I. LE CONTEXTE SOCIAL ET POLITIQUE DE LA FIN DES ANNÉES 1970 : LA FAVEUR DE LA PEINE DE MORT
Ces planches sont donc parues à la fin des années 1970 dans la revue "Fluide glacial" et rassemblées dans le tome 1 des idées noires paru en 1981, l'année même de l'abolition en France de la peine de mort.
France : dernier pays de la Communauté européenne et dernier pays de l'Europe occidentale à l'abolir. Au Portugal en 1867, en Hollande en 1870, et pour les derniers, en Grande-Bretagne en 1965 et en Espagne en 1978.
Déjà au XIXème siècle, des auteurs comme Victor Hugo dans Le Dernier Jour d'un condamné avait pris position contre la peine de mort.
Déjà le président de la République à partir de 1906, Armand Fallières, partisan de l'abolition de la peine de mort, avait gracié systématiquement tous les condamnés à mort. Puis, en 1908, Aristide Briand, garde des Sceaux du gouvernement Georges Clemenceau, avait soumis aux députés un projet de loi visant à abolir la peine de mort. Ce projet avait été repoussé par 330 voix contre 201 et les exécutions capitales avaient repris en 1909.
En 1939, les exécutions en public sont interdites et elles ont lieu désormais dans l'enceinte des prisons.
Le livre d'Albert Camus et d'Arthur Koestler, Réflexions sur la peine capitale, paru en 1957, a grandement contribué à sensibiliser l'opinion contre la peine de mort et la fin des années 1960 et mai 1968 ont confirmé le basculement de l'opinion publique, désormais majoritaire contre la peine de mort (39% pour en 1969), mais une recrudescence de la violence en France dans les années 1970 inverse la tendance : on croit en l'exemplarité de la peine pour lutter contre la violence et certains crimes d'enfants exaspèrent l'opinion (...)
[...] Le livre d'Albert Camus et d'Arthur Koestler, Réflexions sur la peine capitale, paru en 1957, a grandement contribué à sensibiliser l'opinion contre la peine de mort et la fin des années 1960 et mai 1968 ont confirmé le basculement de l'opinion publique, désormais majoritaire contre la peine de mort pour en 1969), mais une recrudescence de la violence en France dans les années 1970 inverse la tendance : on croit en l'exemplarité de la peine pour lutter contre la violence et certains crimes d'enfants exaspèrent l'opinion. C'est donc dans le contexte indécis de la fin des années 1970 que Franquin dessine ces deux planches, avec l'aide de Delporte pour le scénario de la première. [...]
[...] Franquin argumente donc indirectement, sous le voile d'un récit imagé (comme La Fontaine délivre une morale à travers une fable ou Voltaire un message philosophie par le biais d'un conte), mais argumente-t-il en convainquant, à savoir en sollicitant la raison du lecteur, ou en le persuadant, c'est-à-dire en jouant sur ses émotions ? Il s'agit ici de convaincre le lecteur, en développant un argument assez évident, celui du cercle vicieux : o il est contradictoire et absurde de punir quelqu'un en lui infligeant une punition identique à son crime, on ne peut faire subir à quelqu'un ce que l'on lui reproche d'avoir subi (cf. [...]
[...] Cet humour est certainement le moyen pour l'auteur d'exorciser ses angoisses, comme le suggère la phrase suivante de Franquin lui-même : Cela [la publication des planches des idées noires] vient sûrement d'une tendance à la dépression qui n'était pas mortelle, car ce sont tout de même des gags pour faire rire, non ? (source de cette citation inconnue vraisemblablement un entretien journalistique mais attestée par plusieurs sources de cet exposé). On trouve aussi le thème de la peine de mort, comme vous pouvez le voir sur les deux planches suivantes. Planche 1 Planche 2 I. [...]
[...] Franquin dessina cette série jusqu'en 1959. o connu aussi pour la série Gaston Lagaffe créée par Franquin en 1957 dans le journal de Spirou et publiée en bande dessinée à partir de 1960 et jusqu'en 1992 série qui met en scène un employé de bureau nommé Gaston, travaillant au journal Spirou, grand fainéant, commettant chaque semaine de nombreuses gaffes. Premier vrai héros de la bande dessinée moderne, en qui plusieurs générations vont se reconnaître. Héros moderne, au sens où la sympathie du lecteur est suscitée ici envers un personnage avec des faiblesses et certains défauts. [...]
[...] CONCLUSION : Ces deux planches des Idées noires sont donc manifestement engagées contre la peine de mort et, de manière différente, ont participé au débat sur le sujet, comme a pu le faire par ailleurs à la même époque la chanson L'assassin assassiné (1980) de Jean-Loup Dabadie, mise en musique et interprétée par Julien Clerc. Sous la Vème République (à partir de 1958) criminels sont exécutés et la dernière date exécution capitale de 1977 (Hamida Djandoubi). À la fin des années 1970, alors que la droite est au pouvoir avec Giscard d'Estaing et alors que l'opinion est majoritairement favorable à la peine de mort, la gauche inscrit l'abolition dans ses programmes électoraux et en pleine campagne à l'élection présidentielle en 1981, François Mitterrand prend le risque d'aller contre l'opinion dominante en affirmant qu'il abolira la peine de mort s'il est élu. [...]
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