle –ci ira aux îles et commettra ce qu'on peut imaginer être un suicide. De plus, des voix, qui ont-elles aussi une histoire, parlent entre elles de cette histoire d'amour et d'Anne-Marie Stretter, morte aux Indes. « L'histoire de cet amour, les VOIX l'ont sue, ou lue, il y a longtemps. Certaines s'en souviennent mieux que d'autres. Mais aucune ne s'en souvient tout à fait et aucune, non plus, ne l'a tout à fait oubliée. » Le thème de la mémoire est ainsi engagé aux côtés de celui de l'amour et de l'horreur.
India Song est d'abord écrit comme une pièce de théâtre, il devient une création radiophonique avant d'être publié en 1973 avec la mention « Texte, théâtre, film » qui montre bien le caractère polymorphe de l'œuvre. India Song n'est ni un texte, ni une pièce, ni un film : il participe de tous ces genres en les niant tous. Le film reçoit en 1975 le Prix de l'Association française des cinémas d'art et d'essai, on le considère donc comme expérimental. On peut en effet se demander si Duras, avec son dégoût affiché pour le cinéma, tente de déconstruire un certain cinéma pour reconstruire un imaginaire durassien, un univers plus personnel de la mémoire et de l'oubli, dont la destruction essentielle ne serait plus fixe mais possible à l'infini. Nous étudierons donc dans un premier temps comment la réalisatrice met à distance le spectateur, avant de voir en quoi elle reconstruit un imaginaire personnel du spectateur qui participe activement.
[...] C'est par la brèche de la douleur que le spectateur peut véritablement rentrer dans le film et penser ce mal qui frappe l'Humanité. Conclusion India Song apparaît donc comme un film expérimental qui va à l'encontre de ce que Marguerite Duras appelait le cinéma de supermarché c'est-à-dire les films uniquement commerciaux. Par son travail sur le son, l'espace et la mise en scène, elle réussit le pari d'opacifier le film tout en le rendant très ouvert à l'imagination. L'écrit c'est simplement le passage de l'histoire par soi dit-elle dans une interview. [...]
[...] Film français Genre : Drame Durée : 120 min Année de production : 1974 Sortie en salle en France : 4 juin 1975 Introduction Le cinéma occupe une place de choix dans l'œuvre de la romancière Marguerite Duras. Tout d'abord, le cinéma est un thème récurrent de son œuvre ; on peut, à cet égard citer Un Barrage contre le Pacifique, adapté pour le théâtre sous le titre Eden Cinéma mais aussi au cinéma par René Clément en 1957. Ces deux titres montrent la diversité artistique de l'écrivain, qui ne se définissait justement que comme un écrivain qui fait du cinéma Mais le cinéma n'est pas uniquement un motif de l'œuvre durassienne, l'écrivain en subit également les adaptations décevantes. [...]
[...] Il semble s'agir des trois comme l'indique l'intitulé du texte lors de sa publication, mais la confusion des frontières déroute le spectateur qui se trouve une fois de plus mis à l'écart. Paradoxalement, le spectateur apparaît mis à distance de ce film qui ne prend en compte ni ses attentes, ni sa volonté de compréhension. C'est en effet un imaginaire particulier qui semble se dessiner dans India Song. Quel est cet imaginaire et le spectateur en est-il totalement exclu ? [...]
[...] En 1966, Marguerite Duras réalise son premier film La Musica, puis en 1966, un commentaire cinématographique de son œuvre Détruire dit-elle (1969), avant de connaître un relatif succès avec Nathalie Granger (1972). En 1973, Marguerite Duras réalise La Femme du Gange. Ce film s'inscrit dans le cycle des Indes (avec Le Ravissement de Lol. V. Stein (1964), Le Vice-consul (1965), L'Amour (1971). Pour la première fois, les voix off sont utilisées de manière systématique et permettent une narration évasive et une impression d'absence et d'irréalité de la diégèse. [...]
[...] Toutefois, si India Song est bien emblématique de la perception durassienne du cinéma, il n'en est pas le projet le plus abouti : en 1976 dans Son nom de Venise dans Calcutta désert la destruction est portée à son comble puisque s'il s'agit de la même bande-son que dans India Song, il n'y a plus aucun personnage. Seules se succèdent à l'écran les images de lieux délabrés comme pour figurer à la fois la souffrance et un passé disparus depuis longtemps, thèmes durassiens s'il en est Bibliographie M. Borgomo, India Song et L'écriture filmique de Marguerite Duras Marguerite Duras (et autres auteurs), Marguerite Duras Marguerite Duras, India Song http://revel.unice.fr/loxias/document.html?id=761 Interview de Marguerite Duras dans Pour le cinéma TF1, 27/04/1975 Cité par Madeleine Borgomo in India Song. In Marguerite Duras tourne un film. [...]
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