L'art minimaliste oscille entre deux tendances. La première consiste à quitter le champ de l'expression de l'artiste dans son oeuvre pour penser la signification de celle-ci non pas comme un don de l'artiste, une intériorité cachée, mais comme une élaboration perceptuelle du spectateur. L'oeuvre minimaliste est toute extériorité : elle ne se donne pas simplement à voir, elle contraint le spectateur d'entrer en elle. L'autre tendance est réflexive : l'oeuvre minimaliste se présente elle-même dans son évidence matérielle, elle adopte la forme des présentoirs, des cadres, mais ne présente rien d'autre, n'encadre rien d'autre qu'elle. Oeuvre processuelle, elle est la présentation en tant que telle.
On va voir que ces deux tendances vont diverger et s'approfondir dans les années 70. D'un côté, le minimalisme va évoluer en art conceptuel, où l'oeuvre est remplacée par l'idée de l'oeuvre. D'un autre côté, il va évoluer en art environnemental : land art, art décoratif.
[...] La tendance à se passer de l'oeuvre, à présenter en guise d'oeuvre des projets ou des protocoles, qu'on a vue présente chez LeWitt, a des liens avec la volonté minimaliste de produire des oeuvres inexpressives, sans relation affective entre l'artiste et l'oeuvre. Ce qui compte n'est pas le geste mais l'idée. Cette idée créatrice remplace l'acte artistique, ou plutôt elle devient l'acte artistique.
C'est une vision de la création qui n'est pas totalement nouvelle. A la Renaissance s'était développée une théorie de l'art néoplatonicienne qui a beaucoup d'affinité avec la théorie de l'art conceptuel. Dans cette théorie néoplatonicienne de l'art, l'artiste est plus qu'un artisan parce que son talent ne réside pas dans son savoir-faire manuel, il réside dans la grandeur de son idée. L'artiste forme une idée de peinture, de sculpture, dans son esprit ; cette idée se concrétise d'abord en dessin, puis dans la matière. (...)
[...] L'œuvre est réussie quand la réalisation matérielle correspond parfaitement à l'idée de l'artiste. Or cette capacité de l'artiste à former des idées fait de l'artiste un intellectuel, elle l'anoblit par rapport à l'artisan. Mieux : elle l'assimile à Dieu, qui est le créateur des idées. C'est en cela que cette théorie est néoplatonicienne : chez Platon, le monde est l'incarnation térielle, passagère, partielle, d'idées éternelles, immatérielles et invisibles . Dans l'art conceptuel, ce qui différencie l'artiste du spectateur, c'est que c'est lui qui a l'idée de l'œuvre ; le spectateur ou n'importe qui peut réaliser l'œuvre, peu importe. [...]
[...] Ils n'offrent point d'échappatoire, car la surface, par les ruptures de formes et de couleurs qui y sont opérées, interdit les projections mentales ou les divagations oniriques du spectateur . La peinture est un fait en soi et c'est sur son terrain que l'on doit poser les problèmes . Il ne s'agit ni d'un retour aux sources, ni de la recherche d'une pureté originelle, mais de la simple mise à nu des élé‐ ments picturaux qui constituent le fait pictural . D'où la neutralité des œuvres présen‐ tées, leur absence de lyrisme et de profondeur expressive. [...]
[...] En 1969 il réalise une série : Art as Idea as Idea l'art en tant qu'idée comme idée. Kosuth est un élève d'Ad Rein‐ hardt, dont on a vu que ses monochromes noirs exprimaient une forme de transcendan‐ ce, mais qui cherchait aussi à atteindre l'art pur, l'essence de l'art, l'art en tant qu'art . La série de Kosuth se présente comme des tableaux noirs sur lesquels sont écrits, en blanc, les définitions du dictionnaire des mots art idée signification rien . [...]
[...] En 1969 ils publient le premier numéro de la revue ArtLanguage dans laquelle Dan Graham publie Schema, une pièce qui est une liste cons‐ tituée du nombre et du genre de mots et symboles utilisés dans sa propre page, ainsi que le grammage du papier . Graham, Schema En 1972, ils exposent à la Documenta V de Kassel Index 01, qui se présente comme 4 blocs contenant des dossiers remplis d'articles et de définitions sur l'art et l'esthétique . Art & Language, Index En France, l'art conceptuel a connu moins de succès sous sa forme philosophique ; mais la tendance tautologique et déconstructrice du modernisme a produit des mouvements notables. Parmi eux, le mouvement Support‐Surface est un des plus importants. [...]
[...] L'art minimaliste oscille entre deux tendances. La première consiste à quitter le champ de l'expression de l'artiste dans son œuvre pour penser la signification de celle‐ci non pas comme un don de l'artiste, une intériorité cachée, mais comme une élaboration ceptuelle du spectateur. L'œuvre minimaliste est toute extériorité : elle ne se donne pas simplement à voir, elle contraint le spectateur d'entrer en elle. L'autre tendance est flexive : l'œuvre minimaliste se présente elle‐même dans son évidence matérielle, elle adopte la forme des présentoirs, des cadres, mais ne présente rien d'autre, n'encadre rien d'autre qu'elle. [...]
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